Environnement - Le projet de parc national de la forêt de Fontainebleau relancé
Frédéric Valletoux, maire de Fontainebleau, et François Letourneux, président du comité français de l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) vont remettre le 27 janvier à la ministre de l'Ecologie, Nathalie Kosciusko-Morizet, un rapport sur le projet de création d'un parc national en forêt de Fontainebleau. Un projet très ancien puisque dès sa création, en 1948, l'UICN avait formulé le voeu que la forêt de Fontainebleau, située à 80% sur le territoire de la commune du même nom, soit classée en parc national en raison de sa diversité biologique remarquable. Le dossier a ensuite resurgi régulièrement. En 1999, on le croyait enterré : un rapport réalisé pour le compte du ministre de l'Environnement de l'époque était défavorable à l'idée d'un parc national en raison de la forte opposition des élus locaux et de la présence sur le massif forestier de nombreuses coupures écologiques (une autoroute, deux routes nationales, une ligne de chemin de fer) et d'une forte concentration d'activités humaines (plus de 15 millions de visiteurs par an et une agglomération de 40.000 habitants au coeur de la forêt).
Avec la nouvelle loi de 2006 sur les parcs nationaux, la donne a changé tant en termes de gouvernance - les acteurs locaux sont mieux associés, avec une représentation majoritaire dans les conseils d'administration des parcs - que de philosophie. On est ainsi passé d'une vision purement conservatoire à l'idée que la protection de la biodiversité sur un espace naturel fragile n'excluait pas les activités humaines sur ce même site. C'est dans ce contexte que le maire de Fontainebleau a décidé en 2009 de relancer le projet. En janvier 2010, un comité de pilotage s'est mis en place, avec l'idée d'"inventer le parc national des années 2020", selon les termes de François Letourneux. Ce comité a associé les différentes parties prenantes au sein de quatre collèges (élus locaux, associations d'usagers, acteurs économiques et touristiques, scientifiques et associations environnementales).
Les élus locaux en première ligne
Le rapport de synthèse présenté à la ministre de l'Ecologie est issu des travaux de ce comité qui ont pris fin le 18 septembre dernier. "Il s'agit de la première fois en France qu'un projet de création de parc national a été repris à l'initiative des élus", souligne François Letourneux. Même si certaines divergences de fond subsistent, les membres du comité sont tombés d'accord sur l'idée de poursuivre la réflexion sur la faisabilité du parc au sein d'un groupement d'intérêt public (GIP) auquel les collectivités, l'Etat, les associations et institutions concernées seraient invités à participer. Si le ministère y est favorable, le GIP pourrait voir le jour dès cette année.
Pour Frédéric Valletoux, la création d'un parc national - le premier en plaine - aurait d'abord pour vertu de remédier aux problèmes de gouvernance. "Résoudre l'équation entre une fréquentation en hausse constante de la forêt et la préservation de la qualité de la nature ne peut être faite avec les outils d'aujourd'hui". Selon lui, "la forêt de Fontainebleau fait déjà partie des milieux naturels les plus protégés de France, notamment avec les "réserves intégrales" instituées par l'ONF (Office national des forêts, NDLR) qui interdisent complètement l'intervention humaine sur certaines parcelles". A ses yeux, le massif est davantage protégé que beaucoup de parcs nationaux existants "mais l'empilement d'une quinzaine de statuts différents aboutit à la confusion".
Autre problème soulevé par l'élu : les moyens limités de l'ONF. "Le week-end, il n'y a qu'une trentaine d'agents sur le terrain, pour plus de 20.000 ha de forêt !" Sur le fond, il milite pour la création d'un nouveau genre de parc national intégrant la problématique périurbaine. "La forêt de Fontainebleau est le poumon vert des Franciliens. Il serait dommage dans les débats actuels sur le Grand Paris de penser uniquement en termes de transports et de développement économique alors qu'il y a un vrai signal à donner par rapport aux espaces naturels fragiles." Le statut de parc national pourrait donc à la fois permettre de répondre aux enjeux de demain et réparer les erreurs du passé - rétablissement des continuités écologiques par des recouvrements partiels de routes, meilleure sensibilisation des usagers du massif au respect de l'environnement, meilleures gestion et répartition des flux de visiteurs etc.