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Développement durable - Le projet de loi d'orientation du Grenelle de l'environnement est bouclé

Le ministre de l'Ecologie, Jean-Louis Borloo, a présenté le 30 avril le projet de loi d'orientation et de programmation du Grenelle de l'environnement. Comportant 47 articles, il tient sur une dizaine de pages. "Prenant appui sur les conclusions du Grenelle, la présente loi fixe les objectifs, définit le cadre d'action et précise les instruments de la politique mise en œuvre par la collectivité nationale pour lutter contre le changement climatique, élaborer des stratégies d'adaptation, préserver la biodiversité ainsi que les services qui y sont associés et contribuer à un environnement respectueux de la santé", expose l'article 1 qui vise à accorder cette loi avec la Stratégie nationale de développement durable.

"Ce texte ayant pour vocation d'organiser une société économe reprend l'intégralité des engagements du Grenelle. Il va même plus loin sur certains points dont la réalisation des lignes LGV. Prolongements qui feront l'objet de lois de la République et d'une concertation fin 2008 avec les collectivités", s'est félicité Jean-Louis Borloo. "En termes d'aménagement du territoire, ce texte est fondamental et localement les maires seront des acteurs incontournables pour porter cette politique au regard de laquelle les Scot devront être mis à jour", a renchéri Hubert Falco, secrétaire d'Etat chargé de l'Aménagement du territoire. Autre réajustement par rapport aux conclusions du Grenelle : à la demande des professionnels, les bâtiments publics seront conçus suivant la norme "basse consommation" d'ici à 2010 et non 2012, année durant laquelle c'est bien l'ensemble des permis de construire déposés qui y seront assujettis.

Une même montée en charge est prévue d'ici à 2012 pour les plans climat territoriaux. Quant aux Agendas 21, "utilisés comme outils de contractualisation entre Etat et collectivités", leur généralisation est imminente. "Globalement, la loi est construite sur des investissements et des solutions de préfinancement par l'Etat dont les fonds seront générés grâce aux économies d'énergie réalisées", a précisé Jean-Louis Borloo. Ainsi, la réalisation de ces investissements massifs, atteignant par exemple 300 millions d'euros d'ici à 2010 en faveur de la biodiversité ou un milliard d'euros sur 4 ans pour la recherche durable, susciteront une activité générant au total 550.000 emplois d'ici à 2020. D'autres investissements, en faveur des énergies renouvelables par exemple, visent à remplir les engagements communautaires et sont également finançables via les économies réalisées ou la vente d'électricité.

De nombreuses mesures concernent directement les collectivités : les plans d'action visant le bon état écologique des eaux, l'incitation à la mise en place d'observatoires du bruit en agglomération, l'encouragement à la tarification incitative pour le traitement des déchets et l'objectif de réduire de 15% d'ici à 2012 les déchets destinés à l'enfouissement et à l'incinération, la participation des citoyens, l'objectif d'autonomie énergétique dans les DOM-TOM, le pilotage dans chaque région d'une trame verte d'ici à 2012, la réalisation d'un schéma national des infrastructures de transport favorisant le report vers les modes les plus respectueux de l'environnement - avec une multiplication par six en 15 ans des transports urbains en site propre (hors Ile-de-France), qui passeront à 1.800 km - ainsi qu'un verdissement global des politiques administratives et des aides aux particuliers.

"On craignait une rupture de dynamique, avec aussi le risque que ce processus innovant du Grenelle se fasse dévorer par l'institution et fracasser par les réalités financières, mais ce n'est pas le cas, le pari est tenu", a conclu Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'Etat chargée de l'Ecologie.

Soumise dès demain au Conseil économique et social, cette loi qualifiée de "premier étage de la fusée" du Grenelle passera ensuite au Conseil d'Etat puis en Conseil des ministres fin mai pour une première lecture à l'Assemblée nationale avant l'été. Elle sera assortie d'un "second étage" comportant une première loi d'application avant l'été,  consacrée aux dispositions réglementaires dans le bâtiment et les transports, et une deuxième à l'automne qui concernera notamment l'agriculture. Par ailleurs, ce "paquet" législatif de trois textes n'aurait de sens sans la transposition dans les prochains mois de la directive européenne sur la responsabilité environnementale. Nathalie Kosciusko-Morizet a également précisé que des mesures fiscales telles que la redevance incitative sur les déchets seront intégrées au projet de loi de finances pour 2009.

Les associations écologistes reconnaissent que ce premier projet de loi d'orientation est conforme au Grenelle mais elles s'inquiètent du flou concernant les financements. "On a peu ou pas de moyens mis en avant par l'Etat pour réussir ce changement de civilisation", a estimé Yannick Jadot, de Greenpeace. Dans le bâtiment, par exemple, "il n'y a aucune précision sur les outils que l'Etat mettra à disposition des propriétaires pour les aider à rénover leurs bâtiments", a-t-il indiqué. "Il va falloir trouver des financements. Le chantier ne fait que commencer et il est gigantesque", a estimé Arnaud Gossement, porte-parole de France Nature Environnement (FNE). Selon lui, "c'est seulement quand les projets de loi Grenelle II et III seront rédigés qu'on pourra calculer combien tout cela va coûter".

Morgan Boëdec / Victoires éditions avec Anne Lenormand