Le PDG de la SNCF appelle à accentuer les investissements dans le réseau ferroviaire

Le PDG de la SNCF Jean-Pierre Farandou, auditionné ce 2 octobre par les députés de la Commission du développement durable, a érigé l'entretien du réseau ferroviaire en priorité. Le groupe ferroviaire entend consacrer 2,3 milliards d'euros supplémentaires entre 2024 et 2027 à la régénération du réseau mais au-delà, son PDG estime à 1,5 milliard d'euros par an les montants d'investissements nécessaires pour garantir la qualité de service.

"Les enjeux liés au réseau sont fondamentaux si on veut maintenir de la fiabilité, de la fréquence, de la performance" dans la desserte ferroviaire, a insisté Jean-Pierre Farandou, première personnalité auditionnée ce 2 octobre par la toute nouvelle Commission du développement durable de l'Assemblée nationale qui se réunissait pour la première fois depuis la dissolution de juin dernier.

La SNCF finance elle-même la régénération du réseau, via le "fonds de concours", une caisse abondée par toutes les sociétés du groupe SNCF (et notamment SNCF Voyageurs) dont une partie des bénéfices sont prélevés. En 2024, la SNCF va ainsi consacrer 1,7 milliard à l'entretien du réseau via ce "fonds de concours", a indiqué Jean-Pierre Farandou. "J'ai décidé d'accroître l'apport au fonds de concours de 2,3 milliards d'euros supplémentaires entre 2024 et 2027" par rapport à ce que la loi de réforme ferroviaire de 2018 prévoyait, a-t-il ajouté. Pour autant, "il faudra mettre 1,5 milliard d'euros supplémentaire par an dans l'entretien du réseau à partir de 2027", a-t-il également prévenu.

Mettre l'accent sur la régénération du réseau classique

"Le réseau classique ferré structurant (qui compte 3.000 km, sur lesquels roulent 80% des trains, NDLR) est le parent pauvre des dernières décennies", années du tout TGV, a-t-il reconnu. "Nous avons sous les yeux l'Allemagne qui n'a pas fait les efforts suffisants et connaît de gros problèmes de fiabilité", a-t-il illustré. Outre-rhin, faute d'investissements, "la régularité des trains est tombée à 60%", a-t-il déploré. "Nos collègues suisses refusent même que les trains allemands rentrent dans leur pays car ils sont trop en retard et ça vient gêner la circulation des trains suisses", a détaillé le PDG.

Sur le 1,5 milliard d'euros de plus jugé nécessaire à partir de 2027, la SNCF est prête à en mettre 500 millions, assure Jean-Pierre Farandou. Pour le milliard restant, il suggère de capter une partie des revenus fiscaux tirés du système européen de compensation carbone pour l'aérien et le transport routier (ETS) à partir de 2027, qui devrait rapporter 2 milliards d'euros à la France. Autre piste possible selon lui : profiter de l'arrivée à expiration des concessions autoroutières à partir de 2030-31 pour ouvrir des possibilités de réinvestir dans le réseau ferroviaire.

Les Serm comme alternative à la voiture

Pour les transports du quotidien, Jean-Pierre Farandou voit dans les services express régionaux métropolitains (Serm) un "instrument massif de développement du ferroviaire dans le pays". Ils doivent permettre à des personnes qui, aujourd'hui n'ont pas d'autre choix que d'utiliser leur voiture pour leurs déplacements, notamment en zone rurale, de laisser celle-ci à la gare la plus proche de chez eux pour se rendre à la métropole où ils emprunteront ensuite les transports en commun ou utiliseront un vélo. Sur les petites lignes aujourd'hui de la responsabilité des régions, il a affirmé que la SNCF essayait de "trouver des méthodes moins coûteuses pour mener les travaux" et proposer de nouveaux matériels roulants  adaptés "pour alléger les investissements et l'exploitation".

Réinvestir dans le fret 

Le dirigeant de la SNCF a aussi plaidé en faveur d’une hausse de 30 millions d’euros des aides à l’exploitation du fret afin de passer de 170 à 200 millions d’euros. Selon lui, cette somme supplémentaire avait été promise par Clément Beaune, ministre délégué chargé des Transports dans le gouvernement d'Elisabeth Borne. "A ma connaissance, on ne l’a pas" dans la version du projet de loi de finances qui sera présenté en conseil des ministres le 10 octobre, a-t-il regretté, en appelant les députés à déposer des amendements sur ce sujet.  "Ces 30 millions d’euros il les faut", notamment pour "rétablir" un équilibre concurrentiel entre le fret ferroviaire et le transport routier. Il a également invité les députés à s’intéresser de près à la révision en cours du contrat de performance de SNCF Réseau car selon lui, "une grosse partie de l’avenir du réseau se joue à travers cet avenant."

Sécurité : soutien à l'utilisation des caméras-piétons

Autre sujet abordé, la protection du réseau après les sabotages du 26 juillet dernier. "Nous avons identifié une cinquantaine de points sensibles dont nous avons augmenté la surveillance" via des drones notamment, a indiqué Jean-Pierre Farandou. Il a aussi annoncé qu'il prévoyait de passer des accords avec la gendarmerie pour déployer des patrouilles d'hélicoptères le long des lignes à grande vitesse les veilles de grands départs. Toujours au chapitre de la sécurité, le P-DG de la SNCF a exprimé son soutien à l'utilisation de caméras-piétons, dont l'expérimentation a pris fin ce 1er octobre, au grand dam des acteurs des transports publics (lire notre article). 85% des agents de la SNCF concernés estiment que c’est "une bonne chose", a-t-il affirmé, jugeant que cet outil "pacifie les relations". Il appelle donc de ses vœux la pérennisation du dispositif prévue par la proposition de loi "Sûreté dans les transports" adoptée par le Sénat en février dernier mais toujours pas examinée par les députés. A ce sujet, François Durovray, le ministre délégué chargé des Transports, a assuré sur TF1 le 1er octobre qu'il avait sollicité l'inscription du texte à l'Assemblée pour une adoption définitive "le plus rapidement possible".