Le Parlement se met d'accord sur le paquet climat de l'UE
Après un échec il y a deux semaines, les eurodéputés sont finalement parvenus, mercredi 22 juin, à voter un compromis sur trois textes clés du paquet climat de l'UE : la réforme du marché carbone, la taxe carbone aux frontières et la mise en place d'un Fonds social pour le climat.
Deux semaines après les avoir rejetés à la surprise générale, les eurodéputés ont adopté, mercredi 22 juin, les trois textes législatifs constituant le cœur du paquet climat "Fit for 55" présenté par la Commission en juillet 2021 : la réforme du marché carbone, la taxe carbone aux frontières et le futur Fonds social pour le climat. L’objectif du paquet est de réduire les émissions de gaz à effet de serre d'au moins 55% d'ici à 2030 par rapport au niveau de 1990 (avant d'atteindre la neutralité climatique d’ici à 2050 comme le prévoit le "Green Deal").
Le principal point d’achoppement tenait au calendrier de la réforme du marché du carbone instauré en 2005. Ce marché carbone permet aux producteurs d’électricité et industries polluantes (sidérurgie, cimenteries…) d’acheter des "droits à polluer". Mais en réalité, jusqu’ici, l’essentiel des industriels bénéficiaient de droits gratuits, ce qui avait pour but de ne pas les défavoriser par rapport aux importations venant de pays tiers. Or la Commission souhaite désormais la disparition de ces quotas gratuits à mesure que seront taxées les importations de secteurs polluants (acier, aluminium, ciment, engrais, électricité) sur la base du prix du CO2 européen. Seulement se posait un problème de calendrier. Le texte adopté en commission par les députés et présenté en plénière le 8 juin prévoyait de prolonger ces droits jusqu’en 2034 (soit un an avant ce que proposait la Commission). Une date jugée trop lointaine par les députés de gauche qui s'y étaient opposés. Les trois textes avaient alors dû être renvoyés en commission. La nouvelle mouture, fruit d’un compromis entre PPE, S&D et Renew, prévoit désormais une baisse graduelle des quotas de 2027 à 2032, le temps de mettre en place la nouvelle taxe carbone aux frontières. Par ailleurs, les députés ont élargi le marché au secteur maritime, à l'aviation, aux poids-lourds et aux immeubles de bureaux. Les sites industriels pourront en outre continuer à bénéficier de quotas gratuits pour leur production destinée à être exportée vers des pays ne disposant pas d’une tarification carbone.
72 milliards d'euros de compensation
"En quinze jours, nous avons réussi à retourner la situation et à trouver les compromis qui nous permettent, je l’espère, de voter massivement le plus gros paquet climat jamais voté en Europe", s’est félicité juste avant le vote, le député français Pascal Canfin (Renew), président de la commission Environnement, soulignant que le Fonds social pour le climat – destiné à compenser les effets de ces mesures climatiques sur les citoyens - permettra d’opérer une transition "juste" En pleine crise énergétique majeure, et alors que de nombreux pays européens – Allemagne, Autriche et Pays-Bas – ont décidé de relancer les centrales à charbon pour compenser les pénuries de gaz, parvenir à un tel compromis n’était pas chose aisée.
"Nous aurions préféré une suppression progressive des quotas gratuits d’ici à 2030. Mais 2032 est un compromis avec lequel nous pouvons vivre, tout simplement car c’est le plus ambitieux que nous pouvions obtenir, compte tenu de la domination numérique de la droite et des libéraux", a commenté le député Eric Andrieu (S&D), dans un communiqué, à l'issue du vote.
L’acceptation de ces mesures repose sur le Fonds social pour le climat doté de 72 milliards pour la période 2025-2032 et dont l’accès sera conditionné au respect de l’état de droit. Ce fonds se traduirait par des réduction de taxes et redevances, voire d’aides directes pour compenser la hausse des prix du transport routier et du carburant de chauffage (jusqu’en 2032), par des incitations à la rénovation des bâtiments, des incitations à passer aux transports collectifs ou au vélo, au développement d’un marché de l’occasion de la voiture électrique… "Toutes les mesures du paquet Fit for 55 seront accompagnées de solides mécanismes de justice sociale et de solidarité qui en compensent les coûts, afin de garantir une transition socialement équitable grâce à des mesures d'efficacité énergétique et à des investissements dans la mobilité zéro émission", assure Eric Andrieu.
Le texte va à présent faire l’objet d’un compromis entre Parlement et Conseil.