Économie sociale et solidaire : initiatives tous azimuts pour le mois de l'ESS 2019
Avec un Forum national de l'ESS et de l'innovation sociale de trois jours à Niort, le Mois de l'économie sociale et solidaire a cette année soigné son démarrage. Chambres régionales de l'ESS (Cress), collectivités, associations et autres acteurs des territoires organiseront durant tout le mois de novembre quelque 2.200 événements pour promouvoir les réponses de l'"économie autrement" aux grands défis sociaux et environnementaux. À cette occasion, le Conseil national des Cress diffuse une analyse de la conjoncture de l'emploi dans l'ESS entre 2010 et 2018.
Organisé par le réseau des chambres régionales de l'économie sociale et solidaire (Cress), le Mois de l'ESS a été lancé le 4 novembre à Paris, puis le 6 novembre à Niort avec l'ouverture du Forum national de l'ESS et de l'innovation sociale. Déployé sur trois jours et avec la mobilisation de nombreux partenaires cette année, dont la Banque des Territoires, ce forum a lieu pour la cinquième année dans le chef-lieu des Deux-Sèvres connu pour abriter les sièges sociaux d'assureurs mutualistes tels que la Maaf, la Maif et la Macif. "L'ESS représente 14,6% de l'emploi privé en Nouvelle-Aquitaine, soit deux points de plus que la moyenne nationale, et plus de 20.000 entreprises", s'est enorgueilli Alain Rousset, président de la région Nouvelle-Aquitaine, en ouverture du forum. Le Conseil national des Cress (CNCress) diffuse d'ailleurs ces jours-ci une nouvelle analyse de l'Observatoire national de l'ESS sur l'emploi dans ce domaine entre 2010 et 2018, avec un chapitre sur l'hétérogénéité des situations régionales (voir notre encadré ci-dessous).
Les collectivités parties prenantes
Plusieurs séquences de l'événement ont été pensées pour les collectivités soucieuses de travailler avec les entreprises de l'ESS dans le cadre de leurs politiques de soutien à l'innovation sociale, la silver économie, l'entrepreneuriat, la transition écologique ou encore la culture. La "coopération territoriale" est également un thème fortement mis en avant, la communauté d'agglomération du Grand Châtellerault (Vienne) exposant par exemple une méthodologie de mobilisation éprouvée sur différents projets – coopérative jeunesse de service, recyclerie avec des acteurs du réemploi, tiers-lieux.
"En quoi l'économie sociale et solidaire et l'innovation sociale sont-elles des outils au service des territoires et des réponses aux défis de société ?", se sont plus globalement interrogés les participants lors de la conférence d'ouverture, avec parmi les orateurs Christophe Itier, haut-commissaire à l'ESS, et Mahel Coppey, nouvelle présidente du Réseau des collectivités territoriales pour une économie solidaire (RTES). Il aura été question notamment de finance solidaire, qui est également à l'honneur en ces premiers jours de novembre. Le réseau France active a publié pour l'occasion un manifeste pour le développement de la finance solidaire et annoncé de nouvelles initiatives en la matière.
Trois prix de l'ESS ont été en outre attribués ce 7 novembre aux structures Permis de construire (réinsertion sociale de personnes placées sous main de justice, prix d'utilité sociale), Service d'accompagnement des familles en difficulté (lieu d'accueil de jour "Îlot femmes", prix égalité femmes-hommes) et la Mutualité française Haute-Saône (réemploi d'aides techniques médicales, prix transition écologique).
L'ESS et ses principes pour répondre aux défis de la société
"Les principes qui régissent nos entreprises de l’ESS (lucrativité limitée, gouvernance démocratique, recherche d’une utilité sociale, répartition des bénéfices autre que dans les mains des actionnaires) impliquent une responsabilité globale à l’égard de la société", rappelle Marie-Martine Lips, présidente du CNCress, dans le dossier de présentation du Mois de l'ESS 2019. L'opération vise à faire connaître et promouvoir cette manière différente d'entreprendre, présentée notamment comme davantage en phase avec les défis sociaux et environnementaux actuels et les aspirations des citoyens.
2.200 événements devraient avoir lieu dans les territoires, dont de nombreux organisés par des collectivités – le RTES en recense certains ici. Le mois de novembre est également l'occasion pour les régions de tenir leur conférence régionale de l'ESS, par exemple cette année en Occitanie.
Intitulé "Les journées de l'économie autrement" et organisé par le journal Alternatives économiques en partenariat avec le CNCress, un événement de clôture aura lieu pendant deux jours à Djion les 29 et 30 novembre. Christophe Itier a de son côté déjà annoncé sa présence à Strasbourg le 27 novembre pour un "Tribunal pour les générations futures" – organisé par le journal Usbek et Rica dans le cadre d'une journée européenne sur l'ESS – autour de la question : "L'entreprise de l'ESS doit-elle devenir la norme ?"
Quelle évolution de l'emploi dans l'ESS entre 2010 et 2018 ?
Plus de 71.000 emplois créés entre 2010 et 2018, soit une croissance moyenne de 0,4% par an : l'Observatoire national de l'ESS porté par le CNCress publie une note d'analyse (disponible prochainement sur son site) sur la conjoncture de l'emploi dans l'ESS sur cette période, à partir des données de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale. Il rappelle tout d'abord que 2,4 millions de salariés travaillent dans l'ESS, soit 14% de l'ensemble des salariés dans le privé. L'Observatoire constate un dynamisme entre 2011 et 2016 (+ 87.200 emplois, + 3,5%), puis une baisse de l'emploi à partir de 2017 (- 16.100 emplois, - 0,8%) en lien avec les politiques menées – réduction de 70% des embauches en contrat aidé entre 2016 et 2018, impact des réformes fiscales sur le don, contraction des finances publiques.
L'emploi aurait évolué différemment entre 2010 et 2018 selon les familles de l'ESS : + 1,6% dans les associations (+ 50.150 postes entre 2010 et 2016 et - 23.300 entre 2016 et 2018), + 9,7% dans les mutuelles, + 30,2% dans les fondations et - 0,3% dans les coopératives. Dans l'analyse par secteur, c'est l'aide à domicile qui apparaît comme la plus en difficulté : - 21.500 emplois entre 2010 et 2018, avec des difficultés de recrutement qui sont pointées. Deux secteurs sont présentés comme fortement touchés par les récentes réformes : les arts et spectacles (- 13.300 emplois sur la période) et les sports et loisirs (+ 8.350 emplois, correspondant à "un coup d'arrêt après une hausse de l'emploi"). L'Observatoire note des transformations dans le secteur de l'hébergement social et médicosocial (+ 15.320 emplois), une "conjoncture favorable" dans la santé (+ 9.500 emplois) et les activités financières et d'assurance portées par les mutuelles (+ 5.400 emplois).
La baisse de l'emploi en 2017 a concerné toutes les régions, sauf l'Île-de-France, peut-on lire dans l'étude. Entre 2010 et 2018, certaines régions ont connu une croissance soutenue de l'emploi dans l'ESS : d'abord "les régions de l’Ouest de la France dans lesquelles le poids de l’ESS est traditionnellement plus fort (Pays de la Loire, Auvergne-Rhône-Alpes, Nouvelle-Aquitaine, Bretagne)" (entre + 4,4 et + 7,5%, contre + 3,5% sur la période en moyenne nationale), plusieurs régions d'outre-mer (+ 7,5% en Martinique, +7,9% à la Réunion, + 18,1% en Guyane, mais – 8,1% en Guadeloupe) et enfin en Île-de-France (près de 28.000 nouveaux emplois sur la période). Dans les régions Hauts-de-France, Grand Est et Occitanie, la croissance de l'emploi a été sur la période plus faible que la moyenne nationale (entre + 0,2 et + 2,2%). Les effectifs ont baissé dans les cinq autres régions que sont la Corse, Provence-Alpes-Côte d’azur, Bourgogne-Franche-Comté, Normandie et Centre-Val de Loire. L'Observatoire national de l'ESS rappelle que chaque Cress porte un observatoire régional de l'ESS produisant des notes d'analyses conjoncturelles aux échelles régionale et infrarégionale.