L'ESS dans les territoires ruraux
Dans le monde rural, l'économie sociale et solidaire pèse plus lourd qu'ailleurs. Emploi, secteurs d'activité, tendances, défis : le RTES et l'Avise publient une analyse détaillée rédigée par l'Observatoire national de l'ESS du CNCress. Ce dernier vient par ailleurs de signer un protocole de partenariat avec l'Udes, avec l'ambition de créer des "maisons communes de l'ESS" en régions.
Quel est le paysage de l’économie sociale et solidaire (ESS) dans les territoires ruraux ? Le Réseau des collectivités territoriales pour une économie solidaire (RTES) et l’Avise viennent de publier une étude rédigée par l’Observatoire national de l’ESS du Conseil national des chambres régionales de l’ESS (CNCress). Dans le cadre du projet "Tressons" destiné à renforcer la place de l’ESS dans le monde rural (voir notre article du 3 mai 2019), cette étude dresse un panorama des activités et de l’emploi se rattachant à cet ensemble.
14% de l'emploi dans le monde rural, contre 10,5% dans le reste du territoire
Dans un périmètre métropolitain représentant quelque 6 millions de personnes et 16.000 communes, 22.510 établissements - majoritairement des associations - et 161.900 emplois salariés (140.900 ETP) sont dénombrés. L’ESS représente ainsi 13,8% de l’emploi total et 17,7% de l’emploi privé, contre 10,5% et 13,9% dans le reste du territoire. L’emploi dans l’ESS a également progressé dans les territoires ruraux d’environ 5% entre 2008 et 2015 - à peu près comme sur le plan national -, alors qu’il a diminué de 4% dans le reste de l’économie. Comme dans l’ensemble de la France, l’emploi dans l’ESS est plus féminisé (68%) dans le monde rural. Les rémunérations y sont en revanche plus faibles qu’ailleurs : de l’ordre de 27.200 euros bruts en moyenne, contre 30.600 au niveau national.
Un paradoxe mis en avant dans l’étude : "La place de l’ESS par rapport à la pauvreté rurale questionne autant sur sa capacité à répondre aux situations d’exclusion grâce à l’insertion socio-professionnelle que sur l’importance de l’emploi précaire qu’elle génère elle-même, notamment parmi les femmes."
Action sociale : une concurrence accrue du privé lucratif
Autre enjeu : la concurrence de plus en plus forte du secteur lucratif dans certains domaines tels que l’aide à domicile, la petite enfance et l’hébergement de personnes âgées. C’est en effet dans l’action sociale que l’ESS en milieu rural concentre le plus d’emplois, avec 50% du total contre 41% au niveau national. Si les effectifs de l’action sociale ont augmenté de 10% dans l’ESS entre 2008 et 2015, ils ont connu une hausse encore plus importante dans le secteur public (+ 18%) et dans le reste du secteur privé (+ 28%). Plus précisément, l’emploi ESS a légèrement diminué dans le champ de l’aide à domicile (- 6%) et augmenté dans les autres domaines - dont une hausse de 26% pour l’accueil de jeunes enfants -, parallèlement à des créations d’emplois importantes dans le reste du secteur privé.
"Moteur du dynamisme de ces territoires", l’ESS est aussi "au coeur des transitions écologiques et solidaires à venir", concluent les auteurs. "Ces transitions s’incarnent aussi par l’engagement citoyen d’habitants qui se mobilisent pour valoriser et cultiver les atouts de leur territoire." Parmi les initiatives mises en avant dans le cadre du projet "Tressons", citons l’association InSite qui envoie des volontaires en service civique dans des villages de moins de 1.000 habitants pour développer des projets sociaux et culturels. Soutenue par la région Occitanie, le département de Haute-Garonne et plusieurs partenaires nationaux, la toute jeune association a l’ambition de multiplier les missions de services civique partout en France.
Partenariat entre l'Udes et les Cress : vers des "maisons communes de l'ESS" en régions ?
L'Union des employeurs de l'économie sociale et solidaire (Udes) et le Conseil national des chambres régionales de l’ESS (CNCress) ont signé le 17 juillet un protocole de coopération de trois ans pour davantage de coordination dans l'appui aux entreprises de l'ESS. Portant sur des enjeux de représentation auprès des pouvoirs publics, de développement, de formation et de collecte et exploitation de données, ce partenariat pourrait "aboutir à la création de maisons communes de l’ESS en régions associant les Cress et l’Udes, ainsi que toute autre initiative visant à mutualiser des moyens de fonctionnement sur les territoires", selon le communiqué de l'Udes.
Le précédent protocole de coopération 2016-2018 n'avait donné lieu qu'à deux déclinaisons régionales (Île-de-France et Normandie) et à un début de réflexion pour une "maison commune" en Provence-Alpes-Côte d'Azur. Dans le cadre du nouveau protocole, l'Udes et le CNCress entendent cette fois "optimiser leurs modes de collaboration" pour un partenariat "plus ambitieux et fécond".