Projet de loi Notr - Le gouvernement renonce au transfert des collèges
Lors de la discussion, le 19 janvier, du projet de loi de nouvelle organisation territoriale de la République (Notr), le gouvernement a retiré son amendement qui visait à rétablir le transfert aux régions des 5.274 collèges actuellement gérés par les départements.
L'idée affichée par le gouvernement était de parvenir à des économies en faisant des régions les seuls gestionnaires des collèges et des lycées et donc aussi l'unique employeur des agents techniques (les TOS) travaillant dans ces établissements. Rappelons qu'en commission, les sénateurs avaient supprimé du texte cette disposition au motif que les économies ne seraient pas au rendez-vous. Ils s'étaient aussi interrogés sur la possibilité matérielle pour les élus des futures grandes régions d'assister aux réunions des conseils d'administration des collèges.
Peu après le retrait de l'amendement, le secrétaire d'Etat en charge de la réforme territoriale a vanté "le pragmatisme du gouvernement" et résumé la chose clairement dans un tweet : "Les collèges resteront départementaux." La décision n'a pas été improvisée. Dans une interview aux Echos du 14 janvier par exemple, le président du Sénat avait déjà indiqué que la majorité sénatoriale avait trouvé un accord avec le Premier ministre "pour conserver les collèges sous la responsabilité des départements". On sait par ailleurs que Manuel Valls est désireux de trouver un compromis avec le Sénat et l'Assemblée nationale sur la réforme territoriale. Il ne l'a pas caché et l'a par exemple redit il y a quelques jours.
Les routes dans le giron du département
On peut donc penser que le gouvernement a définitivement abandonné son projet de transfert des collèges aux régions. Il faut dire que ce projet avait été écrit à l'heure où il était prévu de "dévitaliser" le département avant liquidation totale. On sait le virage qu'il y a eu là-dessus, sachant que dans le même temps, la carte des 13 régions a été adoptée fin 2014 au Parlement et validée il y a quelques jours par le Conseil constitutionnel. Or avec de telles grandes régions, le transfert de compétences comme celle des collèges devenait plus délicate à envisager.
Dans le cadre de la discussion en séance, le 16 janvier, le gouvernement a en revanche maintenu son amendement tendant au retour dans le texte des dispositions prévoyant le transfert aux régions des 381.000 km de routes départementales. En commission, le Sénat les avait supprimées. Il avait avancé que la gestion des routes par un échelon de proximité apporte "une capacité de réaction rapide en cas d'intempérie ou d'accident". Dans l'hémicycle, il a renouvelé son hostilité aux intentions gouvernementales. "Pour 90% de la voirie départementale", le transfert à la région serait une "catastrophe", a soutenu Jean-Jacques Hyest, rapporteur. Les départements dont la densité de population est faible possèdent un réseau très vaste générant des coûts d'entretien par habitant bien supérieurs à ceux que connaissent les départements urbains, avait avancé, en vain, la ministre en charge de la décentralisation.
Le gouvernement n'a pas obtenu plus de succès lorsqu'il a tenté d'imposer de nouveau le transfert des ports départementaux aux autres collectivités ou à leurs groupements. La disparition du département n'étant plus au programme, ces transferts ne se justifient plus, a souligné Philippe Bas, président de la commission des lois. De plus, "pour les ports de taille intermédiaire, le texte du gouvernement est préoccupant car il crée une surenchère entre les collectivités et ouvre la porte à un démembrement du port selon ses activités", a-t-il déclaré.
Des régions quand même renforcées
En revanche, les sénateurs ont accepté le transfert aux régions des transports interurbains. Déjà compétente en matière de transport ferroviaire, "la région pourra mieux coordonner les liaisons par bus ou car avec le réseau ferré", a reconnu Jean-Jacques Hyest. On avait bien senti depuis plusieurs mois - lors des congrès des associations d'élus notamment, y compris l'Assemblée des départements de France - qu'il y avait à peu près consensus là-dessus.
Les sénateurs ont en outre donné leur feu vert à un amendement du gouvernement faisant de la région l'autorité organisatrice des transports scolaires. Le même amendement permet à la région de déléguer l'exercice de cette compétence par convention à une autre collectivité ou à un groupement. Il précise en outre que le département conserve sa compétence pour organiser les services de transport spécial des élèves handicapés vers les établissements scolaires. "Du fait de sa plus grande proximité avec les territoires", le département sera aussi compétent pour le transport à la demande, précise le texte élaboré par le Sénat.
Les sénateurs ont aussi renforcé la responsabilité de la région dans l’établissement et l’évolution de la carte régionale des formations supérieures et de la recherche. Ils ont enfin adopté un amendement du gouvernement qui prévoit au 1er janvier 2016 une décentralisation aux régions du patrimoine immobilier des 17 centres de ressources, d’expertise et de performance sportive (Creps).
Commencé le 13 janvier en première lecture au Sénat où le gouvernement est minoritaire, le débat sur les compétences des collectivités se poursuit cette semaine et se conclura par un vote solennel le 27 janvier.
Thomas Beurey / Projets publics
Taille des intercommunalités : le gouvernement ne convainc pas
Le Sénat s'est opposé dans la nuit du 19 au 20 janvier au relèvement du seuil démographique des intercommunalités de 5.000 à 20.000 habitants qu'a proposé le gouvernement.
A une très large majorité, les sénateurs ont rejeté un amendement gouvernemental qui prévoyait de maintenir ce seuil à 20.000 habitants tout en l'adaptant pour les intercommunalités dont la densité de population est inférieure à la moitié de la densité moyenne du département ou dont le territoire comprend des zones de montagne. Il proposait également d'adapter le seuil pour les intercommunalités dont le périmètre a évolué à compter du 1er janvier 2012 à la suite de la réforme des collectivités territoriales de décembre 2010.
La commission des lois avait supprimé le seuil de 20.000 habitants, jugeant plus pertinent le seuil actuel de 5.000 habitants. En séance, les sénateurs ont trouvé trop complexes les adaptations proposées par le gouvernement. "Il faut que l'on arrive à s'engager dans un processus qui fasse davantage confiance aux élus et aux préfets", a estimé le président de la commission des lois.
T.B.