Le gouvernement prévoit de proposer une IA générative à 5,7 millions d'agents publics
Le gouvernement a détaillé ce jeudi 6 février les mesures visant à accélérer le déploiement de l'IA. Parmi les annonces, on retiendra la volonté d'équiper tous les agents publics d'une IA générative et de faciliter l'installation de datacenters.

© O. Devillers/ Laurent Marcangeli et Clara Chappaz
Alors que le sommet mondial de l'IA doit se dérouler les 10 et 11 février 2025 à Paris, le gouvernement a détaillé ce 6 février le troisième volet de sa stratégie de développement de l'intelligence artificielle. Avec un mot d'ordre : "accélérer". Même si au dire de Clara Chappaz, ministre en charge du dossier, "nous ne sommes pas en retard".
Une IA pour tous les fonctionnaires
Le gouvernement souhaite notamment utiliser le levier de la commande publique pour doper l'écosystème français de l'IA et ses 750 start-up, selon le dernier recensement opéré par France Digitale. C'est ainsi que Laurent Marcangeli, ministre de l'Action publique, de la Fonction publique et de la Simplification, a annoncé lors d'un point presse vouloir "proposer aux 5,7 millions d'agents publics un agent conversationnel sécurisé, équivalent de ChatGPT, pour effectuer des recherches, préparer des courriers, des synthèses ou des comptes rendus". Une initiative qui concerne y compris les collectivités territoriales, a confirmé le ministre, sans préciser le mode opératoire ni le financement de cette décision.
IA souveraine et de confiance
Une chose est certaine, il s'agira d'une solution "souveraine", "de confiance" respectueuse des données des utilisateurs et reposant sur des infrastructures maitrisées. Le nom de la start-up tricolore Mistral a été cité, d'autant plus que quelques jours auparavant un partenariat Mistral-France Travail a été dévoilé pour équiper ses agents de chabots spécialisés. Il ne s'agira en revanche pas de Lucie, une IA générative tricolore libre dédiée à l'éducation, dont l'accès a été bloqué quelques heures après sa publication du fait des "hallucinations" qu'elle sortait à répétition. Une initiative portée par une société privée sur laquelle la communication a eu lieu "trop tôt", a commenté Clara Chappaz, tout en regrettant la complaisance de certains à "pointer ce qui ne marche pas".
Simplifier sans remplacer
En accélérant sur l'IA, le gouvernement entend "simplifier la vie" des agents, des usagers et des entreprises, a martelé Laurent Marcangeli. "L'IA ne doit pas être perçue comme la réédition moderne du mythe de Chronos qui va dévorer ses propres enfants. Elle n'a pas vocation à remplacer les agents" a assuré le ministre. "L'IA permet aux administrations de gagner du temps, d'analyser plus vite, de résoudre des tâches complexes et de se recentrer sur les missions essentielles" a ajouté Clara Chappaz. Dans les prochaines semaines, les agents devraient être massivement formés à l'IA.
Au-delà de l'IA générative, le gouvernement veut mettre de l'IA à tous les étages dans les ministères. Après le "foisonnement des expérimentations", il s'agit désormais de "généraliser" ce qui fonctionne. L'État va lancer en parallèle "un appel à manifestation d'intérêt" dans les prochaines semaines afin "d'identifier les solutions IA pour le secteur public". Un point d'étape sur ces initiatives sera réalisé en juin 2025 à Vivatech.
35 sites pour des datacenters
Un peu plus tôt, le Premier ministre, François Bayrou, avait présidé un comité interministériel sur l'IA. Dans les annonces intéressant les territoires, on retiendra le souhait de faciliter le développement des datacenters nécessaires à l'IA. La France compte environ 250 data centers, contre 2.000 aux États-Unis. Matignon annonce l'identification de 35 sites, représentant quelque 1.200 hectares, prêts à accueillir des centres de données dans des délais courts. Des sites qui intègrent "l'acceptabilité des projets", dont la localisation précise sera dévoilée la semaine prochaine. Sur le plan financier, une rallonge de 400 millions d’euros a été annoncée pour l'année 2025 – sous forme d'investissement dans l'écosystème IA - en plus des 2,5 milliards d'euros engagés depuis 2018. Un montant à comparer aux 500 milliards de dollars (482 milliards d’euros) du projet Stargate sur cinq ans annoncés tout récemment par les États-Unis.
› Les élus locaux sceptiquesÀ l'occasion de la conférence de lancement du 6ᵉ congrès Ville Internet ce 6 février, David Lisnard, maire de Cannes, a déclaré qu'il n'était "pas au courant" de l'annonce visant à doter tous les agents publics d'une solution d'IA. Il a ajouté qu'en tant que maire, il n'avait pas attendu le gouvernement pour former ses agents à l'IA et tester différents cas d'usage. Au nom du principe de subsidiarité, le président de l'AMF a aussi plaidé pour laisser les collectivités choisir leur IA et demandé à l'État de respecter "les foisonnements locaux" tout en fournissant "des normes". Le président de Ville Internet, Mathieu Vidal a de son côté noté qu'"annoncer 5,7 millions, ça ne veut rien dire", rappelant que l'IA générative affecte davantage le "haut" des administrations que le "bas". |