DOSSIER - L'intelligence artificielle : une percée porteuse d'interrogations

Pour répondre à son ambition de faire de la France "une championne de l'IA", le président de la République a annoncé 400 millions d’investissements publics dans la recherche et la formation sur l’intelligence artificielle lors du salon Vivatech fin mai 2024. L'objectif : rattraper le retard français dans ce domaine considéré comme stratégique. Les auteurs du rapport "Notre ambition pour la France" remis mi-mars 2024 voient en cette technologie l'occasion pour les services publics "d'aller plus loin dans leur transformation". D'ailleurs, depuis 2024, les citoyens ont fait connaissance avec "Albert", l'outil d'IA générative "souverain, libre et ouvert, créé par et pour des agents publics", développé par l'État français depuis l’automne 2023 puis expérimenté au sein des maisons France services. Pour répondre à l'intérêt de certaines collectivités pour Albert, la direction interministérielle du numérique (Dinum) a fait savoir fin mai 2024 lors d'un webinaire qu'elles pourront bientôt l'utiliser, à condition qu'elles aient des compétences pointues pour l'exploiter.  
Pour autant, toutes les collectivités ne voient pas l'émergence de l'IA d'un bon œil. Intercommunalités de France, France urbaine et Les Interconnectés par exemple estiment "qu’une généralisation – même progressive – de l'IA générative dans les services publics est fortement prématurée". France urbaine demande en effet une approche "moins verticale" sur un sujet qu'elle considère comme "éminemment politique". Un débat démocratique d'autant plus nécessaire que le cadre européen, tout récemment voté (IA Act), doit désormais être mis en musique. En effet, l'IA Act a mis quatre ans à émerger des arcanes de l'Europe et son entrée en application ne sera que très progressive. Voté définitivement le 21 mai 2024, le texte a été publié le 12 juillet 2024 au Journal officiel de l'Union européenne. L'IA Act aura plusieurs incidences nationales. La désignation d'un référent IA national, mission pour laquelle la Cnil a candidaté, en est une parmi d'autres. Les lois sur la protection des données et la régulation du numérique devront sans doute aussi être adaptées. 
Côté collectivités, "on devrait compter 200 à 300 projets de collectivités intégrant l'IA en 2024", avait pronostiqué le président de l'Observatoire Data Publica en février. La progression spectaculaire ne fait que commencer. L'Observatoire n'en recensait qu'une cinquantaine il y a quelques mois, une vingtaine en 2022 et à peine cinq en 2021. Avec le temps, le profil des collectivités se diversifie et les thématiques environnementales prédominent, de la gestion de l'eau à l'optimisation énergétique, en passant par la collecte des déchets et la qualité de l'air. Une autre révolution est à prévoir au sein même des collectivités : 45% des postes répertoriés seraient concernés par l'introduction de l'IA. Si peu de métiers semblent susceptibles de disparaître, une étude menée fin mai 2024 par des élèves de l'Inet incite les élus à anticiper la mutation des postes les plus affectés. Ils pourront se tourner vers le Climate Data Hub - cadre territorial "de confiance et technique" de partage et d’utilisation des données qui permet d'accéder à des données massives (publiques ou privées) - qui s'est positionné sur l'acculturation à l'intelligence artificielle (IA). Les risques sont réels : biais algorithmiques, discriminations involontaires, violation des données personnelles, cyberattaques, surveillance de masse, etc. Mais l'éventail des possibilités d'optimiser les services publics, la sécurité, la santé publique, l'éducation ou la culture le sont tout autant. En intégrant ces technologies, les collectivités trouvent l'occasion d'améliorer l'efficacité de leurs services, réduire leurs coûts et offrir une meilleure qualité de vie aux citoyens. Tout l'enjeu sera de réussir à avancer en tenant compte des questions éthiques et de protection des données associées à l'utilisation de l'IA.

 

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