Le gouvernement installe un groupe de travail sur les finances du bloc communal
Très inquiets de la situation des finances locales, les maires et présidents d'intercommunalité se sont entretenus, le 4 décembre, avec les ministres en charge de la cohésion des territoires et des comptes publics. Ceux-ci ont installé un groupe de travail destiné à approfondir les discussions.
Le gouvernement et les associations de maires et de présidents d'intercommunalité ont constitué vendredi 4 décembre un groupe de travail, qui planchera dans les prochaines semaines sur les conséquences de la crise du Covid-19 sur la situation des finances locales.
Depuis plusieurs semaines, les associations du bloc communal alertaient le gouvernement sur la réduction des marges de manœuvre de leurs collectivités. Si l'État ne soutient pas leurs budgets avec plus de vigueur, elles ne pourront pas participer pleinement au plan de relance. À l'unisson, les maires et présidents d'intercommunalité ont adressé ce message au gouvernement, par un communiqué, il y a deux semaines (voir notre article du 23 novembre 2020).
L'exécutif semble y avoir été sensible. Lors de la discussion budgétaire au Sénat, la ministre de la Cohésion des territoires avait annoncé récemment la création de groupes de travail avec les représentants des départements et ceux du bloc communal. Cet engagement s'est en partie concrétisé, ce 4 décembre.
Jacqueline Gourault et son collègue en charge des comptes publics, Olivier Dussopt ont en effet échangé en visioconférence avec les représentants des associations du bloc communal, en présence de parlementaires (dont le rapporteur général du budget à l'Assemblée nationale, Laurent Saint-Martin et Jean-René Cazeneuve, qui avait été chargé jusqu'en juillet dernier d'une mission sur les finances locales).
Mieux compenser les pertes de recettes
Cette réunion a été l'occasion pour Jean-François Debat, président délégué de Villes de France de souligner combien le soutien de l'autofinancement des collectivités locales est "un enjeu national". Boris Ravigon, responsable de la commission "finances" à l'Assemblée des communautés de France (ADCF) a pour sa part plaidé de nouveau pour "une garantie de non-baisse des ressources" des communes et intercommunalités, qui soit effective en 2021. L'association défend aussi une meilleure compensation des autorités organisatrices de la mobilité (AOM), qui joueront selon elle un grand rôle dans la relance de l'activité. Les avances remboursables accordées par l'État pour leur permettre de faire face aux pertes de recettes tarifaires et de versement mobilité ne sont pour elle qu'une première réponse. L'ADCF souhaite également "la neutralisation" de l'effet de la mesure de chômage partiel sur le versement mobilité. Sans une disposition de ce type, "on fragilise la collectivité, puisqu'elle doit recourir à ses autres ressources pour équilibrer le budget du réseau de transports", souligne-t-on à l'ADCF.
De son côté, Romain Colas, maire de Boussy-Saint-Antoine, a appelé entre autres à la reconduction en 2021 (et jusqu'à ce que les communes et leurs groupements retrouvent leur niveau de recettes d'avant crise) du filet de sécurité inscrit dans la troisième loi de finances rectificative. Mais le représentant de l'Association des petites villes de France (APVF) a souhaité que le dispositif prenne désormais en compte les pertes de recettes tarifaires. L'élu a encore demandé, notamment, que le dispositif de "neutralisation" qui sera mis en place en 2021, dans le cadre de la réduction des impôts de production, tienne compte des hausses de taux votées par les communes et leurs groupements.
Collectivités bailleurs : vers une aide de l'État
Le gouvernement tente depuis plusieurs mois de relativiser les conséquences de la crise sur la situation financière des collectivités locales. Selon l'APVF, les ministres présents à la réunion ont poursuivi sur cette ligne, en mettant en avant par exemple le fait que les recettes de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) ne devraient diminuer l'année prochaine que de 2,2% en moyenne, contre une baisse estimée initialement à 11%. Les associations d'élus locaux répondent que la situation financière des communes et intercommunalités est très hétérogène. Cela se vérifie par exemple sur l'évolution des recettes de CVAE. Selon une enquête de l'ADCF, un quart des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre pourraient enregistrer en 2021 une réduction du produit de la taxe supérieure à 5% (par rapport à 2020). Pour près de 10% des intercommunalités, cette baisse atteindrait entre 10% et 20% et pour 3% d'entre elles, elle serait supérieure à 20%.
Pour l'heure, le gouvernement entend mettre en place une seule mesure nouvelle : la prise en charge (à 50%) par l'État du montant des exonérations de loyers décidées par les collectivités au bénéfice des entreprises qui louent des locaux commerciaux à ces mêmes collectivités. Il s'agit en fait d'étendre au secteur public une disposition du projet de loi de finances pour 2021 qui doit bénéficier (via un crédit d'impôt) aux bailleurs du secteur privé qui renoncent à des loyers au profit des locataires de locaux professionnels qui sont affectés par la crise. Les modalités d'application du dispositif pour le secteur public n'ont pas été précisées. L'APVF salue une décision qui "va dans le bons sens" : "On remet de l'équité" et "on va permettre de soutenir les petits commerces". Villes de France la juge également positive, mais aussi très insuffisante pour répondre aux "enjeux sur les finances locales".
Mais la réflexion sur le diagnostic et d'éventuelles autres solutions va se poursuivre au sein du groupe de travail, dont une prochaine réunion technique est annoncée pour le courant de ce mois. Au Parlement, le ministre délégué en charge des Comptes publics s'est dit ouvert à la création dans une prochaine loi de finances rectificative de nouveaux dispositifs de soutien pour le secteur public local.