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Le Géoportail préconisé pour diffuser les données géographiques souveraines

Les données géographiques sont stratégiques pour de nombreuses politiques publiques comme le développement de la ville intelligente et du véhicule autonome. Un rapport au gouvernement invite à confier à l’Institut géographique national (IGN) un rôle de coordination et d'animation d'une géoplateforme.

Valeria Faure-Muntian, députée de la Loire, a remis le 20 juillet dernier un rapport sur les "données géographiques souveraines" c’est-à-dire "indispensables aux décisions de la puissance publique et dont la disponibilité conditionne la possibilité même la décision publique". Ce rapport intervient à un moment ou les grandes sociétés de l’internet - et notamment Google, Waze, Uber… - ont constitué des fonds géographiques dont la richesse, la simplicité d’utilisation et la gratuité ont fait des produits de consommation courante pour les PME comme les citoyens. Cette situation engendre une dépendance préjudiciable aux entreprises francaises comme aux collectivités locales. Nombre de services cartographiques dépendent en effet du bon vouloir de sociétés américaines, comme l’a montré la récente affaire de l’augmentation des tarifs de Google Maps (notre article). Or la cartographie tend à jouer un rôle majeur dans l’économie de la donnée. "Des secteurs disruptifs tels que le véhicule autonome, la ville intelligente ou encore la livraison par drone ne seront français et européens qu’à condition de disposer d’une base de données géographiques en accès ouvert riche, qualitative et maitrisée par la puissance publique", fait valoir le rapport.

Coordonner les producteurs de données géographiques

Face à un actif aussi stratégique, le rapport propose un plan d’action à plusieurs niveaux. Constatant la multiplicité des intervenants sur la donnée géographique, il recommande de renforcer la coordination des acteurs sans imposer pour autant un "pilotage par le haut". Il suggère de développer les coopérations entre acteurs sur des thématiques précises comme la mobilité ou la création d’une carte 3D nationale. Il préconise que l’IGN joue au sein de cette communauté un rôle "d’agrégation, de standardisation, de certification des données géographiques souveraines et d’accompagnement technique des producteurs". Au niveau de l’État, le rapport estime nécessaire d’opérer des rapprochements entre les principales entités productrices de données géographiques de références et plus particulièrement du BRGM et du service cadastre de la DGFIP qui gagneraient à être intégrés à l’IGN. Sur le cadastre, le rapport note que le rapprochement entre la base de données parcellaire de l’IGN et le cadastre de la DGFIP, initié en 2011, a connu des vicissitudes (arrêt en 2016, reprise des travaux en 2017) du fait des différences d’approches entre les deux entités. Il estime cependant "qu’il y a lieu de s’interroger sur l’opportunité de maintenir au sein de deux entités distinctes une mission identique, consistant à établir et à mettre à jour une représentation des parcelles et du bâti".

Une géoplateforme gratuite financée par l’État

L’objectif serait, à terme, de créer une "Géoplateforme" nationale "permettant une gestion optimisée des données géographiques souveraines (production, agrégation, entretien, sécurité, publicité, diffusion et mise en valeur, archivage...)" dont la gouvernance associerait producteurs, développeurs et usagers. Entre la fédération des plateformes existantes (dont celles gérées par des collectivités territoriales) et la plateforme nationale unique, le rapport penche plutôt pour ce second scénario en préconisant de s’appuyer sur le Géoportail de l’IGN. Une évolution toutefois conditionnée par l’adhésion des acteurs et notamment des collectivités territoriales. Même si les relations entre l’institut géographique et les collectivités se sont beaucoup améliorées depuis l’instauration de la gratuité de l’accès à ses services pour les collectivités, le rapport estime qu’il faut un temps d’expérimentation. Il s’agirait d’initier la création de bases de données communes entre l’IGN et les producteurs "tiers" dont font partie les collectivités. En matière de modèle économique, le rapport fait clairement le choix de l’open data et de la gratuité, les dépenses occasionnées par la production et la diffusion des données devant être couvertes par la subvention publique. "Ce n’est pas la vente de données qui crée de la valeur, mais sa circulation", souligne le rapport et "la mise à disposition gratuite de ces données créera beaucoup de valeur, permettant par exemple à de petites entreprises innovantes ou aux citoyens impliqués de participer au débat et de proposer des solutions qui ne pourraient être à l’initiative d’acteurs publics uniquement". En conséquence, le rapport invite l’État à compenser progressivement les pertes de recettes subies par l’IGN par une subvention, une utilisation des productions de l’IGN sous licence ouverte et gratuite s’imposant à terme.