Le fonds pour l'accessibilité aux œuvres culturelles porte ses fruits
Un rapport juge positivement l'apport du fonds Accessibilité du ministère de la Culture. Malgré son faible montant, il a su enclencher de nombreuses actions, notamment dans les établissements labellisés. Le rôle des collectivités dans l'accès des personnes handicapées aux œuvres est cependant jugé "à géométrie variable".
Le fonds Accessibilité joue un rôle "indéniablement" positif dans la politique du ministère de la Culture en faveur de l'accessibilité des personnes handicapées aux œuvres, estime l'inspection générale des affaires culturelles dans un rapport récemment publié. Créé en 2018 et doté de 1 million d'euros, ce fonds entend favoriser l'accessibilité aux œuvres culturelles et non seulement aux lieux culturels, et vise l'inclusion de tous les publics touchés par un handicap mais aussi par le vieillissement, la précarité sociale, etc. D'abord destiné aux seules structures labellisées du spectacle vivant, il a été élargi en 2021 à tous les champs de la culture, y compris à des établissements non labellisés, et sa gestion, initialement centralisée, a été transférée aux Drac (directions régionales des affaires culturelles) en 2023.
Logique d'amorçage et changement de mentalité
En 2022, le fonds Accessibilité a soutenu 174 projets, contre 77 en 2018. Si le secteur du spectacle vivant concentre la grande majorité des projets aidés (72%), les aides touchent désormais les musées (9%), les arts plastiques (8,3%) ou encore le cinéma, le livre et la lecture, le patrimoine et des projets pluridisciplinaires. Quant aux actions aidées, elles ont porté principalement sur la langue des signes (16% des actions), les petits équipements (13,5%) et l'audiodescription (12%), mais aussi sur la formation, les outils numériques et sites internet, l'accueil, les rendez-vous accompagnés, les objets sensoriels, le mobilier adapté, le braille ou le surtitrage.
Globalement, la mission constate le "bien-fondé" du fonds en faveur de l'accessibilité aux œuvres et estime que dans les structures labellisées, qui en ont principalement bénéficié, "la prise en considération de l'accessibilité n'aurait pas été enclenchée sans l'apport du fonds, dans un premier temps". Elle souligne encore qu'il "suscite des actions concrètes, produit des changements de mentalité et provoque de réels effets d'entraînement malgré sa petite taille", et se félicite du "développement d'initiatives en réseau pour l'acquisition d'outils d'accessibilité comme pour la création d'œuvres conçues dans une perspective d'accessibilité universelle". Le rapport évoque ainsi "une logique d'amorçage" ayant "notamment pour vocation de créer des réflexes dans les établissements culturels ainsi que des effets de levier auprès d'autres financeurs comme les collectivités locales".
Les régions "ne contractualisent pas"
Des collectivités, il est largement question dans ce rapport. La mission estime que leur rôle est "à géométrie variable dans les politiques publiques en faveur de l'accessibilité de tous aux œuvres et plus généralement à la culture". Des régions, elle pointe le fait qu'elles "ne contractualisent pas avec l'État pour abonder le fonds Accessibilité […] mais œuvrent en faveur de l'accessibilité des personnes handicapées à travers plusieurs mesures qui permettent ainsi de 'réserver' les crédits du fonds pour soutenir des initiatives innovantes". La mission relève toutefois la participation des régions aux conventions Culture-Santé ou des aides à des structures labellisées qui, elles, mènent des actions en faveur des handicapés ou de créations "nativement accessibles", voire la mise en œuvre de dispositifs propres, comme en Nouvelle-Aquitaine ou en Centre-Val de Loire.
De leur côté, les départements sont, de l'avis général des Drac, "le parent pauvre de la politique d'accès aux œuvres et à la culture". La majorité d'entre eux s'en tient en effet "à l'exercice de leurs compétences propres" en matière d'action sanitaire et sociale et "la dimension culturelle n'est que rarement une priorité". Parmi les rares exceptions, la Gironde a mis en place un appel à projets accompagné par la Drac, la Vendée a signé un contrat territoire-lecture qui prend en compte les questions du handicap, tandis que l'Eure, la Seine-Maritime et le Calvados sont partenaires de la convention Drac-ARS. "D'une façon globale, note le rapport, cet échelon territorial doit encore être intégré dans la stratégie globale des Drac en faveur de l'accessibilité." Dans cette perspective, l'initiative de la Drac Occitanie, qui anime depuis trois ans un collectif des directeurs des affaires culturelles des départements où la question de l'accessibilité et du handicap est désormais portée, "est une piste qui semble intéressante pour mobiliser davantage les départements et les inviter à abonder financièrement certains projets".
Les grandes villes répondent présent
Les villes et intercommunalités offrent un panorama encore différent. Si elles "interviennent de façon ponctuelle […], certaines d'entre elles consacrent à l'accessibilité une attention soutenue à travers des crédits récurrents octroyés à des structures municipales culturelles". Sans surprise, "ce sont les communes les plus importantes et les plus urbanisées qui contribuent le plus au soutien des opérateurs culturels œuvrant à l'accessibilité des personnes handicapées". Dans ce cas, elles peuvent être parties prenantes de structures labellisées et intervenir à ce titre dans la promotion de l'accessibilité aux œuvres, mais encore agir via leur soutien à certaines structures municipales, musées, théâtres, compagnies ou lieux non labellisés.
En conclusion, la mission juge "utile de conserver le fonds dans ses contours et modalités de gestion actuelles", tout en réfléchissant à une "évolution qualitative" à court terme. Elle propose de modifier les critères de répartition des crédits afin de ne pas laisser de côté certains territoires, principalement ultramarins, et estime nécessaire de l'utiliser "dans une logique de subsidiarité avec les dispositifs d'aides existants". Enfin, elle considère que "la généralisation de l'implication des régions, l'accroissement de celle des départements et des communes passent sans doute par un ciblage des attentes prioritaires des différentes collectivités territoriales pour les embarquer mieux dans la stratégie des Drac en faveur de l'accessibilité".