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Clauses sociales du CMP - Le débat se poursuit entre praticiens de la commande publique

Avec les clauses sociales, les praticiens des marchés publics doivent allier des objectifs de politique locale en faveur de l'insertion sociale aux règles de la commande publique. Un challenge !

L'Association des acheteurs des collectivités territoriales (Aact) a tenu, le 15 juin à Paris, sa conférence annuelle. Thème de la rencontre : "Comment intégrer efficacement les aspects sociaux dans la commande publique ?" Depuis quelque temps, ce sujet est au box-office des dossiers de la commande publique. Tout a commencé en 2004 avec la directive européenne intégrant les critères sociaux et environnementaux. Ensuite, le Code des marchés de 2004 a prévu la possibilité de définir dans les cahiers des charges des conditions d'exécution d'un marché visant notamment à promouvoir l'emploi de personnes rencontrant des difficultés particulières d'insertion.
Ensuite, en 2005, un geste politique fort a voulu montrer l'exemple : l'Anru a lancé une charte nationale d'insertion à laquelle les communes bénéficaires des programmes de rénovation urbaine devaient obligatoirement souscrire. La loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005 a apporté sa contribution en touchant au sacro-saint critère de choix des offres en y intégrant les performances en matière d'insertion professionnelle des publics en difficulté. Avec le Code des marchés de 2006,  les outils sont regroupés et le temps est venu de les appliquer. En février dernier, l'association Alliance villes emploi consacrait une journée à ce thème et éditait un guide méthodologique. Actuellement, un projet de guide de l'Observatoire économique de l'achat public est en cours de bouclage. Pour les élus locaux, et certaines collectivités l'affichent très clairement dans leurs engagements, la commande publique devient un outil à part entière en faveur des stratégies locales d'insertion.

 

Questions récurrentes sur l'article 30

Lors de la rencontre de l'Aact du 15 juin, le débat sur l'article 14 du Code des marchés, qui permet au pouvoir adjudicateur de demander aux entreprises traditionnelles de réserver une partie de leurs prestations en nombre d'heures à des publics en insertion, a notamment mis en avant  la nécessité d'un management spécifique de la clause mais aussi les risques possibles d'une "mauvaise concurrence" entre collectivités situées sur un même territoire et  engagées dans ce processus. Une question politiquement incorrecte a fait l'objet de nombreuses réactions : en demandant aux entreprises de réserver des heures à des publics en insertion, la collectivité n'a-t-elle pas, par ricochet, une influence négative sur la politique de recrutement traditionnel de ces entreprises ? Déjà, sur le terrain, les promoteurs de l'article 14 envisagent des clauses pour éviter de tels dérapages. La ville d'Angers a, par exemple, prévu que lorsqu'une personne a été embauchée dans le cadre de l'article 14 en CDI par l'entreprise, celle-ci continue de bénéficier des heures insertion.
L'article 30 du CMP qui pose le principe de l'utilisation de procédures simplifiées pour des marchés de prestations d'insertion pose toujours des problèmes de sécurité juridique aux collectivités, notamment en matière de publicité. Olivier Selosse, directeur de la commande publique de la ville de Roubaix qui présentait son expérience, a témoigné : "On a eu des observations de la préfecture qui a estimé que le marché entrait dans le cadre du secteur marchand et donc que l'utilisation de l'article 30 n'était pas fondée. Mais cette observation est restée sans suite."

 

De la subvention aux marchés publics ?

Enfin, troisième article mis en avant, l'article 15 du CMP. Il ouvre la possibilité à l'acheteur public de réserver, dans des marchés traditionnels, des lots à des entreprises adaptées et donc à un public de travailleurs handicapés. Sur cet article, les intervenants ont reconnu que la difficulté reposait avant tout sur le manque d'expérience de ces entreprises en matière de commande publique. En toile de fond, le noeud gordien demeure le passage problématique entre subventions aux organismes d'insertion et ouverture des marchés publics à ces mêmes structures. L'article 53 du Code des marchés n'a pas fait l'objet, lors de la rencontre de l'Aact,  d'un développement spécifique  : cette disposition, encore peu utilisée, permet au pouvoir adjudicateur de se fonder, pour le choix d'une offre, sur un critère de "performances en matière d'insertion professionnelle". Christian Durant, chef du service de la commande publique au conseil général du Doubs, s'est déclaré satisfait de l'utilisation de cet article tout en reconnaissant la difficulté à déterminer le contenu de ce critère (pondération et sous-critères). "Nous envisageons de mixer l'article 53 avec l'article 14 car certaines entreprises avec lesquelles nous travaillons sont prêtes à dépasser les quotas d'heures définis par l'article 14." 
A l'issue de la rencontre riche en échanges, le président sortant, Marc Falize, a été réélu.

 

Clémence Villedieu

 Qui sont les bénéficiaires des clauses sociales ?

 Selon le projet de guide de l'Observatoire économique de l'achat public, les publics concernés sont :
- les demandeurs d'emploi de longue durée (plus de 12 mois d'inscription au chômage) ;
 - les allocataires du RMI ou ayants droit ;
 - les publics reconnus travailleurs handicapés ;
 - les bénéficiaires de l'allocation spécifique de solidarité (ASS), de l'allocation d'insertion (AI), de l'allocation parent isolé (API), de l'allocation adulte handicapé (AAH), de l'allocation d'invalidité ;
 - les jeunes de niveau infra 5, c'est-à-dire de niveau inférieur au CAP/BEP ;
 - les personnes prises en charge dans le dispositif IAE (insertion par l'activité économique), c'est-à-dire les personnes mises à disposition par une association intermédiaire (AI) ou par une entreprise de travail temporaire d'insertion (ETTI), ainsi que des salariés d'une entreprise d'insertion (EI) ;
 - les personnes employées dans les GEIQ (groupements d'employeurs pour l'insertion et la qualification) et dans les associations poursuivant le même objet.

C.V.


 


 

 

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