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Urbanisme - Le Conseil d'Etat précise les conditions d'entrée en vigueur du droit de préemption des biens commerciaux

Selon une décision du Conseil d'Etat du 21 mars 2008, l'instauration d'une zone de préemption de biens commerciaux est valable, même si ce nouveau dispositif issu de la loi du 2 août 2005 n'était pas encore régi par son décret d'application.

En vue du maintien de la diversité des commerces dans les centres-ville, l'article 58 de la loi n° 2005-882 du 2 août 2005 a instauré un droit de préemption au profit des communes sur les cessions de fonds de commerce ou de baux commerciaux. Avec le décret d'application n° 2007-1827 du 26 décembre 2007, précisant les conditions d'application de ce droit de préemption économique, les nouveaux articles L. 214-1 à L. 214-3 du Code de l'urbanisme issus de la loi d'août 2005 sont applicables.

Dès lors que toutes les conditions sont désormais remplies pour l'exercice du droit de préemption sur les fonds artisanaux, les fonds de commerce et les baux commerciaux, le Conseil d'Etat vient d'apporter des précisions notables sur les modalités d'entrée en vigueur de ce nouveau dispositif.

En vertu de l'article L. 214-1 du Code de l'urbanisme, le conseil municipal peut, par délibération motivée, délimiter un périmètre de sauvegarde du commerce et de l'artisanat de proximité, à l'intérieur duquel sont soumises au droit de préemption les cessions de fonds de commerce ou de baux commerciaux. Alors que l'article L. 214-3 du même code annonçait le décret d'application à venir, certaines communes n'ont pas attendu ce texte pour définir une zone de préemption. Face à cette réalité, le Conseil d'Etat n'a pas voulu expressément condamner leur impatience, en estimant que ce n'est que lorsque l'application est " manifestement impossible en l'absence de dispositions réglementaires en précisant les modalités " qu'il convient d'attendre un décret d'application. Un conseil municipal pouvait donc, depuis la loi du 2 août 2005 et avant même son décret d'application, instituer une zone de préemption en matière commerciale, sur la base de l'article L. 214-1 précité.

Cependant, la Haute Juridiction considère qu'" il en va différemment des autres dispositions (...) " et notamment de celles " relatives à l'exercice du droit de préemption et au droit de rétrocession ". Dès lors, si une commune n'a pas à délibérer à nouveau sur l'instauration prématurée d'un périmètre de sauvegarde du commerce et de l'artisanat, l'exercice du droit de préemption ainsi créé ne peut intervenir que depuis la publication du décret du 26 décembre 2007, car il " ne peut être mis en oeuvre sans qu'aient été apportées par voie réglementaire les précisions nécessaires à son application ", selon les termes de la décision d'espèce.

Néanmoins, la portée de cette décision est à relativiser, puisque dans son article 1er,  le décret du 26 décembre 2007 soumet le projet de délibération du conseil municipal à un avis de la chambre de commerce et d'industrie et de la chambre des métiers et de l'artisanat dans le ressort desquelles se trouve la commune. Beaucoup de délibérations antérieures au décret risquent donc de ne pas remplir cette formalité, qui n'était pas prévue par la loi du 2 août 2005.

 

Antony Fage / Cabinet de Castelnau

 

Référence : Décision n° 310173 du Conseil d'Etat, du 21 mars 2008, Société Megaron