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Identité numérique - Le Conseil constitutionnel censure les principales dispositions de la loi sur l'identité numérique

Le déploiement de la carte nationale d'identité numérique devrait être sérieusement retardé après la censure par le Conseil constitutionnel de l'ensemble des dispositions phares de la loi relative à "la protection de l'identité". Adoptée en cinquième lecture, par l'Assemblée nationale le 6 mars 2012, cette loi avait suscité de réelles inquiétudes sur le respect des libertés individuelles, en instituant la création d'un fichier national biométrique de tous les Français. C'est bien ce projet, permettant d'établir un lien presque instantané entre l'identité d'une personne et ses empreintes (article 5) qui a été censuré par les Sages. Par voie de conséquence ont également été rejetés la mise en place d'un système de gestion commun aux passeports et aux cartes nationales d'identité (article 10), les dispositions donnant la possibilité de consulter les données conservées dans le fichier national "en cas de doute sérieux sur l'identité de la personne" (article 6 alinéa 3), les conditions dans lesquelles le fichier pouvait être utilisé à des fins de police judiciaire ou administrative (article 7), ainsi que le texte relatif à la durée de conservation des données (deuxième phrase de l'article 7).

Le volet commercial de la carte devra offrir des garanties supplémentaires

Les Sages ont en effet considéré "qu'eut égard à la nature des données enregistrées, à l'ampleur de ce traitement, à ses caractéristiques techniques et aux conditions de sa consultation", les dispositions de l'article 5 portaient au droit et au respect de la vie privée "une atteinte qui ne peut être regardée comme proportionnée au but poursuivi".
Dans un débat qui avait assez vivement opposé les députés de la majorité à la quasi-totalité des élus de la Haute Assemblée, le Conseil constitutionnel a finalement donné raison au Sénat, aux élus de gauche des deux chambres et à la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) qui avait également publié un avis sur la question.
Les Sages ont également censuré l'article 3 qui introduisait sur la carte, des fonctionnalités mettant en œuvre la signature électronique et permettant à son titulaire d'effectuer des transactions commerciales. Le fait que le texte de loi ne précise ni la nature des données au moyen desquelles ces fonctions peuvent être mises en œuvre ni les garanties assurant l'intégrité et la confidentialité de ces données, a conduit le sages à déclarer également cet article "contraire à la constitution".
Ce refus ne marque pas le coup d'arrêt définitif de la carte nationale d'identité électronique mais il remet en cause la création d'une base "à liens forts". L'utilisation de la carte nationale d'identité à des fins de transaction commerciale n'est pas non plus rejetée, mais elle devra faire l'objet de garanties supplémentaires. Le texte de loi devra donc être entièrement remanié. Ce qui reporte la décision de création, au mieux, lors de la prochaine législature.