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Le comité des finances locales pousse à une réforme des indicateurs financiers

Le comité des finances locales (CFL) prône de nouvelles "adaptations" des indicateurs financiers utilisés pour le calcul et la répartition des dotations de l'État aux collectivités et les dispositifs de solidarité financière entre collectivités. L'instance a arrêté cette position dans une délibération votée à l'unanimité lors d'une séance plénière le 20 juillet. À l'ordre du jour figuraient aussi plusieurs bilans (répartition de la dotation globale de fonctionnement, mise en œuvre du fonds de péréquation des droits de mutation à titre onéreux perçus par les départements, exécution de l'objectif d'évolution de la dépense locale) et deux projets de décrets.

En supprimant la taxe d'habitation sur les résidences principales pour l'ensemble des contribuables et en lui substituant de nouvelles ressources pour le bloc communal et les départements, la réforme de la fiscalité locale a des conséquences sur les montants des critères financiers, tels que les potentiels fiscal et financier et l'effort fiscal. Elles sont accrues par la réduction des impositions locales payées par l'industrie, une mesure entrée en vigueur simultanément, soit le 1er janvier 2021.
Pour tenir compte de ces réformes, la loi de finances pour 2021 a adapté "le périmètre des indicateurs financiers" et prévu le lissage sur six ans des effets de cette décision. Ce toilettage avait été recommandé par le comité des finances locales (CFL). Le groupe de travail du comité qui planche sur le sujet s'était réuni à quatre reprises l'an dernier pour œuvrer à ces changements. Mais pour le CFL, il ne s'agit que d'une première étape. "Certains" indicateurs financiers "doivent connaître des adaptations plus larges", affirme-t-il dans une délibération qu'il a adoptée ce 20 juillet (à télécharger ci-dessous).

Potentiel financier : être plus proche de la réalité

Le CFL juge ainsi "pertinent" d’élargir le champ du potentiel financier des communes – un outil de mesure de la richesse mobilisable – aux droits de mutation à titre onéreux (DMTO) perçus par les communes, une recette qui s'est élevée à 4,2 milliards d'euros en 2020. Parmi les ressources ayant vocation à intégrer le potentiel financier des communes, le CFL cite aussi : la taxe locale sur la publicité extérieure (161 millions d'euros en 2020), la taxe sur les pylônes électriques (280 millions l'an dernier) et la majoration de la taxe d'habitation sur les résidences secondaires (131 millions). Pour le CFL, la liste n'est pas exhaustive. Mais il exclut d'emblée la prise en compte de la taxe de séjour (comme d'ailleurs l'ensemble des "taxes affectées"). Étant donné que cette réforme ferait varier les montants du potentiel financier des communes, elle serait accompagnée d'un dispositif de lissage.
Du fait en particulier de la suppression de la taxe d'habitation, "il ne semble pas pertinent", à terme, de maintenir l'effort fiscal des communes, estime par ailleurs l'instance. Elle recommande "à titre transitoire" de recentrer cet indicateur sur "la mesure des ressources fiscales mobilisées par une commune par rapport aux ressources fiscales qu’elle peut effectivement mobiliser". Selon le CFL, à plus long terme, l'effort fiscal pourrait être remplacé par le revenu par habitant. Mais cette piste devrait faire l'objet de simulations, pour en évaluer les conséquences.
Le CFL prône également "une réflexion approfondie", en lien avec l'Assemblée des départements de France, sur "la manière pertinente de mesurer les ressources (potentiel financier) ainsi que les charges des départements.

Indicateurs de charges

Enfin, le comité "estime que la réflexion sur les indicateurs de ressources des collectivités doit nécessairement aller de pair avec l’élaboration d’indicateurs permettant de mesurer les charges objectives supportées par les collectivités". Il appelle à la poursuite des travaux ayant pour but de mettre en place de tels indicateurs.
Auditionné le mois dernier par des députés, le directeur général des collectivités locales, Stanislas Bourron, avait estimé qu'il n'était pas indispensable de prévoir des mesures pour faire évoluer les indicateurs financiers dans le projet de loi de finances pour 2022. Agir de la sorte serait même "prématuré", avait-il déclaré (voir notre article du 25 juin 2021). Les dispositions de "neutralisation" des effets de la réforme de la fiscalité locale sur les indicateurs financiers, figurant dans la loi de finances pour 2021, permettent de "rester serein" en 2022, avait-il expliqué.

  • Bilan de la DGF, péréquation des DMTO, objectif d'évolution de la dépense locale…

Au cours de la même séance, le CFL a examiné le bilan de la répartition en 2020 de la dotation globale de fonctionnement (DGF). Celle-ci s'établit à 26,749 milliards d'euros. Une somme partagée entre les communes (à hauteur de 45%), les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre (24%) et les départements (31%).
Principale composante de la DGF des communes, leur dotation forfaitaire s’élève à un peu plus de 6,9 milliards d'euros. Elle bénéficie à 33.733 communes, 1.318 autres ne la percevant plus. Il s'agit du montant après prise en compte de l'"écrêtement" de la dotation, qui sert notamment à financer la progression des dotations de péréquation communale et la hausse des dotations liée à la croissance démographique. Cette minoration de la dotation forfaitaire, qui s'établit cette année à 142 millions d'euros, concerne 20.848 communes. La dotation de compensation des intercommunalités à fiscalité propre est "écrêtée" dans le même but pour un montant de 94,6 millions d'euros. Cette baisse s'applique à l'ensemble des groupements de communes.
Par ailleurs, le CFL s'est penché sur la répartition du fonds national de péréquation des DMTO perçus par les départements, qui a été mis en œuvre pour la première fois l'an dernier. Le comité a décidé de mettre en réserve une somme de 57,8 millions d'euros qui pourront être utilisés lorsque la conjoncture immobilière sera mauvaise. Le fonds s'élève donc au total cette année à 1,6 milliard d'euros, qui bénéficient à 68 départements.
De plus, les élus locaux ont pris connaissance du bilan de l'exécution en 2020 de l'objectif d'évolution de la dépense locale (Odedel) fixé par la loi de programmation des finances publiques pour 2018-2022. Il en ressort que, l'an dernier, les dépenses de fonctionnement des collectivités (+ 1,3% à champ constant) ont légèrement dépassé l'objectif annuel (+ 1,2%). Toutefois, sur la période 2018-2020, cet objectif a bien été atteint, puisque la hausse s'est élevée à + 3,3% (pour un plafond fixé dans la loi à 3,6%). En revanche, le bilan révèle que l'objectif de réduction du besoin de financement des collectivités (total des emprunts auxquels sont soustraits les remboursements de dette) des collectivités n'a pas du tout été respecté. Au moment des débats sur la loi de programmation, les associations d'élus locaux avaient jugé irréaliste cet objectif visant une réduction du besoin de financement de 2,6 milliards d'euros chaque année. En 2019, la dette des collectivités a augmenté de 500 millions d'euros et, l'an dernier, de 4 milliards d'euros.

Notons encore que le CFL a émis un avis favorable sur deux projets de décrets. L'un d'eux tire les conséquences réglementaires de mesures adoptées dans les lois de finances pour 2020 et 2021 concernant les dotations et fonds de péréquation financière entre collectivités. L'autre définit les éléments cadastraux qui devront figurer dans les délibérations des communes et des intercommunalités lorsqu'ils voudront fixer des taux différents de taxe d'aménagement par secteurs de leur territoire. Cette nouvelle présentation des délibérations s'appliquera à celles qui entrent en vigueur à partir du 1er janvier prochain.
On saura enfin qu'à l'occasion de cette séance, les élus locaux ont examiné la version définitive du rapport de l'observatoire des finances et de la gestion publique locales sur les finances publiques locales en 2021. Le document a été mis en ligne.