Le CNC prépare discrètement la réouverture des salles de cinéma
Une délibération du Centre national du cinéma publiée au JO du 8 avril prévoit plusieurs mesures directement liées à la crise sanitaire. L'une d'elles est destinée à éviter l'encombrement des salles avec un brusque afflux d'œuvres dont la diffusion a été retardée par la pandémie. D'autres concernent le fonds d'indemnisation des tournages interrompus. La délibération crée également une "aide complémentaire exceptionnelle" pour aider les cinémas à affronter la transition.
Alors que l'incertitude règne encore sur la date d'une possible réouverture des salles de cinéma, le CNC (Centre national du cinéma et de l'image animée) se prépare à l'échéance en adoptant une délibération d'une vingtaine d'articles en date du 31 mars, publiée au Journal officiel du 8 avril. Celle-ci apporte plusieurs modifications importantes au règlement général des aides financières du CNC, désormais intégré au tout nouveau Code du cinéma et de l'image animée (d'où la publication au JO). Pas moins de dix articles de cette délibération modifient le livre IX du règlement, consacré aux "mesures exceptionnelles en faveur des entreprises du secteur du cinéma des autres arts et industries de l'image animée affectées par l'épidémie de Covid-19".
Limiter le risque d'encombrement à la réouverture des salles
Ainsi, la délibération introduit dans le règlement général des aides financières un nouvel article anticipant ce qui risque de se passer lors de la réouverture des salles. Il prévoit en effet qu'"afin de contribuer à la limitation du risque d'encombrement des salles de spectacles cinématographiques lors de leur réouverture au public tenant au très grand nombre d'œuvres dont l'exploitation a été empêchée en raison des mesures d'interdiction d'accueil du public, peuvent [...] être regardées comme éligibles aux aides financières à la production et à la préparation des œuvres cinématographiques de longue durée les œuvres dont la première forme d'exploitation n'est pas l'exploitation en salles à laquelle elles étaient initialement destinées". En d'autres termes, pourront être aidées des œuvres qui ne connaîtront pas leur première exploitation dans une salle de cinéma et seront diffusées par d'autres moyens : DVD, chaînes de télévision, plateformes par abonnement... Cette possibilité est ouverte aux sociétés de production "qui en font la demande au plus tard un mois après la date de cessation de l'interdiction d'accueil du public".
Pour le CNC, il s'agit d'"une mesure exceptionnelle tirant les conséquences de la fermeture prolongée des salles et du risque, qui en découle, d’embouteillage dans leur programmation à la réouverture". Le CNC précise en effet que "ce type de dispositif ne remet en cause en aucune manière la chronologie des médias ni son évolution prochaine" et Dominique Boutonnat, son président, réaffirme que "la salle demeure le lieu privilégié pour découvrir une œuvre".
Allongement pour le fonds d'indemnisation de tournage
Autre disposition nouvelle : le fonds d'indemnisation des tournages interrompus, reportés ou abandonnés du fait de la crise sanitaire, mis en place au printemps dernier (voir notre article du 2 juin 2020), voit la date limite de prise en compte des sinistres liés au Covid-19 repoussée du 31 mars au 30 avril 2021, ce qui permet de couvrir le troisième confinement. Dans le même esprit, il est désormais prévu qu'"en cas d'interruption ou de report du tournage intervenu à compter du 1er janvier 2021, les aides ne sont attribuées que si la reprise du tournage intervient au plus tard le 31 mai 2021" (au lieu du 30 avril 2021 jusqu'alors).
Un autre coup de pouce significatif doit contribuer à la reprise de l'activité : la majoration du montant des aides sélectives qui peuvent être attribuées pour la distribution de certaines œuvres inédites ou d'œuvres de répertoire est désormais possible pour les œuvres dont la sortie en salles a lieu entre le 2 septembre 2020 et le 31 décembre 2021. Jusqu'alors, la date limite pour l'application de cette majoration était le 3 mars 2021.
Une "aide exceptionnelle complémentaire" pour les salles de cinéma
Enfin, vis-à-vis des salles de cinéma, la délibération du CNC instaure une "aide exceptionnelle complémentaire", sous la forme d'une allocation directe aux exploitants "en vue de contribuer à compenser la baisse d'activité qu'ils subissent depuis le mois de mars 2020 en raison des mesures de restriction et d'interdiction d'accueil du public dans les salles". Sont toutefois exclus de cette aide les établissements exploités en régie directe par une personne publique (comme les collectivités territoriales). Le calcul de l'aide prend en compte le rapport entre le chiffre d'affaires réalisé par l'établissement sur une période donnée et la somme des chiffres d'affaires moyens réalisés par l'ensemble des établissements. Le montant de l'aide ne peut excéder celui de la perte réelle de chiffre d'affaires constatée sur la période comprise entre le 1er janvier et le 31 mars 2021 par rapport au chiffre d'affaires moyen réalisé entre le 1er janvier et le 31 mars des années 2017, 2018 et 2019, diminué du montant éventuel des aides du fonds de solidarité pour les entreprises.
Enfin, la délibération du 31 mars du CNC précise la définition des œuvres difficiles, susceptibles de bénéficier d'une allocation directe, en prévoyant que l'un des cas de figure est celui où "l'œuvre rencontre des difficultés réelles résultant des coûts de son immobilisation et de la nécessité de réviser les contrats afférents en raison de la durée prolongée de l'application de la mesure d'interdiction d'accueil du public dans les salles de spectacles cinématographiques". Dans ce cas des œuvres difficiles, l'intensité des aides publiques accordées pour la distribution de ces œuvres peut être portée à 100% des dépenses de distribution.
Références : délibération n°2021/CA/07 du 31 mars 2021 modifiant le règlement général des aides financières du Centre national du cinéma et de l'image animée (Journal officiel du 8 avril 2021). |