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Le Cese estime que le Grand Plan d'investissement est sous-dimensionné

Pour le Cese, le Grand Plan d'investissement gouvernemental est sous-dimensionné au regard des enjeux actuels tels que la transition énergétique, écologique, numérique et la lutte contre le chômage. Dans son rapport publié le 12 juin 2018, il avance plusieurs propositions pour "Mieux investir pour la France", dont l'extension du rôle des régions, une meilleure cohérence de la politique des pôles de compétitivité avec le Grand Plan d'investissement et l'élaboration d'une véritable stratégie industrielle nationale.

Face aux enjeux de transition énergétique, écologique, de révolution numérique et de lutte contre le chômage, "il faut renforcer énergiquement les moyens financiers et humains des plans d'investissement nationaux et européens". Dans son rapport annuel sur l'état de la France, publié le 12 juin 2018, le Conseil économique, social et environnemental (Cese) fournit ses préconisations pour "Mieux investir pour la France". Ainsi, si le Cese dresse un tableau plutôt encourageant de l'activité économique de la France (une activité plus vigoureuse en hausse de 2,2% en 2017, un marché de l'emploi qui se redresse, un niveau d'inégalités et de pauvreté moindre par rapport à nos voisins européens), il estime toutefois que le Grand Plan d'investissement du gouvernement, doté de 57 milliards d'euros sur l'ensemble du quinquennat, est "sous-dimensionné" au regard des nouveaux enjeux. Les dernières études et rapports sur le sujet en témoignent. Pour l'Institut Montaigne, le plan n'a pas suffisamment pris en compte les enjeux liés à l'intelligence artificielle et à la santé. L'OCDE estime de son côté qu'il manque 19 milliards d'euros sur la période 2015-2050 pour favoriser la transition énergétique et que des efforts équivalents à 1,4% du PIB (soit environ 30 milliards d'euros) sont nécessaires pour renforcer les capacités humaines et le système éducatif. D'autres investissements à fort rendement social, comme le très haut débit numérique, l'eau, les déchets et les transports, demandent aussi davantage de budgets.

"S'engager dans une politique d'investissements ambitieuse"

"La France doit s'engager dans une politique d'investissements ambitieuse, créatrice d'emplois, et plus solidaire", assurent ainsi les auteurs de l'avis, Patricia Blancard, chef de projet informatique, secrétaire nationale CFDT Cadres, et Françoise Vilain, présidente de Futuralia et conseillère du commerce extérieur de la France.
Parmi les recommandations du conseil : aller vers une meilleure sélection des projets en privilégiant les dépenses susceptibles de stimuler la croissance de long terme et maximiser l'effet de levier sur l'investissement privé, ou encore renforcer les études d'impact et les outils d'évaluation qui existent. Dans ce domaine, le Cese préconise aussi d'étendre aux investissements des collectivités territoriales l'obligation d'évaluation qui demeure pour les autres investissements publics.
Le Cese propose d'aller vers de nouveaux modèles de coopération public-privé - les partenariats public-privé n'étant pas toujours profitables -, et d'engager une commande publique responsable, à travers une meilleure professionnalisation des acheteurs publics, un accès des TPE et PME facilité à la commande publique et le développement des schémas de promotion des achats socialement et écologiquement responsables. En 2015, seules 3 à 7% des collectivités concernées avaient adopté un tel schéma.

Etendre le rôle des régions

Le Cese préconise également d'étendre le rôle des régions en matière d'investissement. Compte tenu de leurs compétences économiques renforcées, les régions "doivent participer activement au soutien des écosystèmes territoriaux dans les bassins de vie", précisent les auteurs, notamment dans le domaine de l'économie sociale et solidaire. Quant à la politique des pôles de compétitivité, le Cese relève les effets de levier positifs depuis sa mise en place en 2005, mais il note toutefois un saupoudrage des moyens qui sont affectés aux pôles. La solution ? Mieux sélectionner les projets et mettre davantage en cohérence les politiques des pôles et le Grand Plan d'investissement, afin de concentrer les efforts sur les pôles les plus favorables aux écosystèmes territoriaux.
Le Cese se préoccupe aussi des fractures territoriales, en particulier pour les territoires ruraux et ceux frappés par la désindustrialisation. Il estime qu'il faut "renouer avec une véritable politique industrielle". "Le Grand Plan d'investissement du gouvernement, s'il a le mérite de mieux identifier les domaines sur lesquels il faut faire porter les efforts, ne constitue par une véritable stratégie industrielle", insistent les auteurs. Co-construite par l'Etat, les entreprises et les partenaires sociaux, cette stratégie industrielle, avec le rétablissement d'un ministère de l'Industrie, doit permettre de développer l'environnement favorable à l'investissement productif, tant matériel qu'immatériel, et doit s'inscrire dans le cadre d'une politique industrielle européenne.

Enfin, le Cese propose de renforcer les investissements sociaux : les investissements liés au vieillissement et à la dépendance (formation, prévention, reconnaissance des personnels chargés de cette population), ceux permettant l'accompagnement vers l'accès et le retour à l'emploi (insertion et qualification, formations initiale et professionnelle), et ceux destinés à la prévention et à l'insertion des jeunes et des enfants, pour "s'extraire des 'trappes à pauvreté".