L'Association des maires de France repart en campagne

Lors de sa conférence de presse de rentrée ce 17 septembre, l'Association des maires de France (AMF) a annoncé le lancement d'une campagne de communication grand pulic portée par le message "Les communes… Heureusement !", qui sera aussi l'intitulé de son prochain congrès... et qui prendrait d'autant plus de sens dans le contexte politique et institutionnel incertain du moment. Les communes comme élément de stabilité. Les représentants de l'association en ont profité pour fustiger une nouvelle fois la façon dont Bercy a récemment mis en cause le rôle supposé des collectivités dans la dégradation des comptes publics.

Une dissolution "insensée", la "très grande instabilité" politique qui s'en est suivie, "un contexte budgétaire alarmant" et "une situation sociale et économique tendue"… C'est en ces termes que David Lisnard, le président de l'Association des maires de France (AMF), a dépeint ce 17 septembre le contexte du moment. Au-delà de ce constat peu enthousiasmant, alors que l'on attend toujours de connaître la composition du gouvernement Barnier et l'hypothétique contenu du projet de loi de finances, pas évident, pour les représentants des maires, de dérouler un discours sur les attentes et propositions de l'association concernant les principaux champs de compétences des communes. Ce qui, en temps normal, aurait sans doute été au menu d'une conférence de presse de rentrée. Il faudra pour cela patienter jusqu'au prochain congrès des maires, en novembre.

La situation inédite actuelle n'empêche toutefois pas l'AMF de lancer une grande campagne nationale de communication. Sous le slogan "Les communes… Heureusement !", cette campagne a été conçue comme une "sensibilisation du grand public" au "rôle essentiel" des communes. Il s'agit de "mettre en pleine lumière les réalisations, les innovations mais aussi l’engagement des maires et de leurs équipes", explique l'AMF, soulignant que "souvent, le maire est à la fois le premier recours et le dernier espoir pour nombre de nos concitoyens".

Pour David Lisnard et André Laignel, le premier vice-président délégué de l'association, la crise politique qui dure depuis plusieurs mois vient en réalité conforter le bienfondé de cette opération qui se déclinera sur le web / réseaux sociaux ainsi que via un spot TV (les associations départementales de maires vont recevoir un "kit" afin que ces contenus soient largement diffusés). Dans un environnement particulièrement incertain, plus que jamais, "les communes apparaissent comme un pôle de stabilité", estime en effet David Lisnard, qui aime à qualifier les communes de "PME de la République".

Et le président de l'AMF de décliner ce "heureusement que les communes sont là" : pour l'environnement (eau, assainissement, déchets, énergies décarbonées…), pour les écoles, le périscolaire, les cantines, pour le développement économique et le commerce, pour le soin, pour "l'accompagnement de la vie" de l'acte de naissance jusqu'au funéraire, pour les transports et les infrastructures routières, pour "le civisme, le lien social"… "Absolument partout, les communes témoignent d'une propension à l'innovation, apportent des solutions. Il ne manque qu'une chose : la confiance – qu'on nous laisse bosser", déclare-t-il, reprenant son désormais traditionnel leitmotiv sur le "fléau bureaucratique" et sur cet Etat "qui doit cesser d'entraver a priori".

Des collectivités dispendieuses ? "Une fable"

Et puis heureusement que les communes sont là… "pour les finances du pays", tacle David Lisnard suite à la récente mais déjà fameuse "séquence Bercy" au cours de laquelle deux ministres démissionnaires ont mis en cause les collectivités dans la "dégradation des comptes publics" (voir nos articles ci-dessous). Selon le maire de Cannes, la dette des collectivités représentait il y a trente ans "un peu plus de 9% du PIB" tandis qu'aujourd'hui "nous sommes à un peu plus de 8%". Or "pendant ce temps-là, la dette de l'État a été multipliée par 2,5", a-t-il rappelé, ajoutant : "Plus l'Etat nous prélève, plus il fait du déficit." Il estime que du côté de l'Etat, s'il y a eu amélioration à partir de 2011-2012, il y a bien "dégradation" depuis 2018-2019, soit avant même la crise Covid. Et s'agissant de la gestion économique et financière de cette crise, le président de l'AMF parle d'un "n'importe quoi qu'il en coûte", fustigeant, non pas les dispositifs d'aide de l'Etat, jugés "très bien faits", mais leur prolongation sur une durée "démesurée" après la pandémie. Et leur multiplication frisant selon lui le "clientélisme d'Etat".

Évoquant "un étouffoir" financier pour les collectivités, André Laignel a lui aussi dénoncé "un enfumage, une fable" lorsque Bercy assure que "le principal problème financier serait les collectivités" : "On nous a parlé de 16 milliards [de dépenses des collectivités qui dégraderaient les comptes publics]. Tout le monde a demandé à ce que ce soit argumenté. Or nous n'avons eu aucune réponse". S'il reconnaît un "besoin de financement un peu supérieur" à 2023, André Laignel attribue l'évolution des dépenses des collectivités à une série de facteurs dont le poids des normes, évalué à 1,6 milliard d'euros, ou à la masse salariale (hausse du point d'indice, réforme de la catégorie C). "Là-dessus, 90% relèvent des décisions de l'État", a-t-il souligné, évoquant comme il le fait souvent "une double recentralisation, financière et administrative".

"Les communes sont attaquées. Et cela donne les résultats électoraux que nous avons pu constater. Cette rupture entre la haute administration et la réalité du monde vécu fait ce sentiment de désespérance, de déclassement", a estimé le maire socialiste d'Issoudun, assurant que l'AMF continuera de plaider pour "une nouvelle étape de la décentralisation" et espérant que le futur nouveau gouvernement saura prêter une oreille attentive à l'éternelle question des "libertés locales".

 

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