Urbanisme - La ville durable : passions et contradictions
Le colloque sur la ville durable qui s'est tenu les 20 et 21 janvier à Marne-la-Vallée a été l'occasion de rappeler qu'un pôle d'excellence français consacré à cet enjeu se constitue sur le campus de la cité Descartes. Une initiative qu'a saluée la ministre de l'Ecologie, Nathalie Kosciusko-Morizet, qui a ouvert hier les débats. Des débats axés sur les nouvelles formes de gouvernance et de solidarité qui émergent localement, sur l'évolution des relations ville-campagne face à la montée en force de la métropolisation et sur la nécessité d'innover, d'esquisser des projets urbains suffisamment attractifs pour rendre la ville plus vivable, plus équitable. "Et plus créative !", a insisté Charles Landry, le fondateur du think-thank anglais Comedia, à l'origine du concept de "creative city".
"Reste que derrière le terme de ville durable, chacun entend encore ce qu'il veut", a pointé Jean-Louis Amar, directeur d'une société d'économie mixte (SEM) qui construit un vaste éco-quartier près de Rennes. Chez Renault, la notion résonne avec plus de mobilité électrique. Jean-Yves le Coz, directeur de l'Institut de mobilité durable Renault Paris Tech, a ainsi fait le point sur les partenariats et l'approche globale que nécessite ce basculement de l'essence au watt. Pour l'heure, sur un plan mondial, l'alliance Renault-Nissan a signé une centaine de partenariats avec des Etats, régions ou villes. "Mais n'oublions pas que la voiture, qu'elle soit électrique ou non, consomme beaucoup d'espace. On a tendance à l'oublier dans le débat", a observé Jean-Pierre Orfeuil, expert en mobilité et professeur à l'Université Paris-Est Créteil Val-de-Marne.
Limiter les coûts
"Comment cette mobilité électrique peut-elle s'articuler avec l'aménagement urbain et les réseaux énergétiques de la ville, tout l'enjeu est là", a ajouté Bernard Sahla, directeur d'EDF R&D, qui dispose d'un centre de recherche dédié à la ville durable en Allemagne. "Des réseaux dont il faut veiller à contenir le surdimensionnement pour faire des économies", a pour sa part suggéré Jean-Louis Amar. Dans un éco-quartier en cours d'aménagement à Toulouse, Florence Menez, chef de projet au pôle national EcoQuartiers, a relevé que c'était possible. De là à ce que ces économies puissent compenser le surcoût de construction, il y a un pas que les experts n'osent franchir.
Autre gisement d'économies : réduire les coûts de construction liés à l'automobile (aménagements astucieux de parkings) et les retards de chantier, au coût social important. "Les délais de création d'une ZAC s'allongent, de 2 à 3 ans à l'origine, on est passé à un an de plus. Il faut un an pour instruire le dossier lié à la loi sur l'eau !", a critiqué Jean-Louis Amar. A cela s'ajoute une difficulté à trouver en amont des investisseurs. "Sur certains projets, ils ne viennent pas soit parce que le projet n'est pas assez important, soit parce qu'il est trop risqué. Gagner, réduire les risques de perte sont les deux objectifs de la finance immobilière. Donc aller vers plus de densité urbaine les intéresse ! A condition que les pouvoirs publics leur donnent plus de marge de manœuvre et d'incitations en matière de constructibilité, là où le droit de l'urbanisme tend au contraire à toujours plus de coercition", a conclu Lahlou Khelifi pour Stam Europe, un spécialiste de l'investissement immobilier.