Biodiversité - La trame verte et bleue, fil rouge du congrès annuel de France Nature Environnement
Les 12 et 13 mars, à l'occasion de son 33e congrès, la fédération France Nature Environnement (FNE) a réuni à Lille plus de 500 participants pour débattre du thème de la trame verte et bleue. Organisé avec l'appui de la région Nord-Pas-de-Calais, le congrès a fait la part belle aux tables-rondes d'experts, d'élus et d'acteurs associatifs. Localement ont été mis en avant le projet de la communauté urbaine de Lille - qui consiste à restaurer des milieux naturels tout en reliant les communes et en "accrochant la trame verte à l'imposant réseau de canaux" - et celui qui vise à doubler d'ici 2010 la surface des réserves naturelles de la région.
Avant tout, la question du pourquoi de la trame verte a été soulevée. "Parce que les communautés animales et végétales sont très affectées par la perturbation, la fragmentation des habitats", a répondu Denis Couvet, professeur d'écologie au Muséum et à l'Ecole polytechnique. "L'idée, justement, consiste à relier les espaces naturels par des corridors biologiques afin de renforcer l'échange entre les espèces végétales et animales", a ajouté Jacqueline Istas, à la tête de l'association Nord Nature Environnement.
Entérinée par le Grenelle de l'environnement, cette priorité de restauration de continuités territoriales doit encore simposer comme un outil d'aménagement du territoire, et donc se conjuguer avec d'autres outils et schémas préexistants. Par exemple avec la logique propre aux espaces protégés, même si Denis Couvet n'a pas manqué de souligner leurs différences. En effet, alors que la seconde se traduit par des mesures d'urgence de sauvegarde d'espèces menacées, la logique de trame verte "doit se préoccuper du devenir de l'ensemble de la biodiversité". De même, sa conception ne peut se faire sans réfléchir à l'aménagement forestier, aux infrastructures de transports et au schéma national en cours d'élaboration ou encore à "l'intégration de la trame dans un projet de territoire", comme l'a résumé Philippe Girardin, président du parc naturel régional (PNR) des Ballons des Vosges.
De fait, c'est bien d'une stratégie collective de préservation qu'il s'agit. Elle implique les collectivités en vue de "contribuer, par une approche nationale, au renforcement de 'zones noyaux' décrétées d'intérêt national pour la trame verte et bleue, ainsi que des zones de connectivité écologique nécessaires entre ces zones noyaux", a indiqué Colin Niel, de la direction de l'eau et de la biodiversité du ministère de l'Ecologie, de l'Energie, du Développement durable et de l'Aménagement du territoire (Meeddat). Mais pour ce faire, plus de mutualisation des efforts et des moyens est nécessaire. A l'échelle transalpine par exemple, "la constitution d'un réseau écologique peut être implémentée uniquement s'il y a une collaboration étroite entre les différents secteurs et pays", a éclairé Yann Kohler, du laboratoire Territoires de l'université Joseph-Fourier. "C'est sur cette base contractuelle et dans un cadre cohérent garanti par l'Etat qu'une trame verte doit être localement pilotée en concertation avec les collectivités et les acteurs de terrain", a renchéri Christian Barthod, sous-directeur des espaces naturels au Meeddat. Dans ce sens, le groupe de travail sur la contractualisation qui s'est constitué sous le pilotage de la fédération des parcs naturels régionaux doit formuler des propositions dès l'été.
Reste la question des moyens financiers, sur laquelle plane le plus de doutes. En effet, les bases socio-économiques de la trame verte font débat et feront l'objet de propositions attendues d'ici le mois de juillet. Sans rassurer pour autant tous les esprits, Chantal Jouanno, secrétaire d'Etat à l'Ecologie, a annoncé qu'un poste de chargé du suivi de cette trame devrait être créé d'ici là au Meeddat. Avec le ministre de l'Ecologie, Jean-Louis Borloo, qui est également intervenu lors du congrès, ils appellent à la formation d'une agence internationale pour la biodiversité.
Prochaine étape importante à suivre : l'élaborationd'ici fin 2012 par l'Etat, les régions et les départements, intercommunalités, parcs nationaux et/ou associations, des schémas régionaux de cohérence écologique (SRCE).
Morgan Boëdec / Victoires-Editions