La Stratégie française Energie-Climat en consultation
C’est la dernière ligne droite. La "Stratégie française pour l'énergie et le climat" (SFEC) est soumise à la consultation publique, jusqu'au 15 décembre prochain. Y sont présentées les principales orientations de la politique énergétique du pays déjà dévoilées dans leurs grandes lignes par Emmanuel Macron dans son discours de Belfort, de février 2022, et récemment en conclusion d'un conseil de la planification écologique (voir notre article du 26 septembre 2023). Ce document d’une centaine de pages, qui prend appui sur les travaux du Secrétariat général à la planification écologique (SGPE), s’est nourri d’une première phase de consultation citoyenne (d’octobre 2022 à février 2023) et des conclusions des groupes de travail réunissant parlementaires, élus locaux, experts, associations et représentants des différentes filières (voir notre article).
Les objectifs qui en découlent seront formalisés au sein de la future loi de production énergétique - désormais attendue début 2024 - et se déclineront "dans les prochains mois" dans deux décrets - l’un sur la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) pour les périodes 2024-2028 et 2029-2033, l’autre sur la stratégie nationale Bas Carbone à horizon 2030 - et un document programmatique, le Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC).
Le bouquet énergétique de la France reste encore dominé par les énergies fossiles, avec 37% de pétrole et 21% de gaz dans la consommation d’énergie finale. Relever le défi de sortir des énergies fossiles va donc nécessiter à la fois de réduire la consommation d’énergie en 2050 de 40 à 50% par rapport à 2021 (-30% en 2030 par rapport à 2012), grâce à la sobriété, et aux leviers d’efficacité énergétique dans le bâtiment ou les transports, mais également de produire davantage d’énergie décarbonée. L’objectif est d’augmenter de 10% d’ici à 2030 - et 55% en 2050 - la production d’électricité, à partir du nucléaire et des énergies renouvelables, et de doubler la production de chaleur bas-carbone d’ici à 2035 (par rapport à 2021).
Sur le nucléaire, une hypothèse conservatrice de 360 TWh de production est retenue. Tous les réacteurs "seront maintenus en exploitation" (au-delà de 50 ans) "tant que les exigences de sûreté seront strictement respectées". La construction de six nouveaux réacteurs (EPR2) avec une mise en service entre 2035 et 2042 est également confirmée. Une décision devrait intervenir fin 2026 en vue de la réalisation de 8 EPR2 supplémentaires. Et au moins un prototype de petit réacteur innovant (SMR) devrait en outre être lancé en 2030.
Ce scénario central passe aussi par la "massification" de la production de toutes les énergies renouvelables. Il s’agit de "doubler notre rythme de déploiement du photovoltaïque" (pour atteindre plus de 75 GW en 2035), du biogaz (multiplié par 5 pour atteindre 50TWH d’ici 2030) et des réseaux de chaleur d’ici 2030 (au-delà du triplement de leur capacité) ou encore "de quadrupler le rythme de déploiement de la géothermie". Des objectifs pour certains (chaleur renouvelable et biogaz) étroitement liés à la disponibilité suffisante de biomasse. Une "modération" de la demande s’avère par conséquent nécessaire (hiérarchisation des usages), ainsi qu'un renforcement de la gouvernance locale.
L’effort d’accélération portera également sur l’éolien en mer "à hauteur de 18 GW en 2035" (soit 36 parcs comme ceux de Saint-Nazaire et Saint-Brieuc). Quant au développement de l’éolien terrestre, que le chef de l’Etat, souhaitait ralentir, il conserverait finalement son rythme de 2022, en veillant à "une répartition équilibrée" et en investissant dans "le repowering" (c’est-à-dire le renouvellement d’anciennes éoliennes par de nouvelles plus efficaces).
De bref développements sont consacrés à la mise en œuvre d’une véritable planification territoriale des énergies renouvelables, qui "donne la main aux élus locaux", et dont la loi d’accélération de la production d’énergies renouvelables s’est notamment saisie. La PPE sera, pour la première fois, déclinée au niveau régional. La territorialisation des nouveaux objectifs nationaux de développement des énergies renouvelables constituera donc un chantier prioritaire.