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Eau - La qualité de l'eau potable passée au crible

Près de deux millions de personnes en France reçoivent une eau non conforme aux réglementations car trop polluée, selon l'association de consommateurs UFC-Que Choisir, qui a présenté le 20 mars la synthèse d'une grande enquête sur la qualité de l'eau sur le territoire métropolitain. Celle-ci met une nouvelle fois en cause l'agriculture, jugée responsable de près de 70% des pollutions.

L’association de consommateurs UFC-Que Choisir a publié ce 20 mars une synthèse sur la qualité de l’eau des 36.568 communes du territoire métropolitain au regard de six pollutions préoccupantes en termes sanitaires et environnementaux (pesticides, nitrates, sélénium, qualité bactériologique, aluminium, radioactivité) parmi la cinquantaine de critères réglementaires existants. L’enquête a été réalisée sur une période de deux ans à partir de l’interprétation des données officielles publiées par le ministère de la Santé. L'association met par ailleurs à la disposition des consommateurs, sur son site, les résultats de la qualité de l’eau du robinet commune par commune. Au titre de chaque critère, l’étude retient un seuil de 25% d’analyses supérieures à la norme pour qualifier une eau de "non conforme". Premier constat : 97,5% des Français ont accès tout au long de l’année à une eau de bonne qualité, mais près de deux millions consomment une eau non conforme aux critères règlementaires.

Dégâts de l’agriculture intensive

Principales responsables, les pratiques agricoles sont à l’origine de près de 70% des pollutions de l’eau (pesticides, nitrates, sélénium). Les départements les plus touchés se retrouvent ainsi dans les zones où l’agriculture est la plus intensive : Bassin parisien (Eure-et-Loir, Loiret, Seine-et-Marne, Yonne), le Nord et la Champagne (Pas-de-Calais, Marne, Aube). La trop forte pollution en nitrates représente la principale cause de fermeture des captages. Les mesures palliatives (dilution, dénitratation, abandon des captages, etc.), utilisées en particulier en Bretagne, agissent comme "trompe-l’oeil" mais n’attaquent pas la pollution à la source, déplore l’UFC-Que Choisir. Par ailleurs, compte tenu des incertitudes sur la toxicité du sélénium, indicateur d’une trop forte utilisation des nappes phréatiques, l’association a décidé de saisir l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) afin qu’elle définisse le niveau de précautions à mettre en oeuvre.

Les zones rurales plus exposées

Si la qualité de l’eau relevée dans les grandes villes est globalement bonne, les petites communes sont moins bien loties. En cause, l’insuffisante fréquence des contrôles pour assurer un réel suivi de la qualité sanitaire de l’eau distribuée. Pour les pollutions dues au défaut de traitement de l’eau (un tiers des pollutions), les communes concernées sont de taille encore plus petite (350 habitants en moyenne) que pour les autres critères de pollution examinés. La qualité bactériologique est en cause pour 276.000 habitants répartis sur 1.089 communes. Les dépassements de la dose maximale d’aluminium concernent quant à eux 157.000 personnes. A la marge, la radioactivité n’est à l’origine que de 4% des pollutions, essentiellement dans les régions au sous-sol granitique.

Coûts élevés de la dépollution

Bien que l’agriculture soit principalement à l’origine de ces pollutions, ce sont les consommateurs qui contribuent à hauteur de 90%, via la redevance pollution, au budget des agences de l’eau. Le commissariat général au Développement durable estime ainsi que les pollutions agricoles génèrent sur la facture d’eau des dépenses supplémentaires annuelles comprises entre 640 et 1.140 millions d’euros, soit de 7% à 12% de la facture d’eau des ménages français, rappelle l'UFC-Que Choisir. Les budgets des agences de l’eau sont en outre majoritairement affectés à la dépollution des eaux, sans réelle visée préventive. Pour l'association de consommateurs, la politique de prévention doit nécessairement passer par une protection efficace de tous les captages, une application du principe constitutionnel "pollueur-payeur" ou encore des aides de la politique agricole commune réservées aux modes de production inspirés des agricultures intégrée et biologique.