Environnement - La présence d'OGM n'est pas considérée comme un trouble anormal du voisinage
Pour la première fois, un tribunal a eu à statuer le 12 juillet 2007 sur une demande d'interdiction de culture des OGM fondée sur la théorie du trouble anormal du voisinage. En l'espèce, il s'agissait pour des apiculteurs d'invoquer le trouble manifestement illicite résultant du pollen contaminé par les cultures de maïs transgéniques, en l'occurrence le MON810, situées sur la commune de Grezet (Lot-et-Garonne).
Pour les requérants qui avaient démontré la contamination des lots de pollen lors d'une expérimentation menée en juillet 2006, cette source de pollution constituait une gêne directe, actuelle, excessive et persistante à laquelle il convenait de mettre un terme en demandant la destruction des cultures ou leur castration avant la floraison prévue dans la seconde quinzaine du mois de juillet sous astreinte de 500 euros par jour d'inexécution. La pollinisation étant devenue effective entre la date du premier référé du 24 mai 2007 et la procédure actuelle, la question de l'urgence à intervenir prenait tout son sens.
Or pour la cour d'appel d'Agen, saisie de l'affaire, l'exploitant des parcelles de maïs dispose bien de toutes les autorisations nécessaires et il est établi que les ruches des requérants ont été sciemment placées à proximité de la parcelle litigieuse à la période de l'année où le maïs constitue l'une des principales ressources de pollen. Simple consolation pour les requérants : la condamnation qui, de surcroît, les frappe au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, est ramenée de 5.000 à 1.000 euros.
Cette décision, qui confirme donc la première ordonnance de référé, est particulièrement sévère et doit s'apprécier au regard d'un jugement du tribunal d'Augsbourg ( Allemagne) qui, le 4 mai 2007, a estimé intolérable de mettre à la charge de l'apiculteur l'obligation de déplacer ses abeilles dans des zones suffisamment éloignées des cultures d'OGM, pour éviter la contamination du pollen. Elle reste en tout cas conforme à la position française dans la mesure où la Commission du génie biomoléculaire n'a pas remis en question ce type de maïs autorisé depuis 1998 bien qu'une nouvelle évaluation sanitaire ait été demandée le 24 mai dernier par les ministres de l'Ecologie et de l'Agriculture. De leur côté, les collectivités, qui se sont déjà à de multiples reprises illustrées dans le souci d'appliquer le principe de précaution par le biais d'arrêtés "anti-OGM", continueront certainement à se mobiliser grâce au devoir d'information qui pèse sur les producteurs depuis la publication des décrets du 19 mars 2007, notamment celui portant sur la dissémination volontaire d'OGM.
Dans un communiqué en date du 13 juillet 2007, l'Association des régions de France (ARF) accuse le gouvernement, à la veille de l'ouverture du Grenelle de l'environnement, de vouloir "banaliser la culture d'OGM en France" en publiant sur le site gouvernemental www.ogm.gouv.fr la localisation et l'étendue des cultures de maïs MON810 pour la campagne 2007. "Ces 20.000 hectares de maïs OGM, imposés en force, sans la moindre consultation, font un sort à l'ambition de Grenelle", estime l'ARF qui rappelle que les régions françaises sont pour leur plus grand nombre signataires de la charte de Florence demandant l'interdiction de la culture d'OGM en plein champ.
Xavier Sidaner / Victoires-Editions, avec Anne Lenormand
Références : cour d'appel, Agen, 12 juillet 2007, Syndicat confédération paysanne, 07-00842. Décret 2007-358 du 19 mars 2007 relatif à la dissémination volontaire à toute autre fin que la mise sur le marché de produits composés en tout ou partie d'organismes génétiquement modifiés (JO du 20 mars 2007, p. 5095). Décret 2007-359 du 19 mars 2007 relatif à la procédure d'autorisation de mise sur le marché de produits non destinés à l'alimentation composés en tout ou partie d'organismes génétiquement modifiés (JO du 20 mars 2007, p. 5100).