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Financement local - La nouvelle banque publique des collectivités monte en régime

La commission des finances de l'Assemblée nationale a fait le point, le 12 juin, sur l'accès au crédit des collectivités locales. Point positif, "dans l'ensemble, il n'y a pas de problème de financement" pour 2013, notamment du fait de la création par les pouvoirs publics d'une nouvelle banque dédiée aux collectivités. La structure, qui a hérité des prêts de Dexia, doit toutefois commencer par déminer le dossier des emprunts toxiques.

Les collectivités locales ne devraient pas connaître de difficultés de financement en 2013, alors que ce fut le cas en 2011 et 2012. "On a peu de remontées de collectivités qui se trouvent en panne", a indiqué Gilles Carrez, président UMP de la commission des finances de l'Assemblée, lors d'une réunion de la commission, le 12 juin. "Il y a quelques exceptions", a nuancé la socialiste Valérie Rabault. "Des financements ont été refusés sur certains projets pour des raisons mystérieuses", a-t-elle précisé, en reconnaissant cependant que "dans l'ensemble, il n'y a pas de problème de financement", autrement dit d'accès au crédit.
Estimé à "20 milliards d'euros" par an, le besoin de financement des collectivités locales va être, cette année, "quasiment surfinancé" a estimé, de son côté, Philippe Wahl, président du directoire de la Banque Postale, qui était auditionné par les députés. Les banques (hors Banque Postale et Caisse des Dépôts) devraient financer des prêts pour un montant de 9 milliards d'euros, la Banque européenne d'investissement également, pour 2 milliards, et la Caisse des Dépôts pour 4 milliards (dans le cadre de l'enveloppe de 20 milliards de prêts à long terme sur fonds d'épargne fléchés sur des projets structurants), a-t-il détaillé. 2 autres milliards d'euros de prêts proviendraient des émissions obligataires lancées par les grandes collectivités. Enfin, la Banque Postale apporterait 3 milliards d'euros, un montant que l'opérateur est prêt à dépasser si nécessaire, a-t-il ajouté. En précisant que l'objectif de la Banque Postale est, "en régime de croisière", de parvenir à financer les prêts aux collectivités à hauteur de 5 milliards d'euros par an.

"Désensibilisation" des prêts toxiques

Depuis début 2013, la Banque Postale a "produit" 600 millions d'euros de crédits à moyen et long terme pour les collectivités, a encore détaillé le dirigeant de l'établissement. Lequel a annoncé la poursuite du développement de ses activités dans le secteur public local : "A la fin du mois de juin, nous lancerons de nouveaux produits pour avoir la gamme totale pour l'ensemble des collectivités locales".
Auditionné au cours de la même réunion, Philippe Mills, PDG de la Société de financement local (Sfil), c'est-à-dire la nouvelle banque des collectivités locales créée en janvier dernier pour financer les collectivités dans le sillage du démantèlement de Dexia, a longuement abordé le dossier des emprunts structurés.
Dexia municipal agency (DMA), devenue en janvier dernier la Caisse française de financement local (Cafil), structure détenue à 100% par la Sfil, a un encours de prêts structurés de 15 milliards d'euros sur un total de 65,8 milliards d'euros de prêts. Les prêts structurés "sensibles" qu'elle détient représentent 8,3 milliards d'euros et sont répartis entre 874 entités.
Le conseil d'administration de la Sfil a adopté le 28 février dernier une stratégie pour parvenir à réduire de manière définitive le risque lié à ces prêts. L'opération, qui prendra plusieurs années, consistera à transformer les crédits toxiques en prêts à taux fixe.
A cette fin, la Sfil réservera chaque année une enveloppe de 1 milliard d'euros de prêts pour les collectivités qui souhaiteront renégocier leurs prêts sensibles. Elle ouvrira avec chacune une négociation. Il s'agira de déterminer, d'abord la part que le client souhaite utiliser pour le financement de l'indemnité liée à la transformation des prêts à risque en prêts à taux fixe, et ensuite le montant des financements nouveaux. En sachant que les nouveaux prêts "sont proposés aux meilleures conditions de marché", a indiqué l'ancien directeur général de l'Agence France Trésor. "Mais la marge qui est réalisée sur les prêts à financement nouveau est reprise pour diminuer le montant de l'indemnité que doit refinancer la collectivité. Donc le total est fait à prix coûtant", a-t-il précisé.

124 collectivités ont assigné la Sfil en justice

Par ailleurs, les petites collectivités qui détiennent les prêts les plus compliqués peuvent bénéficier d'offres aux "taux limités". La Sfil a prévu pour cela une provision de 17 millions d'euros dans son budget 2013. "Au total, la politique de désensibilisation ainsi proposée coûte 17 millions d'euros en 2013 à la Sfil et à la Cafil", a conclu Philippe Mills.
Depuis que ces offres sont proposées, c'est-à-dire depuis fin mars 2013, elles ont été approuvées par 15 collectivités (pour environ 100 millions d'euros de prêts sensibles). "Les négociations sont bien avancées avec 25 autres clients pour 250 millions d'euros et nous avons fait des propositions précises à 185 autres clients pour 2,3 milliards d'euros", a précisé le PDG de la Sfil.
"La stratégie a un accueil plutôt positif", en a-t-il déduit, en reconnaissant aussi que certaines collectivités ne sont pas prêtes à négocier. 124 d'entre elles - ayant un encours toxique total d'1,5 milliard d'euros souscrit auprès de Dexia - ont ainsi assigné en justice la Sfil. Elles n'étaient que 90 il y a seulement trois semaines. Au-delà du 17 juin prochain, les collectivités ayant souscrit des emprunts structurés perdront, en effet, la possibilité de saisir la justice, compte tenu des délais de prescription. Les collectivités ayant assigné la Sfil ont été encouragées à le faire notamment après la décision du tribunal de grande instance de Nanterre du 8 février dernier, qui a donné raison au conseil général de la Seine-Saint-Denis face à Dexia. Conséquence de cette décision, le taux légal en vigueur, actuellement de 0,04%, est désormais appliqué aux trois prêts du département. Des conditions très avantageuses dont les autres collectivités voudraient bénéficier.

Financements de long terme : accord entre la CDC et la BEI
La Caisse des Dépôts et la Banque européenne d'investissement (BEI) ont signé, ce 12 juin, un accord de partenariat destiné à soutenir l'activité et la croissance en France, ont-elles annoncé dans un communiqué commun. Concrètement, cette coopération permettra de "mettre en avant la complémentarité des produits des deux institutions, dans une logique de 'guichet unique' au profit du financement du secteur public local" et, plus précisément, des projets d'investissement d'intérêt public de long terme. La BEI soutient déjà des secteurs clefs du domaine collectif tels que les universités, les hôpitaux, l'efficacité énergétique au sein des bâtiments, les transports ou le haut débit... Ce qui correspond effectivement aux thématiques que la Caisse des Dépôts doit financer dans le cadre de l'enveloppe de 20 milliards sur fonds d'épargne. Les enveloppes Caisse des Dépôts et BEI doivent donc pouvoir s'additionner. "Cet accord confirme le rôle stratégique du groupe Caisse des Dépôts dans le financement des projets qui contribuent à la compétitivité de nos territoires", s'est réjoui Jean-Pierre Jouyet, le directeur général de la Caisse des Dépôts.