Dématérialisation - La DGFIP à la manoeuvre sur la dématérialisation et les moyens de paiement
La Direction générale des finances publiques (DGFIP) vient de publier son rapport annuel. L'occasion de faire le bilan des actions réalisées en 2012 auprès des collectivités territoriales et des établissements publics en matière de fiabilisation des comptes et de dématérialisation, ainsi que sur le déploiement des nouveaux moyens automatisés de paiement.
La DGFIP est un partenaire clé de la chaîne budgétaire, comptable et financière des collectivités territoriales. Elle produit les comptes de près de 170.000 collectivités et établissements publics et en assure l'exécution budgétaire. Ainsi, 281 milliards d'euros de dépenses des ordonnateurs locaux (maires, présidents de conseils généraux et régionaux, présidents d'offices HLM, directeurs d'hôpitaux) ont été payés par la DGFIP en 2012, contre 223,6 milliards en 2011.
La charge dans son ensemble mobilise 2.700 comptables et représente des flux d'échanges massifs encore assez largement sur support papier ou sur disquette (justificatifs). Aussi l'Etat, en partenariat avec les collectivités, poursuit-il depuis près d'une décennie la modernisation, la simplification et l'optimisation de l'ensemble des procédures.
L'année 2012 a été marquée par la publication, le 7 novembre, du décret consacrant la rénovation du cadre juridique pour la gestion budgétaire et comptable. Si ce décret ne change rien aux relations fondamentales entre l'ordonnateur et le comptable, il introduit des possibilités supplémentaires d'allègement de contrôle des dépenses dans le cadre d'un partenariat (article 42), d’élargissement de la palette des moyens de paiement (article 25), de dématérialisation des pièces comptables et justificatives échangées (article 51) et de fiabilisation des comptes.
Une boîte à outils sur la fiabilité des comptes
Quelques avancées ont été enregistrées, notamment en matière de fiabilisation des comptes publics locaux. La DGFIP a entrepris une série de chantiers pour proposer aux ordonnateurs une production des comptes publics "dans des délais les plus courts possibles" et dans le souci de répondre à un "haut niveau de qualité", rappelle Nathalie Deshayes, directrice adjointe des finances publiques de la région Rhône-Alpes, l'un des témoins cités dans le rapport. Les améliorations de performance ont notamment porté sur l'enrichissement de l'outil informatique (Hélios), sur l'approfondissement du contrôle interne et sur la mise en place des conventions de partenariats avec les ordonnateurs du secteur public local. L'information a aussi été privilégiée. Une boîte à outils partagée, élaborée par le comité national relatif à la fiabilité des comptes publics locaux (1), et mise en ligne en juin 2012 propose des fiches techniques et des guides méthodologiques.
Toujours dans la sphère de l'information, mais cette fois à destination des gestionnaires et des décideurs, la DGFIP a ouvert l'accès en ligne du tableau de bord Hélios. Il permet de visualiser les données statistiques et d'obtenir en cours d'exercice budgétaire une vue d'ensemble de l'état des comptes de la collectivité (dépense, recette, comptabilité...). L'effort porte aussi sur l'information fiscale. Désormais, les collectivités reçoivent des informations plus détaillées et plus précoces.
Les collectivités en retard sur la dématérialisation des flux comptables ?
A côté de ces progrès, la finalisation de la dématérialisation des flux d'échanges reste le principal enjeu. Depuis 2004, la DGFIP, les collectivités territoriales et la Cour des comptes ont conçu, expérimenté et déployé un ensemble de normes et d'outils, le principal étant le protocle d'échange standard de l'application Hélios, communément appelé PES V2. Désormais stabilisé, ce référentiel définit les règles de transmission des flux comptables (recettes, dépenses, budget), de dématérialisation des pièces comptables (titres de recettes, mandats de dépenses et bordereaux récapitulatifs comportant leur signature électronique) et des pièces justificatives associées (factures, délibérations, états de paie à l'appui des mandats et des titres…). "L'année 2012 a été celle du lancement de l'utilisation à grande échelle de ces nouvelles potentialités technologiques", assure la DGFIP. L'enjeu est de taille puisque la dématérialisation permettra d'économiser à terme l'équivalent de 630 millions de feuilles A4 (3.000 tonnes de papier représentant 170 hectares de forêts). Les collectivités locales (57% du total) se répartissant, avec les hôpitaux (33%) et les offices HLM (10%), l'ensemble de cette production administrative. Si la phase d'industrialisation est engagée, le déploiement en revanche ne fait que commencer.
Selon nos informations, 350 collectivités territoriales auraient adopté le PES V2 fin 2012, dont seulement la moitié en flux intégral. Or la date butoir du 1er janvier 2015, pour la généralisation, suppose une forte anticipation afin de répartir le déploiement. L'adoption du PES repose en effet sur un travail de réingénierie que la collectivité doit effectuer en propre et en partenariat avec la DGFIP et l'éditeur du logiciel financier utilisé. A l'issue d'une procédure de validation, l'adoption est officialisée par un formulaire d'adhésion au PES.
Les partenaires seront-ils en mesure de répondre aux objectifs dans les délais ? C'est peu probable. Mais en tout état de cause, la DGFIP a mis les bouchées doubles. En 2012 les directions régionales ou départementales ont élaboré des plans de déploiement de la dématérialisation. Des actions de réingénierie des procédures ont bien été engagées avec les collectivités (validation par les comptables et les ordonnateurs des comptes dématérialisés…), en relation avec les juridictions financières. Et pour parachever l'ensemble, la transmission dématérialisée des documents budgétaires a été expérimentée avec la Direction générale des collectivités locales (budgets primitifs, décisions modificatives…).
Attention Sepa
La dématérialisation ne serait pas complète sans modernisation des moyens de paiement. L'arrêté du 24 décembre 2012 a élargi l'éventail des moyens de règlement des dépenses et des moyens d'encaissement des recettes "de manière à simplifier les démarches des usagers et à alléger les tâches comptables comme le prélèvement automatique des dépenses ou l'encaissement via internet…".
En complément, la DGFIP a accéléré le déploiement de Tipi, son dispositif de paiement par carte bancaire via internet, passé de 800 à 3.000 organismes locaux dans le courant de l'année, ainsi que celui de la carte achat.
Enfin, dernier sujet sensible, le passage au Sepa (Single european payment area) dans le cadre du marché unique des moyens de paiement en euros, dont la date butoir est fixée au 1er février 2014, entre désormais dans un cône de turbulences avant déploiement (2). La DGFIP participe à la préparation de la migration informatique des collectivités et des établissements publics locaux, nécessaire aux virements et aux prélèvements bancaires, et un kit d'information à destination des ordonnateurs locaux a été diffusé en décembre 2012 sur les adaptations informatiques à opérer.
L'administration avance, certes, mais dans le même temps les retards semblent se cumuler. Le tempo est peut-être à revoir. Dans tous les cas, avec la transition vers le PES V2 et la bascule Sepa, la fin 2013 et l'année 2014 s'annoncent chargées pour les ordonnateurs locaux.
Philippe Parmantier / EVS
PES V2, où en est-on ?
Le cadre technique de la dématérialisation a été conçu à partir de 2004 avec les représentants nationaux des élus locaux et des Chambres régionales des comptes.
Deux évolutions majeures ont été décidées :
- la suppression au 1er janvier 2012 des échanges sur disquettes et autres supports physiques des flux comptables transmis avec les protocoles antérieurs au PES V2 et les fichiers de virement et de prélèvement. Seule exception : les pièces justificatives dématérialisées sur support CD-Rom jusqu'à l'adoption du PES par l'organisme local,
- l'adoption du PES V2 au 1er janvier 2015 pour transmettre les flux comptables (recettes dépenses et budget), dématérialiser les pièces comptables et les pièces justificatives à l'appui des mandats et des titres.
Les outils mis à la disposition des collectivités locales par la DGFIP :
- le portail "gestion publique" pour consulter en ligne les données enregistrées par le comptable dans Hélios, transmettre et déposer des fichiers informatiques des opérations comptables destinées à Hélios, échanger dans les deux sens des données dématérialisées,
- un certificat gratuit pour signer les flux PES à transmettre (délivré après habilitation par le comptable et signature du contrat de service) ainsi que l'outil de signature proprement dit, intégré dans XéMéLios,
- XéMéLios, un progiciel qui permet de traiter et de visualiser les pièces comptables et justificatives dématérialisées.
Par ailleurs, la DGFIP poursuit la concertation nationale avec les éditeurs de logiciels des ordonnateurs pour qu'ils embarquent les fonctionnalités nécessaires à la dématérialisation. Une évolution réglementaire, théoriquement non facturée.
La dématérialisation intégrale de la chaîne comptable et financière est l'objectif ultime. Elle suppose l'acquisition par la collectivité, d'un système de gestion électronique des documents afin de dématérialiser les pièces entrantes en mairie et une mise en conformité du logiciel comptable et financier utilisé. Selon l'estimation donnée par Viroflay (Yvelines) - une des premières communes ayant dématérialisé intégralement son flux-, le gain de temps sur le traitement d'une facture (remise à plat des circuits d'enregistrement et de validation) est estimé à plus de 50% .
(1) Présidé par la DGFiP, ce comité est composé de représentants des associations nationales d’élus locaux (Association des maires de France, Assemblée des départements de France, Association des régions de France, Assemblée des communautés de France, Fédération des villes moyennes …), de représentants de la Direction générale des collectivités locales, de la Cour des comptes ainsi que d'experts proposés par ses membres, notamment l'Association finances gestion évaluation des collectivités locales (Afigese).
(2) Nota : pour se mettre en conformité avec la norme Sepa, les communes utilisant le protocole ROLMRE (description des rôles de facturation) pour les encaissements par prélèvement automatique (5.500 communes) devront utiliser un nouveau protocole s'inscrivant comme composante du PES V2 (ORMC). Conséquence, pour maintenir le même mode d'encaissement, les collectivités concernées devront, d'ici le 1er février 2014, soit déployer le PES V2, soit transmettre un fichier supplémentaire décrivant les prélèvements à opérer (TPGROUP). Dans ce dernier cas, le passage au PES V2 pourra être repoussé au 1er janvier 2015.