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Crise guyanaise - La collectivité territoriale de Guyane souhaite "éclaircir et sécuriser" les aides de l'Etat

La situation en Guyane sera au menu du Conseil des ministres, ce mercredi, alors que la situation reste tendue sur place. Le chef du gouvernement entend acter les décisions prises dans le cadre du plan d'urgence, dont une bonne part concernent directement la collectivité territoriale de Guyane. Son président, Rodolphe Alexandre, a écrit au Premier ministre pour lui demander "d'éclaircir et sécuriser" ces points.

"Il faut désormais graver dans le marbre ce qui a été longuement négocié et acté, faute de quoi tout ce travail risque d’être perdu", a affirmé le Premier ministre Bernard Cazeneuve, lundi 3 avril, à l’issue de la réunion interministérielle sur la situation en Guyane, alors que celle-ci demeure très tendue sur place.
Bernard Cazeneuve a appelé à "la poursuite du dialogue" et démenti l’idée selon laquelle "les négociations auraient échoué". La parole de l’Etat envers la Guyane est "officiellement engagée", a-t-il assuré, précisant que l’ensemble des 25 mesures du plan d’urgence d’un milliard d’euros seraient "actées sous l’autorité du président de la République", lors du Conseil des ministres, ce mercredi 5 avril.

"Statut particulier"

Cette réunion à laquelle participait une bonne partie du gouvernement - dont Ericka Bareigts (Outre-mer) et Matthias Fekl (Intérieur) de retour de leur mission sur place -, se tenait après l’ultimatum lancé par le collectif "Pou La Gwiyann dékolé" (Pour que la Guyane décolle) exigeant, dimanche, 2,5 milliards d'euros "tout de suite" pour le développement du territoire. Ce collectif, qui regroupe l'ensemble des mouvements protestataires, a rejeté en l'état le plan d'urgence et demandé "un statut particulier" pour la Guyane. "Je veux sur ce point faire une mise au point extrêmement précise", a martelé le Premier ministre précisant que "pas moins de onze accords" avaient pu être passés, "sur des sujets essentiels comme la sécurité, la justice, la pêche, les transports, le bâtiment, les travaux publics, le tourisme, les mines, le développement de l’agriculture, l’énergie, la situation des communautés amérindiennes et bushinengués, le foncier ou encore l’éducation routière". Le collectif s’en est défendu indiquant avoir signé des documents mais pas des accords… Ce qui a donné lieu à une mise au point entre ce collectif et les élus, notamment la collectivité territoriale de Guyane (CTG) qui, "forte de sa légitimité, entend jouer pleinement son rôle pour faire avancer le dossier". Le président de la CTG Rodolphe Alexandre a écrit au Premier ministre avec pour objectif "d’éclaircir et sécuriser les premiers engagements pris par l’Etat, et non une reprise en main exclusive des négociations engagées par le collectif", indique la collectivité, dans un communiqué du 3 avril.

50 millions d'euros pour le RSA

Nombre des mesures du plan gouvernemental concernent en effet directement la collectivité territoriale de Guyane. Ainsi, le gouvernement lui apportera une avance de trésorerie de 4,5 millions d’euros. Il transformera en subvention exceptionnelle un prêt de 53 millions d’euros dont elle bénéficie "afin de l’aider à régler ses dettes à l’égard des entreprises guyanaises". La collectivité recevra enfin une aide exceptionnelle de 50 millions d’euros pour couvrir ses dépenses de RSA. L’Etat propose d’accompagner la CTG à hauteur de 50 millions d’euros par an pendant cinq ans pour la construction de collèges et lycées, et de porter de 10 à 15 millions d’euros par an sa dotation aux communes pour construire des écoles. Ces efforts s’ajoutent aux montants alloués au contrat de plan et préfigurent le "plan de convergence" prévu par la récente loi relative à l’égalité réelle dans les outre-mer, a tenu à rappeler Bernard Cazeneuve. Plan qui comprendra pour sa part des "mesures de long terme".

Renfort des effectifs de sécurité

Le plan d’urgence vise par ailleurs à répondre à une des revendications fortes de Guyanais sur le terrain de l’insécurité, à travers un renforcement des effectifs : création d’un poste de coordonnateur des forces de sécurité, renfort de 50 gendarmes et policiers dès 2017, puis de 90 gendarmes supplémentaires en 2018, création d’un tribunal de grande instance et d’un centre pénitentiaire à Saint-Laurent du Maroni, création d’une cité judiciaire à Cayenne.
Le plan prévoit également d’allouer 85 millions d’euros aux centres hospitaliers de Cayenne et de l’ouest guyanais.
L’Etat propose d’apporter son concours à des infrastructures majeures (doublement du pont du Larivot, doublement de la RN1 et de la RN2…) et d’attribuer 3,5 et 5,5 millions d’aides aux agriculteurs et pêcheurs guyanais.
Le président de la CTG était monté au créneau la semaine dernière, à l’’occasion d’une conférence organisée par l’association des Régions de France, accusant le gouvernement de "surdité" (voir ci-contre notre article du 29 mars 2017). "C'est parce que la base spatiale est bloquée depuis une semaine que le gouvernement nous dépêche ses ministres", avait-il fustigé, lors d’une intervention transmise en direct depuis Cayenne.
Ce mardi, des milliers de Guyanais se dirigeaient vers le centre spatial de Kourou, pour affirmer leur détermination.