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Emploi - Insertion par l'activité économique : un nouveau conseil, un bilan décevant... et bientôt une réforme

Michel Sapin, ministre du Travail, et Benoît Hamon, ministre délégué en charge de l'économie sociale et solidaire, ont installé le 11 avril 2013 le nouveau Conseil national de l'insertion par l'activité économique (CNIAE). L'occasion de présenter le rapport que l'Igas et l'IGF viennent de consacrer au secteur. Un rapport qui critique le mode de financement du dispositif et qui remet en question son efficacité.

Michel Sapin, ministre du Travail, et Benoît Hamon, ministre délégué en charge de l'économie sociale et solidaire, ont installé le 11 avril le nouveau Conseil national de l'insertion par l'activité économique (CNIAE). L'instance renouvelée est présidée par Christiane Demontès, sénatrice du Rhône, pour une durée de trois ans. Placé auprès du Premier ministre, le conseil doit organiser la concertation entre les acteurs pour développer et consolider le secteur, jouer un rôle de conseil et de veille sur les politiques de l'emploi et de l'insertion des personnes durablement éloignées de l'emploi et représenter l'IAE dans les instances consacrées à la lutte contre l'exclusion et la pauvreté, et l'économie sociale.
A l'occasion de la séance plénière du 11 avril, le gouvernement a fait part de sa volonté de donner un nouveau souffle à la politique publique de l'IAE, un secteur dont l'action est "aujourd'hui essentielle dans la bataille pour l'emploi et la création d'activités durables au sein de l'économie sociale et solidaire", précise le communiqué des ministres. Un nouveau souffle qui se traduira par une réforme, dont les objectifs sont, nous dit-on, d'aller vers un financement plus simple, de favoriser la coopération de tous les financeurs pour mieux ajuster le parcours et l'accompagnement aux difficultés réelles des personnes et à la situation des de la demande d'emploi dans les territoires.
Christiane Demontès, la nouvelle présidente du conseil, va devoir organiser rapidement un travail de concertation et d'échanges pour aboutir à des recommandations permettant de dresser les grandes lignes de la réforme du secteur. Et le travail risque d'être important. Le rapport réalisé par l'Inspection générale des finances (IGF) et l'Inspection générale des affaires sociales (Igas), commandé par les ministres l'an dernier et dont les résultats ont été présentés le 11 avril, ne fait pas un état des lieux très positif du secteur.

Un mode de financement complexe, une efficacité limitée

D'après ce rapport, près de 120.000 salariés en insertion qui ont travaillé en 2010 dans une des structures de l'IAE (entreprises d'insertion-EI, ateliers et chantiers d'insertion-ACI, entreprises de travail temporaire d'insertion-ETTI ou associations intermédiaires-AI), mais "le mode de financement de l'IAE est complexe et se traduit par un empilement des interventions, mobilisant entre 1 et 1,3 milliard d'euros en 2011, auxquels s'ajoutent 247 millions d'euros", signale ainsi le rapport. L'Etat finance la moitié du secteur, les conseils généraux prennent en charge un quart et le reste est apporté par d'autres financeurs, que sont le fonds social européen (FSE), les conseils régionaux et les communes.
Autre constat négatif : il n'y a pas, de la part de l'Etat, de "stratégie déterminée" et "la gouvernance ne permet pas une coordination suffisante des financeurs." Le rapport signale ainsi que le pilotage est fondé sur une logique de reconduction de l'existant et que cette répartition des enveloppes ne prend pas suffisamment en compte les besoins des territoires. Enfin, l'efficacité du dispositif est elle-même remise en question : elle est "limitée", jugent l'Igas et l'IGF. Tout d'abord, le dispositif n'est pas centré sur les personnes les plus en difficulté et les résultats sont "très décevants" et "bien en deçà des objectifs en termes d'insertion professionnelle fixés". Les EI et les ACI sont les structures obtenant les moins bons résultats en termes de retour à l'emploi, détaille le document. Six mois après la sortie d'un ACI, les deux tiers des personnes sont au chômage et moins de 12% ont trouvé un emploi durable.

Généraliser l'aide au poste

A partir de ces constats, de nombreuses recommandations sont élaborées, en vue de la future réforme. Rejetant des scénarios de rupture, qui consisteraient soit à décentraliser la politique de l'IAE vers les conseils généraux ou régionaux, soit à fusionner les différentes catégories de structures, l'IGF et l'Igas propose un scénario d'amélioration de l'existant. Il s'agirait de généraliser l'aide au poste d'insertion pour le financement des quatre catégories de structure. "Cette aide se substituerait à tous les financements aujourd'hui versés par l'Etat, y compris les contrats aidés pour les ACI, détaille le rapport, cette aide au poste serait composée d'un montant socle et d'un montant modulé fondé sur trois critères également pondérés : le profil des personnes accueillies, les efforts d'insertion de la structure et les résultats en termes d'insertion." Le scénario avancé peut être déployé à moyens constants, d'après l'Igas et l'IGF ou via une enveloppe supplémentaire de crédits, estimée à 38 millions d'euros, dont 10 millions d'euros ont été votés dans le cadre des débats parlementaires sur le projet de loi de finances pour 2013. Autre préconisation : renforcer la dimension stratégique du pilotage du secteur par l'Etat. Un processus qui demanderait à "instaurer un nouveau mode de répartition de l'enveloppe nationale de crédits, pérenniser la bourse aux postes tout en apportant quelques ajustements, et redynamiser la procédure de conventionnement." Enfin, la mission préconise de favoriser l'accès des SIAE à d'autres financements que les subventions publiques, en utilisant notamment le mécénat d'entreprise et la finance solidaire.