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Île-de-France : la région verdit un peu plus son budget

"Un niveau historique d'investissements en faveur de l'environnement sera atteint en 2020", affirme la région Île-de-France qui cale ses dépenses vertes sur le rythme ambitieux de deux milliards d'euros par an. Focus sur les actions les plus emblématiques de son plan de mobilisation dévoilé le 30 octobre. Et sur les prochains plans et stratégies qui en découlent dès les prochaines semaines.

Valérie Pécresse, présidente de la région Île-de-France, a présenté ce 30 octobre son plan de "mobilisation pour la transformation écologique de l’Île-de-France". Qualité de l'air, dépenses en faveur de la protection des forêts, de la rénovation énergétique, du covoiturage ou de la conversion en agriculture biologique, ce plan chiffré à dix milliards pour les cinq ans à venir brasse des enjeux aussi bien environnementaux que socio-économiques et culturels, quand il s'agit par exemple de réduire les déplacements domicile-travail en accompagnant l'éclosion de tiers-lieux. Trois millions d'euros par an sont consacrés à ces espaces hybrides et collaboratifs - lieu de travail pour les uns, "autre maison" pour les autres". Trente ont reçu une subvention en octobre. 

Une goutte d'eau dans l'étendue des investissements mais parlante en matière de transversalité. Ce plan au croisement de plusieurs politiques régionales comporte ainsi des déclinaisons qu'il s'agira de "porter dans tous les territoires franciliens afin d'assurer l'effectivité et la concrétisation des engagements pris", souligne Jean-Philippe Dugoin-Clément, vice-président de la région Île-de-France en charge du développement durable. Il couronne une stratégie entamée il y a trois ans, et un virage déjà pris à travers divers "plans" comme celui visant à développer les énergies renouvelables (EnR) ou à gonfler le budget dévolu aux actions sur la pollution de l'air. 

Priorité à l'hydrogène et au biométhane

En 2020, le budget environnement "stricto sensu", détaille l'institution régionale, est de "122 millions d'euros en investissement et 23 millions d'euros en fonctionnement, soit un total de 145 millions d’euros" (+ 25 % par rapport à 2019). Les EnR en concentrent une grande part (46 millions d'euros). Ici, peu de nouveautés annoncées, les objectifs du plan énergie-climat sont réaffirmés (voir notre article du 8 juin 2018). A savoir "rattraper vingt ans de retard", surtout dans le solaire et la méthanisation, "négligés jusqu’en 2016". La région aimerait qu'en 2030, les EnR représentent 40% de la consommation francilienne et que le solaire atteigne 16% du total d'EnR. Elle s'apprête à voter en novembre une charte avec les acteurs de la filière pour améliorer la cohérence et l’interopérabilité des projets hydrogène menés sur son territoire. Un appel à manifestation d'intérêt (AMI) va être lancé pour faire un pont entre l’acquisition de véhicules et le développement de la production de cette énergie. Pour le biométhane, un plan d'accélération de la filière (25 unités de méthanisation tournent actuellement, surtout en Seine-et-Marne) est annoncé pur muscler la mise en réseau des acteurs, l'accompagnement technique des porteurs de projet et financer plus d'études, notamment dans le domaine de la microméthanisation.

En quête d'exemplarité

Dans le cadre de sa compétence de gestion des lycées, la région compte explorer "de nouveaux modes contractuels" afin d'accélérer leur rénovation énergétique, via des accords-cadres de marchés de partenariat déjà testés et dont devraient bénéficier une vingtaine d'établissements. L'exemplarité de la collectivité se joue par ailleurs à travers la transparence dans ses financements, et leur ouverture - d'où le lancement, en janvier prochain, d'un premier budget participatif doté de 500 millions d'euros de crédits à orienter d’ici 2024 dans des projets mis au vote. Comme l'a fait le Centre-Val de Loire, elle veut se doter de sa propre "Conférence des parties" ou COP. Elle poursuit aussi la voie du zéro papier : ses élus travailleront bientôt "uniquement sur leur PC ou tablette", "plus aucun rapport et document de séance ne sera imprimé". Autour des associations écologistes, un "conseil des acteurs" va être créé, ainsi qu'un portail open data de données environnementales (en février). 

Continuer d'expérimenter

Du côté des nouvelles mobilités, elle saisit la possibilité offerte par la LOM de subventionner les covoitureurs disposant d'un pass Navigo annuel et prolonge la mise en gratuité du covoiturage en cas de pic de pollution ou perturbation majeures, "grâce à une subvention de 4 euros par trajet". Qui dit mobilité électrique dit réseau de bornes de charge. La région va cartographier les points publics, créer un label dédié et appuiera au printemps 2020 les collectivités qui veulent "mettre à niveau leurs bornes existantes ou en installer de nouvelles". Elle soutient par ailleurs l'alternative fluviale (appui à Voies navigables de France) et teste des solutions pour mieux surveiller les particules ultrafines (étude) ou améliorer la qualité de l’air dans le métro (expérimentations). Des tests ont débuté dans des stations de métro et RER. Une troisième expérimentation de dépollution sera menée sur le RER C. 

Plus de parcs et de forêts

Au menu d'une séance du conseil régional figure en novembre la mise en place d’une stratégie biodiversité sur dix ans. Budget sur ce volet : 30 millions d'euros. Principal porteur : l'agence régionale de la biodiversité (ARB IDF), mais pas seulement : les parcs naturels régionaux sont aussi soutenus - "nous avons d'ailleurs repris la part de financement des départements de grande couronne dans ces PNR", glisse la région. Aux quatre parcs existants (18% de la surface francilienne) devrait s'ajouter un cinquième, au nord-est de la Seine-et-Marne, en terrain agricole. La région alloue par ailleurs 20 millions d'euros chaque année à l'Agence des espaces verts (AEV) qui gère les 15.000 ha dont elle est propriétaire. Alors que la forêt couvre près d'un quart du territoire, les investissements forestiers vont se poursuivre. À Noisy-le-Grand (Seine-Saint-Denis), 270 ha boisés viennent d'être acquis pour compléter un massif existant et mailler l’Est parisien d'une ceinture verte. Dans le Val-d'Oise, c'est une forêt de 1.350 hectares s’étirant sur sept communes qui suscite un suivi. Des dizaines d'autres projets d’espaces verts, dont plusieurs portés par des collectivités, sont par ailleurs aidés. Un label régional valorisant les arbres remarquables va voir le jour et la recherche dans le domaine des usages du bois et des matériaux biosourcés va s'intensifier. 

Des dents creuses jusqu'à l'alimentation

Autre plan dévoilé en novembre, celui consacré à la valorisation des friches urbaines. L'AMI lancé dans la foulée ciblera des projets qui "limitent l’expansion urbaine, favorisent le renouvellement de la ville sur elle-même, préservent des zones naturelles dans la nouvelle urbanisation projetée ou regagnent des espaces agricoles et naturels". Quant au pacte agricole 2018-2030, qui vise un triplement des surfaces cultivées en bio, il se poursuit dans un climat positif et d'auto-congratulation à l'heure où la région estime remporter la palme en 2018 et 2019 du nombre de conversions (13.400 hectares convertis) : "L’État s’est désengagé des aides directes à la conversion et au maintien, pour la première fois nous les avons donc cofinancées."

Pour introduire du bio dans les cantines, l'enveloppe spécifique atteint 3 millions d'euros (+20% par rapport à 2019). La collectivité prépare aussi son plan régional de l’alimentation (printemps 2020) et met en avant, dans le cadre du débat brûlant sur les zones d’épandage de phytosanitaires, le fait d'avoir abondé de 2 millions d'euros la dotation de la mesure agroenvironnementale (MAE) biodiversité afin d'"accompagner les agriculteurs dans les zones de tension liées à la mise en place de zones non traitées pour les surfaces qui ne seraient pas traitées" dans le cadre des chartes départementales (voir notre article du 17 octobre).

Déchets : le PRPGD bientôt acté

Outre son soutien plus dispersé à l'urbanisme transitoire, à l'écoconstruction et à la logistique urbaine, la région fait un focus sur un dispositif dont elle vante les mérites, le contrat d’aménagement régional, réservé aux communes de plus de 2.000 habitants, et le contrat rural pour celles de moins de 2.000 habitants : "Leur succès ne se dément pas depuis 2017, ils permettent de répondre rapidement aux besoins des communes à travers des financements d’équipements et d’espaces publics", tels que le soutien aux circulations douces, la rénovation énergétique du patrimoine communal ou les traitements paysagers que nécessitent l’enfouissement de réseaux. 

Côté déchets, outre son soutien à la création de plateformes de compostage de proximité, la région valorise ses efforts de réduction des dépôts sauvages et dit avoir appuyé pour plusieurs millions d'euros une soixantaine de communes et une vingtaine d'intercos : "Un effort maintenu à l'approche de l’approbation en novembre du plan régional de prévention et de gestion des déchets (PRPGD)." Elle organise d'ailleurs le 7 novembre une journée sur le sujet et appuie le développement d'outils utiles aux élus (appli de signalement avec l’ONF, etc). Une stratégie pour l’économie circulaire suivra au premier trimestre 2020.