Archives

Commande publique - "In house", coopération public-public, difficultés financières des titulaires : deux nouvelles fiches de la DAJ

La direction des affaires juridiques (DAJ) de Bercy a publié le 21 juin deux nouvelles fiches techniques à l'attention des acheteurs publics. Ces dernières viennent compléter et actualiser le recueil de recommandations de la DAJ et traitent des contrats conclus entre entités publiques ainsi que des entreprises en difficulté pendant l'exécution d'un marché public.

Fiche 1 : Les contrats entre personnes publiques exclus du champ d'application du droit de la commande publique

Deux types de contrats passés entre personnes publiques peuvent, s'ils remplissent les conditions, être dispensés des obligations de publicité et de mise en concurrence. Il s'agit des contrats de quasi-régie et de coopération public-public, consacrés par la jurisprudence européenne respectivement en 1999 et 2009, et cristallisés par les ordonnances Marchés publics et Concessions entrées en vigueur le 1er avril 2016.

Consécration de la quasi-régie

Cette fiche revient tout d'abord sur les trois conditions cumulatives qui permettent de qualifier une relation de quasi-régie. Le pouvoir ou l'entité adjudicateur doit tout d'abord exercer sur son co-contractant un contrôle similaire à celui exercé sur ses propres services. La DAJ précise à cet égard que si la détention du capital à 100% par le pouvoir adjudicateur ou la tutelle est un indice, ce n'est pas suffisant pour confirmer l'existence d'un contrôle analogue. C'est davantage un "lien de dépendance institutionnel très fort" qui aidera le juge à caractériser l'existence d'un tel contrôle, notamment lorsque le pouvoir adjudicateur désigne "plus de la moitié des membres de l'organe d'administration ou de direction de l'entreprise ou en nommant son dirigeant".
La structure contrôlée ne dispose alors d'aucune autonomie dans son fonctionnement et son activité. Le deuxième critère de la quasi-régie implique que "le cocontractant du pouvoir adjudicateur soit un opérateur" dédié "aux besoins de ce dernier". A ce titre, l'entité contrôlée doit exercer pour le compte du pouvoir adjudicateur la part essentielle de son activité, chiffrée à 80% par les nouveaux textes. Pour éclairer les collectivités dans le calcul du pourcentage d'activité, la fiche de la DAJ propose un exemple concret des modalités de ce calcul.

Capitaux privés : possible mais limité

Enfin, la troisième condition s'attache à la participation de capitaux privés au sein de l'entité contrôlée. Si cela était formellement interdit jusque-là, les ordonnances Marchés publics et Concessions procèdent à un assouplissement important. Il est toutefois strictement encadré de telle sorte que les participations de capitaux privés seront admises seulement si cela n'engendre aucune capacité de contrôle ou de blocage des décisions de l'entité et si l'actionnaire privé ne peut exercer une influence sur l'entité contrôlée. Une condition qui limite fortement la possibilité de présence de capitaux privés au sein de l'entité contrôlée puisqu'elle subordonne cette forme de participation à une obligation légale. A priori, rares sont les cas où la loi impose la présence d'actionnaires privés dans une structure.
L'Union nationale des services publics industriels et commerciaux (Unspic) devrait donc être rassurée (voir notre article du 21 avril 2016). Elle avait effectivement saisi le Conseil d'Etat en avril dernier, demandant l'annulation de l'article 16 de l'ordonnance Concessions, en ce qu'il permettait aux sociétés d'économie mixte (Sem) de relever du régime de la quasi-régie. La DAJ est claire sur ce point : aucune législation n'impose à ce jour le choix d'une Sem pour l'exercice d'une activité.

Coopération public-public

Reconnue par la jurisprudence européenne en 2009 et consacrée par la réforme (article 17 de l'ordonnance Marchés publics et article 18 de l'ordonnance Concessions), la coopération public-public permet à plusieurs pouvoirs adjudicateurs de collaborer afin de réaliser ensemble leurs objectifs en matière de services publics. Là encore, trois conditions doivent être satisfaites pour échapper aux obligations de publicité et de mise en concurrence : la coopération ne doit répondre qu'à des considérations d'intérêt général, ce qui proscrit tout intérêt commercial et donc toute rémunération autre que le remboursement de frais ; elle ne doit pas placer un opérateur privé dans une situation privilégiée ; les pouvoirs adjudicateurs doivent réaliser sur le marché concurrentiel moins de 20% des activités concernées par la coopération. La DAJ insiste sur l'exercice conjoint des prestations par les collectivités coopérant ensemble et qui ne doit en aucun cas consister en l'attribution unilatérale d'une tâche d'un pouvoir adjudicateur à un autre.

Trois exemples jurisprudentiels

Afin d'illustrer ses propos, Bercy fait mention de trois exemples jurisprudentiels européens, pour que les acheteurs discernent bien ce que peut et ce que ne peut pas être la coopération public-public. Dans une décision de 2013, il a notamment été jugé que "la condition tenant à l'exercice commun d'une mission de service public n'était pas davantage remplie par le contrat par lequel un groupement de communes avait transféré le nettoyage de locaux administratifs et scolaires à une commune membre de ce groupement".
En outre, les nouveaux textes apportent également un assouplissement, permettant que les pouvoirs adjudicateurs parties à une coopération public-public puissent être des organismes de droit public comportant une participation de capitaux privés. Les actionnaires privés ne doivent toutefois pas disposer de capacité de blocage ou de contrôle, ni retirer aucun avantage au titre de l'exécution des prestations. En cas de coopération avec de telles structures, la DAJ recommande la tenue d'une comptabilité analytique afin de permettre la transparence dans le remboursement des frais aux actionnaires privés et dans l'absence du versement de dividendes.

Les différentes formes de quasi-régie

La DAJ fournit une annexe, retraçant en schéma les six hypothèses de quasi-régie envisageables, prévues à l'article 17 de l'ordonnance Marchés publics et 16 de l'ordonnance Concessions. Il s'agit notamment de la quasi-régie simple ascendante, la quasi-régie descendante en cascade, la quasi-régie conjointe descendante ou encore la quasi-régie simple horizontale dite "entre sœurs".
A titre d'information, la DAJ précise que, bien qu'un tel montage n'ait encore jamais été vu, il serait possible d'envisager une coopération public-public dans laquelle l'un des pouvoirs adjudicateurs ferait réaliser les prestations au titre de cette coopération par une entité avec laquelle il se trouve en relation de quasi-régie.

Fiche 2 : Les entreprises en difficulté pendant l'exécution d'un marché public

Cette deuxième fiche de la DAJ revient quant à elle sur les difficultés financières que peuvent rencontrer les entreprises titulaires d'un marché en cours d'exécution ainsi que sur le comportement que l'acheteur doit adopter dans de telles situations. Les quatre procédures dans lesquelles une entreprise en difficulté peut être placée ont tout d'abord été rappelées et définies (procédure de sauvegarde ; redressement judiciaire ; liquidation judiciaire ; rétablissement professionnel). Bercy a ensuite indiqué les conséquences de la mise en œuvre de telles procédures pour la collectivité.
Il est tout d'abord rappelé qu'une clause qui prévoirait une résiliation systématique du contrat en cas d'ouverture d'une procédure serait nulle. Puis, procédure par procédure, la fiche détaille ce que peut ou doit faire l'acheteur. Pour exemple, en cas de procédure de sauvegarde, la collectivité peut demander au juge de prononcer la résiliation. Elle peut également demander à l'administrateur judiciaire s'il entend poursuivre le marché. En cas d'absence de réponse dans le délai d'un mois, le contrat pourra être résilié de plein droit.

L'Apasp

Référence : Fiche sur les contrats entre entités publiques ; Fiche sur les entreprises en difficulté pendant l'exécution d'un marché public.

 

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis