Hébergement : malgré les efforts sur le Logement d'abord, le recours aux nuitées hôtelières progresse toujours
C'est ce que constate le rapport de la commission de finances du Sénat - signé Philippe Dallier - sur les crédits du ministère de la Cohésion des territoires. Plus globalement, il constate que "l'hébergement d'urgence est soumis encore une fois à de fortes tensions".
Rapporteur spécial de la commission des finances sur les crédits du ministère de la Cohésion des territoires - Ville et Logement, Philippe Dallier, sénateur (LR) de Seine-Saint-Denis et spécialiste reconnu de ce secteur, se penche notamment sur le programme 177 "Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables". Dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances (PLF) pour 2020, il constate que "l'hébergement d'urgence est soumis encore une fois à de fortes tensions", nécessitant d'importantes ouvertures de crédits en cours d'année.
Un dérapage de 300 millions d'euros
Inscrits pour 1,891 milliard d'euros en loi de finances initiale (LFI) 2019, les crédits ouverts en gestion on atteint 1,940 milliard. Une somme néanmoins insuffisante, qui a nécessité l'ouverture de 178 millions d'euros supplémentaires en loi de finances rectificative (LFR), portant le total à 2,188 milliards d'euros, soit 297 millions d'euros de plus qu'en LFI. Cet écart s'explique principalement par la pérennisation de 6.000 places de renforts hivernaux (+41 millions d'euros), le renforcement des dispositifs hivernaux et caniculaires (+74 millions) et l'augmentation des mises à l'abri de personnes vulnérables (+44 millions). Cette ouverture de crédits en LFR 2019 est trois fois supérieure à celle effectuée en 2018 (+60,2 millions). Pour 2020, les crédits de paiement reviennent à 1,991 milliard d'euros, soit +5,3% par rapport à la LFI 2019.
Sans paraître très convaincu, le rapporteur "prend acte" des explications de la direction générale de la cohésion sociale (DGCS), indiquant que la majorité des ouvertures de crédits demandées en loi de finances rectificative sont des dépenses non récurrentes et n'ont donc pas vocation à être reprises en base en 2020. Toutefois, un partie du dérapage constaté en 2019 provient de la hausse de nombre de demandeurs d'asile (+14,5% en novembre 2019) et les perspectives 2020 sont encore très incertaines sur ce point, la France étant "une destination majeure de second rebond pour les demandeurs d'asile entrés dans l'Union européenne".
Le développement "inéluctable" des nuitées hôtelières
Si le logement adapté progresse, il peine néanmoins à répondre à cette pression de la demande et à atteindre ses objectifs. Or le rapporteur spécial "souligne que les CHRS ne doivent être qu'une étape dans un parcours vers le logement : il n'est pas rassurant de constater que les objectifs, pourtant modestes, d'accession à un logement autonome pour les personnes sortant de CHRS ne sont pas atteints". L'atteinte des objectifs du plan 2018-2022 (création de 40.000 places en intermédiation locative et de 10.000 places en pension de famille) suppose donc "une accélération des résultats au cours des années 2020 à 2022".
En attendant, "le recours aux nuitées hôtelières continue de se développer de manière apparemment inéluctable". Alors qu'il était encore de 9.802 en 2007, le nombre de places financées en nuitées hôtelières approche les 50.000 en 2018 (48.733). La hausse est continue depuis dix ans, même si elle est un peu moins rapide que dans les années 2012-2015. Le rapporteur rappelle pourtant à nouveau que "le coût des nuitées est particulièrement élevé, alors même que c'est l'un des modes d'hébergement les moins adaptés, aussi bien en raison du manque d'accompagnement que de la localisation souvent inadaptée des hôtels". Le coût annuel d'une place en nuitées hôtelières est en effet de 6.977 euros, contre 6.409 euros en CHRS et 2.649 euros en hébergement d'urgence hors CHRS.