Territoires ruraux - Gestion des "communaux" : bientôt des solutions au cauchemar des maires
De nombreux maires ruraux, surtout dans les départements de montagne, sont confrontés à un véritable "casse-tête" en raison de l'existence sur le territoire de leur commune de "sections" dans lesquelles les habitants ont des droits particuliers hérités du Moyen-Age et dont ils jouissent collectivement. Plusieurs lois ont récemment assoupli les modalités de la gestion des biens de ces sections de communes, qui sont constitués essentiellement de forêts et pâturages (on les appelle souvent "les communaux"). Mais beaucoup reste à faire.
C'est pour pousser plus loin la simplification dans ce domaine que le Sénat pourrait adopter prochainement une proposition de loi. Son auteur, Pierre Jarlier, n'est pas le premier venu. L'association des maires du Cantal, dont il est le président, a créé il y a deux ans un groupe de travail, dont sont sorties des propositions très précises. Celles-ci ont ensuite été soumises localement à la concertation. Le sénateur-maire de Saint-Flour s'est appuyé sur ces travaux pour créer une "boîte à outils" à l'attention des maires dont le mandat est parfois "empoisonné" par la question des biens de sections. Interrogé par Localtis, l'élu a souligné que sa démarche est avant tout "pragmatique et concrète" : il s'agit de "renforcer la sécurité juridique des maires" et d'apporter "des solutions rapides aux difficultés quotidiennes qu'ils rencontrent". L'ambition du texte s'arrête là. "Ma proposition ne se situe pas dans une logique radicale", explique Pierre Jarlier. En clair, le texte ne programme pas l'extinction progressive du régime des biens de sections, encore moins leur suppression subite. Selon le sénateur, ces options "nécessiteraient une concertation approfondie", notamment avec les représentants des ayants droit.
Groupe de travail national
Surchargé, le calendrier parlementaire laissera-t-il une place à l'examen du texte ? Fort du soutien du président du groupe centriste du Sénat, Pierre Jarlier est confiant. Il affirme qu'une lecture en séance publique sera "sans doute proposée dans le cadre d'une fenêtre parlementaire réservée au groupe centriste".
L'élu a raison d'y croire, car un coup de pouce pourrait venir du gouvernement. Le cabinet du ministre chargé des collectivités territoriales, Philippe Richert, déclare "observer avec intérêt la proposition de loi". "Chercher des améliorations au dispositif des sections de commune tel qu'il existe aujourd'hui, c'est une bonne chose", poursuit l'entourage du ministre. Une réaction qui n'est guère surprenante. Sous l'égide du cabinet du ministre, un groupe de travail à vocation technique s'est réuni à plusieurs reprises en 2010 et 2011 afin de trouver des voies d'amélioration à la gestion des biens de section. Ses recommandations devaient servir à l'élaboration et au dépôt "fin 2010 ou début 2011" d'un projet de loi (lire notre article du 24 septembre 2010), qui finalement n'a pas vu le jour.
Entre les propositions du groupe de travail national et les mesures de Pierre Jarlier, il doit exister un certain nombre de convergences. Des points de divergence, il y en a en tout cas, car ils feront l'objet dès ce mois-ci de discussions "officieuses" entre la préfecture et les élus du Cantal. Le gouvernement attendra l'issue de ces discussions pour "se prononcer sur le fond" de la proposition de loi Jarlier, indique le cabinet de Philippe Richert.
Thomas Beurey / Projets publics
"Clarifier et assouplir la gestion des biens sectionaux"
La proposition de loi du sénateur Pierre Jarlier vise pour l'essentiel à :
- résoudre les litiges liés aux limites des sections de commune. Une commune pourra prendre l'initiative de la délimitation du territoire de la section.
- relever les conditions de création d'une commission syndicale afin de réserver cette instance aux sections de commune les plus importantes. Composée de représentants élus de la section, la commission syndicale participe à la gestion des biens de section avec le maire et le conseil municipal.
- limiter le nombre des litiges concernant l'attribution des biens de section - essentiellement les terres agricoles - aux agriculteurs, en rendant cette attribution plus équitable.
- assouplir et préciser les conditions du transfert des biens de la section à la commune de rattachement, ce que l'on appelle la "communalisation".
- permettre à la commune de disposer plus facilement d'un bien de section ou des ressources qu'il génère pour la réalisation d'un projet.
- autoriser sous certaines conditions le maire ou un conseiller municipal à exercer une action en justice pour la section de commune.
T.B.