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Aménagement numérique - Fusion Orange / Bouygues : l'Avicca s'inquiète pour la dynamique des RIP

Alors que la probabilité d'un rapprochement entre les opérateurs Orange et Bouygues est chaque jour un peu plus grande, l'Avicca exprime son inquiétude de voir la dynamique d'investissement sur les RIP brisée par une trop grande concentration. Son président, Patrick Chaize, en appelle à l'Etat et à l'Autorité de la concurrence pour s'assurer que 85% du territoire sera bien couvert par des déploiements très haut débit.

Le rapprochement entre Orange et Bouygues, qui pourrait aboutir dans les prochaines semaines, risque de pénaliser les réseaux d'initiative publique (RIP) selon l'Avicca. L'Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l'audiovisuel (Avicca), exprime, à travers la voix de son président Patrick Chaize, son inquiétude de voir la logique concurrentielle des RIP brisée par la fusion des deux opérateurs. Selon lui, "dans un paysage passé à quatre puis à trois [opérateurs]", "avec leur pouvoir de marché" et le "risque d'oligopole" que cela comporte, "on ne peut plus miser autant d'argent public et d'enjeux territoriaux sur un tel pari". Comme le rappelle un responsable de l'Avicca, "le démantèlement de Bouygues ne peut se faire sans une forme d'entente entre les opérateurs" et "les collectivités seront très fortement incitées à confier leurs marchés publics à SFR ou à Orange, sachant que Free n'investit pas du tout". Au vu de l'historique des pratiques d'entente entre des opérateurs plusieurs fois condamnés par l'Autorité de la concurrence, la situation apparaît dès lors potentiellement dommageable pour les collectivités et leurs RIP. Une crainte sur l'avenir à court et moyen termes des RIP qu'exprime également Etienne Dugas, président de la Firip (Fédération des industriels des réseaux d'initiative publique) pour qui la "concentration des acteurs télécoms qui se profile […] inquiète à juste titre l'ensemble des acteurs". "Le danger, c'est bien sûr que ces peurs retardent le lancement des projets."

Les opérateurs "ne jouent pas le jeu" des RIP

Si le conditionnel reste pour l'instant de mise lorsque l'on évoque ce rapprochement, Patrick Chaize s'interroge sur les conséquences et le bienfondé d'une concentration qui verrait "3 opérateurs gagnants, 85% du territoire perdant ?". En effet, comme il le rappelle, la moitié des 13 milliards d'euros de fonds publics investis au titre du Plan France Très Haut Débit sert à financer la venue des opérateurs sur les réseaux d'initiative publique afin qu'ils puissent les utiliser "au même coût que dans les zones rentables". Malgré les sommes investies, "les grands opérateurs ne jouent pas le jeu" et ne viennent que parcimonieusement sur les RIP. Critiquant leurs pratiques, le président de l'Avicca dénonce le fait que "ni Bouygues, ni Free ne sont venus co-investir ni même louer les réseaux publics FTTH", et reproche à Orange et SFR de n'être venus "co-investir quasi-exclusivement que sur les réseaux publics qu'ils exploitent". Une attitude qu'il résume ainsi : "au mieux les opérateurs majeurs mettent en balance leur venue sur ces réseaux pour capter des marchés publics de construction et d'exploitation", "au pire, ils pourraient jouer l'attrition pour ceux qu'ils perdent, en retardant leur venue sur ces réseaux, espérant ainsi racheter à bas prix les sociétés qui gagnent ces marchés".

Obliger les opérateurs à investir les RIP

Passé le temps du constat, Patrick Chaize demande à l'Etat et aux opérateurs de clarifier leurs intentions, alors que l'on "ne peut laisser une consolidation se faire au détriment des 43% de la population qui vit et travaille sur les territoires non "rentables"". Comme l'explique un responsable de l'Avicca, "nous lançons un appel aux opérateurs pour qu'ils prennent d'emblée des engagements volontaires vis-à-vis des RIP". De la même manière, pour lui, "le gouvernement, puisqu'il souhaite rester l'actionnaire de référence d'Orange, doit clarifier sa position vis-à-vis des territoires". Une des solutions proposées par Patrick Chaize serait que les opérateurs nationaux co-investissent "ab initio, en proportion de leurs parts de marché, sur tous les réseaux d'initiative publique, dès lors qu'ils respectent les conditions techniques et tarifaires réglementaires". Une idée qui fait écho aux propositions de la Firip, qui demande à ce que le "nouvel acteur Orange Bouygues qui va peser près de 50% des parts de marché devienne un client systématique des RIP". Par ailleurs, face à une certaine apathie des opérateurs dans les zones conventionnées (ex-Amii), Etienne Dugas y défend l'interventionnisme des collectivités. Tout en militant pour que la "mutualisation et la complémentarité entre les zones conventionnées et les zones RIP soient la seule règle".