Europe - FSE : vers une modification des objectifs après 2013 ?
Localtis : Dans quelle mesure les simplifications proposées pour la période 2009-2010 vont-elles améliorer l'accès au FSE ?
Pascale Gruny : On a de réelles avancées qui concernent notamment les Etats membres les plus touchés par la crise économique. Ils vont ainsi pouvoir bénéficier d'avances financières sur les paiements des projets éligibles. Ces pays ont moins de facilité à mettre en œuvre des politiques sociales car ils n'ont pas le budget nécessaire. Cette mesure va les aider. Autre mesure de simplification : moins de contrôles sur les grands projets environnementaux et plus de flexibilité sur les projets générateurs de recettes. Dans certains pays, il y a jusqu'à cinq niveaux de contrôle pour des sommes peu élevées. Les associations sont soumises aux mêmes contrôles que des projets qui engagent des millions d'euros ! Pour le moment, la mesure concerne uniquement les projets environnementaux mais il faudrait étendre ce principe aux autres projets. Enfin, il n'y aura pas de dégagement d'office sur les crédits européens qui n'auront pas été consommés. C'est une mesure importante, car cela fait mal quand des sommes non consommées repartent à la Commission européenne !
Dans les pays en manque de trésorerie, l'idée de financer 100% d'un projet avec du FSE sous forme d'avance est-elle encore à l'ordre du jour ?
Cette idée d'une dérogation sur le principe de cofinancement des dépenses a été refusée. On considère qu'il faut que l'Etat membre soit partie prenante dans le projet. S'il ne participe pas financièrement au projet, il n'aura pas la même implication. Le principe de cofinancement permet aussi une meilleure gestion et un meilleur contrôle de l'utilisation des fonds.
Les simplifications envisagées sont-elles suffisantes pour rendre le FSE plus accessible et plus efficace ?
C'est déjà bien d'avoir pu aboutir à ces résultats et j'espère que ça va permettre une accélération de l'utilisation du FSE. C'est un bon cheminement. Maintenant, notre groupe de travail va regarder comment on peut encore simplifier l'accès au FSE. Mais les freins ne viennent pas que de l'Europe. Il y en a dans chaque Etat membre.
La crise économique que l'Europe a traversée en 2008 et 2009 a-t-elle accéléré l'utilisation du FSE ?
La crise économique a fait exploser les taux de chômage dans les Etats membres et le FSE intervient sur cette problématique. En revanche, il est difficile de faire un lien entre la crise et le montage d'un projet. Il n'existe aucune étude au niveau européen à ce sujet. La crise n'a pas non plus amené à réadapter les programmes opérationnels des Etats membres. Avec la crise, c'est en termes de volume que les besoins ont évolué. Quant aux procédures, elles sont restées les mêmes. Il est vrai que tout est assez lent car on est nombreux, avec des attentes différentes, et l'administration est différente d'un pays à l'autre. Les simplifications envisagées devraient permettre quant à elles une mobilisation plus rapide des fonds.
Les débats autour de la réforme de la politique de cohésion après 2013 ont démarré. Quelles sont les pistes de réformes envisagées pour le FSE ?
Pour la prochaine programmation, je ne pense pas que les règles du jeu vont changer. L'idée par exemple que la France ne puisse plus être éligible à ce fonds n'est pas d'actualité. La France a aussi des besoins, avec des personnes très éloignées de l'emploi. En revanche, cela paraît logique qu'elle bénéficie de moins de fonds que d'autres Etats membres plus touchés par la crise sociale et économique. Plus généralement, nous souhaitons conserver le FSE qui est un des bons outils pour arriver à construire une Europe sociale et pour réduire les écarts entre les Etats membres. En revanche, le groupe de travail va préparer son avenir. Il va faire un constat sur les difficultés à consommer les fonds et sur les simplifications supplémentaires à apporter. Il va aussi analyser les objectifs fixés : en est-on satisfait ? doit-on garder ces objectifs ou les faire évoluer ? Le groupe proposera un projet sur ce sujet d'ici la fin de l'année 2010 que la Commission européenne discutera fin 2011.
Propos recueillis par Emilie Zapalski
Utiliser le FSE pour encourager les régions à ancitiper les mutations économiques
"Les régions ont un rôle très important à jouer en matière de mutations économiques, notamment pour les très petites entreprises." C'est ce que considère Fernando Vasquez, chef d'unité adjoint à la Direction générale Emploi, affaires sociales et égalité des chances de la Commission européenne, interrogé en marge du colloque "Dialogue social et restructurations face à la crise", organisé par Europe et Société, le 4 mai. "Si les grandes entreprises ont les moyens d'anticiper les changements, les petites ne savent pas comment s'y prendre et elles ne peuvent le faire qu'au niveau régional, avec l'aide d'acteurs locaux comme les collectivités territoriales", estime ainsi le responsable de la Commission européenne, qui va même plus loin, assurant qu'il faudrait encourager financièrement les régions européennes qui anticipent les restructurations économiques. Un soutien financier qui interviendrait dans le cadre des budgets accordés aux régions par le Fonds social européen (FSE). "On pourrait en effet penser à un dispositif dans lequel les régions qui ont une réelle démarche d'anticipation auraient un soutien privilégié de la part de l'Europe, détaille ainsi Fernando Vasquez. A l'inverse, on pourrait couper des fonds aux régions qui ne font pas d'anticipation." Des stratégies d'anticipation qui permettraient peut-être de mieux utiliser les fonds européens. Au cours de la crise économique que les pays européens ont traversée en 2008 et 2009, si le FSE a permis aux Etats membres de développer le chômage partiel, "il n'y a pas eu de capacité d'absorption de ces fonds en termes de formation ; ils ont souvent été utilisés comme garantie de revenu et non pour de la formation", explique encore Fernando Vasquez. Il estime qu'il faudrait se lancer dans une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GEPC) territoriale, "avec une structure réunissant les grandes entreprises, les universités, les centres de formation et les entités publiques, et capable de poser les bonnes questions : quel est notre avenir et comment le préparer ?".
E.Z.