Energie - Fortes inquiétudes de la filière éolienne sur une possible annulation des tarifs d'achat
Le Syndicat des énergies renouvelables (SER) s'est dit le 30 mars "très inquiet" de la possible annulation par le Conseil d'Etat, à la demande du collectif d'associations anti-éoliennes Vent de colère, du texte fixant les conditions d'achat en France de l'électricité d'origine éolienne. Une telle annulation, demandée par le rapporteur public lors d'une audience du 12 mars et suspendue à la décision des juges du Conseil d'Etat, constituerait un "coup de frein fatal" pour la filière et menacerait 9.000 de ses 10.000 emplois directs et indirects, s'est alarmé le président du SER, Jean-Louis Bal. "Les conséquences, on les voit déjà", a-t-il assuré. "La nouvelle [d'une possible annulation] est connue et notamment des banquiers qui constatent qu'il y a une insécurité juridique et ne veulent plus financer les nouveaux projets", a-t-il ajouté. "Si l'arrêté fixant les tarifs d'achat était cassé, la situation se prolongerait jusqu'à un nouvel arrêté, ce qui peut prendre plusieurs mois et veut dire qu'on serait pendant ce temps-là sans tarif d'achat", a-t-il expliqué.
Ces tarifs permettent aux producteurs d'électricité éolienne de revendre à EDF ou à d'autres opérateurs, à un prix fixé par un arrêté datant de 2008, le courant produit par leurs installations. Un précédent arrêté, datant de 2006, avait été annulé en 2008 par le Conseil d'Etat à la demande de la même fédération Vent de colère, qui regroupe quelque 800 associations opposées à l'énergie éolienne. Lors de l'audience du 12 mars, le rapporteur public, dont les avis sont souvent suivis par les juges du Conseil d'Etat, a évoqué l'absence de notification à la Commission européenne de ce tarif en tant qu'aide d'Etat, a rapporté le président du SER. Vent de colère a confirmé que le rapporteur public du Conseil d'Etat avait demandé l'annulation de l'arrêté, indiquant que la décision était généralement rendue trois à quatre semaines après l'audience, mais sans exclure un possible report en raison du contexte électoral. Les anti-éoliens contestent notamment le modèle économique qui consiste à répercuter "le surcoût du courant sur la facture des abonnés", a indiqué le président de ce collectif, Alain Bruguier.
Avec un peu plus de 6.500 mégaWatts (MW) de capacité éolienne installée, uniquement sur terre pour le moment, la France est déjà en retard sur ses objectifs du Grenelle de l'environnement qui prévoyaient 19.000 MW sur terre et 6.000 MW en mer d'ici à 2020. Après l'assujetissement des éoliennes au régime juridique des installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE), entré en vigueur en 2011, et l'opposition croissante des défenseurs du patrimoine et des paysages, la remise en cause des tarifs d'achat risquerait d'hypothéquer sérieusement l'avenir de la filière dans l'Hexagone.