Droit individuel à la formation - Formation : le Sénat souhaite renforcer le rôle de la région
"Complexité, cloisonnements, corporatismes" : le bilan de la mission sénatoriale sur la formation professionnelle publié le 11 juillet se montre pessimiste. Ces trois mots stigmatisent un système de plus en plus coûteux (24 milliards d'euros en 2004, et probablement 30 milliards aujourd'hui) pour des résultats décevants avec un chômage à 22,8% chez les jeunes actifs. Entre 3 et 4 milliards d'euros pourraient être économisés, selon le président de la mission, Jean-Pierre Carle (UMP). Coûteux, le système n'en est pas moins inégalitaire : le taux d'accès à la formation passe de 23,4% aux titulaires d'un CAP ou d'un BEP à 44,3% pour les diplômés de l'enseignement supérieur.
Pour le rapporteur Bernard Seillier, "le propos n'est pas de lancer l'illusoire 'grand soir' de la formation professionnelle, mais d'instiller dans le système tel qu'il fonctionne le germe mutagène de la simplicité". Pas de révolution donc, mais un outil unique : le compte épargne formation (CEF) qui suivrait le salarié tout au long de sa vie professionnelle, de la sortie de l'école jusqu'à la retraite. Il s'agit pour le sénateur de "donner un sens concret et un contenu effectif au concept fuyant de formation tout au long de la vie". Géré par un fonds régional abondé par l'Etat, la région et les partenaires sociaux, le CEF s'appuierait sur le droit individuel à la formation (DIF) créé en 2004, c'est-à-dire le droit à 20 heures de formation par an cumulables pendant six ans. Mais le rapport propose de rendre le DIF "transférable" d'une entreprise à l'autre : le salarié conserverait ainsi ses droits en cas de changement d'employeur. Ce "nouveau DIF transférable" impliquerait la suppression de l'obligation légale de 0,9% de la masse salariale de l'entreprise au profit du plan de formation, "actuellement peu efficace, dès lors inutile".
Dans cette architecture nouvelle, la région est amenée à jouer un plus grand rôle, notamment dans la définition des besoins. Le rapport propose de modifier la loi afin de donner au plan régional de développement des formations professionnelles (PRDFP) une valeur prescriptive, "de sorte que ses signataires, notamment l'Education nationale et le monde économique, soient engagés par leur signature".
La région serait appelée à coordonner l'ensemble des acteurs de l'accueil, de l'information et de l'orientation, y compris les CIO, "qu'il convient de transférer à la région". Autre nouveauté : la création d'un conseil local de la formation au niveau du bassin d'emploi. Ce conseil serait présidé par un représentant du président du conseil régional.
Ce rapport de 900 pages bâti autour de 20 propositions phares donnera du grain à moudre à la ministre de l'Economie Christine Lagarde, chargée dans la feuille de route du chef de l'Etat de "réformer la formation professionnelle".
Michel Tendil
Référence : "Le droit de savoir", rapport d'information n° 365 (2006-2007) du sénateur M. Bernard Seillier, fait au nom de la mission commune d'information Formation professionnelle, déposé le 4 juillet 2007.