Fonds européens et développement local : éloge du "melting pot"
Au bénéfice du développement local, le Comité des régions a adopté en commission un projet d’avis visant à placer une partie des fonds européens dans un pot commun, lequel serait géré par les groupes d’action locale. Le texte, qui recommande également de renforcer fortement le préfinancement des "petits projets", devrait être examiné lors de la session plénière du CdR de février prochain.
Face à la "fragmentation des financements européens destinés aux zones rurales", récemment déplorée par le Comité des régions (voir notre article du 29 novembre), Thibaut Guignard, maire de Plœuc-L’Hermitage, innove. Dans un projet d’avis d’initiative, adopté le 27 novembre dernier par la commission NAT (ressources naturelles) du Comité européen des régions (CdR), il propose la création d’un "pot commun" au soutien du développement local mené par les acteurs locaux (DLAL), incarné par le programme Leader.
Un fonds géré par les GAL
L’outil serait alimenté par les contributions du fonds européen agricole pour le développement rural (Feader), du fonds européen de développement régional (Feder), du fonds social européen plus (FSE+) et du fonds pour une transition juste (FJT), et géré par les groupes d’action locale (GAL). Il pourrait être utilisé dans tout type de territoire, "quel que soit le degré d’urbanisation", avec toutefois un fléchage des financements garantissant "la protection des parts dédiées aux zones vulnérables rurales, périurbaines, montagneuses, insulaires et frontalières". Et "avec l’obligation de respecter les objectifs de chaque fonds initial", précise l’auteur de la proposition à Localtis. Ce fonds bénéficierait en outre d’un "cadre réglementaire unique", solution qui permettrait de réduire "la bureaucratie excessive associée aux procédures actuelles".
En attendant la nouvelle donne
Ce nouvel outil ne serait toutefois qu’un palliatif, le temps que prenne corps une "nouvelle approche" pour les zones rurales toujours espérée. Dans son avis, Thibaut Guignard – à la tête de Leader France et, pour quelques jours encore, du réseau européen Elard (le Polonais Piotr Sladocha prendra sa suite le 1er janvier) – déplore d’ailleurs "qu’ait été manqué l’occasion de conférer un caractère officiel" à la vision à long terme pour les zones rurales de l’Union européenne (voir notre article du 12 juillet 2021), communication de la Commission que cette dernière a en outre "tardé à publier", empêchant ainsi "de l’intégrer pleinement dans le cadre de programmation actuel". Il regrette également que l’Agenda rural, un temps aperçu (voir notre article du 14 juin 2022), "continue de faire défaut".
Un contrat de confiance et un préfinancement renforcé pour les "petits projets" Leader
Autre recommandation figurant dans le projet d’avis, l’instauration d’un mécanisme de préfinancement renforcé pour les "petits projets", qui garantirait "le paiement systématique d’un acompte représentant 80% de la subvention accordée dès l’approbation du projet". Une révolution, tant les délais de versement des fonds ne vont pas sans mettre à mal aujourd’hui les trésoreries des porteurs de projet du programme Leader (voir notre article du 9 octobre).
Ou encore, la suggestion d’instaurer un "accord de confiance mutuelle" entre la Commission, les États membres, les autorités de gestion, les groupes d’action locale et les porteurs de projet comme remède à la "surrèglementation", chaque échelon ajoutant aujourd’hui ses propres règles à celles de l’échelon supérieur. Y compris parfois les GAL eux-mêmes, d’ailleurs (voir notre article du 4 novembre).
Examen en plénière en février prochain
Adopté à l’unanimité moins une voix en commission, le projet d’avis devrait être examiné en session plénière du CdR en février prochain. Son auteur espère évidemment le même succès, même s’il indique auprès de Localtis que "le concept de pot commun inquiète certains groupes. Ils le perçoivent parfois comme un fonds supplémentaire alors qu’au contraire, cet instrument constituerait une simplification pour les acteurs locaux. Il remplacerait Leader-Feader, le DLAL FSE, l’objectif stratégique du Feder et même le DLAL Feampa pour les zones rurales". Thibaut Guignard ajoute que l'outil "pourrait garder le nom de Leader", pour mémoire acronyme de Liaison entre actions de développement de l’économie rurale.