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Fonction publique territoriale : la justice impose à cinq villes d'appliquer les 1.607 heures

Le tribunal administratif de Montreuil a ordonné aux maires de cinq villes de Seine-Saint-Denis d'appliquer à leurs agents municipaux, sous 40 jours, la loi sur le temps de travail dans la fonction publique.

Le tribunal administratif de Montreuil a ordonné aux maires communistes de cinq villes de Seine-Saint-Denis d'appliquer sous 40 jours la loi sur le temps de travail dans la fonction publique à leurs agents municipaux. Début janvier, le préfet Jacques Witkowski avait assigné en référé les villes de Bobigny, Stains, Montreuil, Noisy-le-Sec et Tremblay-en-France pour leur absence de délibération en conseil municipal sur le temps de travail, malgré le changement de législation intervenant au 1er janvier. "Dans un délai de 40 jours", les maires des villes visées se doivent "de veiller à l'adoption, à titre provisoire, de la délibération ou de tout élément sur le temps de travail des agents de la commune (...) et de les transmettre au préfet de la Seine-Saint-Denis", a déclaré la juge des référés dans son ordonnance rendue lundi 31 janvier.

Votée en 2019, la loi de transformation de la fonction publique impose l'application des 35 heures hebdomadaires à tous les fonctionnaires, soit 1.607 heures de travail effectif par an. Cette disposition implique la suppression de régimes dérogatoires, plus favorables sur le temps de travail, en place dans certaines collectivités. La mesure est entrée en vigueur au 1er janvier.

À Bobigny, les agents travaillent en moyenne 1.544 heures par an, soit 63 heures de moins que l'obligation légale. Cette durée est de 1.565 heures à Stains et de 1.552 heures à Montreuil.

L'audience sur le référé-suspension du préfet s'est tenue le 19 janvier à Montreuil. Ce référé-suspension s'assortissait d'une injonction de mise en conformité, assortie d'une "astreinte mensuelle d'un montant de 1.000 euros par agent communal". Pour une collectivité comme Montreuil, qui compte 2.000 agents, cela représenterait une astreinte de près de deux millions d'euros par mois.

Le même jour lors d'une conférence de presse au pied du tribunal, plusieurs des maires assignés avaient alors dénoncé la "régression sociale" que constitue à leurs yeux cette loi et demandé un report de sa mise en application en raison du contexte sanitaire. "Laissez-nous du temps pour négocier avec les organisations syndicales, avec nos personnels", avait plaidé Olivier Sarrabeyrouse, le maire de Noisy-le-Sec. "Il y a plus urgent que de nous coller des amendes en ces temps de crise sanitaire", avait abondé son homologue de Montreuil, Patrice Bessac, fustigeant une mesure "illégitime" mais reconnaissant que "la loi est la loi" et devra donc être appliquée à terme. Si les villes concernées escomptaient une assignation de la part du préfet, "on ne s'attendait pas à une amende aussi grosse que cela", avait déclaré le maire de Bobigny, Abdel Sadi.

L'application des 1.607 heures dans les collectivités a entraîné plusieurs mouvements sociaux en France, notamment une grève des éboueurs en décembre à Marseille et en janvier à Toulouse. Une procédure est par ailleurs toujours en cours pour la ville de Paris, certaines dispositions prévues par le nouveau règlement de travail des agents négocié avec les syndicats ayant été suspendues en référé par la justice. Un jugement au fond doit intervenir d'ici la fin du premier trimestre 2022.

"Je ne laisserai évidemment pas de temps en plus" pour que la loi s'applique aux agents municipaux, avait averti samedi 22 janvier la ministre de la Transformation et de la Fonction publiques. "Il est clair pour tout le monde que (cette loi s'applique) au 1er janvier 2022, cette date avait été fixée pour que ça laisse du temps, après les élections municipales, à chacun de négocier", avait expliqué Amélie de Montchalin sur France Inter. "Vous avez des gens qui se sont opposés pour des raisons politiques et politiciennes et il y a d'ailleurs des mairies qui sont aujourd'hui au tribunal puisqu'elles n'ont fait preuve d'aucune volonté de se conformer à la loi", avait-elle accusé. Selon la ministre en revanche, "en catimini, avec beaucoup moins fracas", "la mairie de Paris fait appliquer la loi". Si 80% des communes se sont conformées aux nouvelles règles, il "reste un petit nombre de situations où les délibérations qui ont été prises ne correspondent pas à la loi" et dans ce cas, les préfets font preuve "de bonne intelligence et d'accompagnement, le but n'(étant) pas d'aller au tribunal pour tout le monde", avait-elle assuré.