Archives

Logement - Foncière solidaire : Pierre-René Lemas précise la position de la Caisse des Dépôts devant les sénateurs

Lors de son audition, le 26 octobre 2016, par la commission des affaires économiques du Sénat, Pierre-René Lemas a précisé la position de la Caisse des Dépôts sur la Foncière solidaire annoncée par François Hollande en janvier 2016. "L'idée n'est pas de créer un aménageur de plus [...] ni un EPF de plus [...] ni de faire concurrence aux acteurs privés", a déclaré le directeur général de la Caisse des Dépôts.

A écouter Pierre-René Lemas, directeur général de la Caisse des Dépôts, lors de son audition le 26 octobre par la commission des affaires économiques du Sénat, il ne fait aucun doute que la "Foncière solidaire" verra bientôt le jour. La création de la société foncière publique solidaire, annoncée par François Hollande lors du bicentenaire du groupe Caisse des Dépôts, le 12 janvier 2016 (voir notre article du 13 janvier 2016), et dont les contours ont été tracés par Thierry Repentin, président de la Commission nationale d'aménagement et du foncier (voir notre article du 16 septembre 2016), a été rejetée par le Sénat le 12 octobre dans le cadre de la discussion du projet de loi Egalité et Citoyenneté (voir notre article ci-contre du 20 octobre 2016) - après avoir pourtant été validée en commission (voir notre article du 5 octobre 2016) – les sénateurs estimant en séance que sa concrétisation était trop imprécise, notamment concernant l'articulation du nouvel organisme avec les établissements publics fonciers locaux (EPFL).
Or, il ne s'agit pas "de créer un aménageur de plus, il y en a assez comme ça, ni un EPF de plus, qui font déjà leur métier, ni de faire concurrence aux acteurs privés, car le marché est suffisamment difficile", a assuré Pierre-René Lemas. "L'idée est de mobiliser des terrains publics, à commencer par ceux de l'Etat et de ses opérateurs, pour pouvoir, avec les collectivités locales, construire du logement très social et social", voire "du logement intermédiaire pour favoriser la mixité". En l'occurence, l'objectif est de produire 50.000 logements en 5 ans, dont 25.000 logements locatifs sociaux ou en accession sociale à la propriété, en priorité sur les zones tendues.

Les conditions de réussite

Il a exposé les conditions nécessaires pour que l'opérateur repose sur un "modèle économique sérieux" : il faudra "suffisamment de fonds propres au démarrage", "une réelle volonté de l'Etat de céder du terrain", "une capacité en fonds propres permettant d'avoir un effet de levier important, avec un volume d'emprunt important et raisonnable" ainsi que "des dérogations fiscales ou réglementaires pour pouvoir intervenir dans les meilleures conditions". Les trois premiers points étant acquis (*), Pierre-René Lemas suggère de s'inspirer du mécanisme de décote prévu par la loi Duflot I de janvier 2013, relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement (voir notre article ci-contre du 25 janvier 2013). Mais pour fonctionner, l'organisme devra surtout pouvoir compter sur "l'appui des collectivités locales et des aménageurs", a-t-il prévenu.
Plusieurs sénateurs se sont montrés sceptiques vis-à-vis de cet organisme "aux contours encore flous". Valérie Létard, sénatrice (UDI) du Nord, par ailleurs présidente de l'EPF régional des Hauts-de-France, s'est montrée par exemple inquiète pour les "équilibres" des établissements publics fonciers, qui doivent déjà changer d'échelle dans les nouvelles grandes régions. "Il ne faudrait pas que la foncière ne laisse aux EPF que les terrains qui ne sont pas rentables", a averti également Marie-Noëlle Lienemann, sénatrice PS de Paris (SER, Paris) et ex-ministre du Logement. Pas de risque, assure Pierre-René Lemas. Car la valeur ajoutée de ce nouvel outil n'a pas vocation à "doublonner les EPF", a-t-il répété, son rôle sera de permettre "de pouvoir disposer de terrain d'Etat dans une logique […] permettant de céder par des baux emphytéotiques aux collectivités locales les capacités d'utilisation de ce terrain pour la construction de logement social".

"Notre responsabilité est de fabriquer la ville des années 2030"

On se souvient que Pierre-René Lemas, lors du bicentenaire de la Caisse des Dépôts, avait déclaré que le groupe allait "redevenir la Caisse des Dépôts des territoires". "Nous voulons accompagner le monde local dans cette immense transformation" qu'est la réforme territoriale et la nouvelle carte régionale, avait-il ajouté. Lors de son audition au Sénat, il a confirmé "la politique de présence [de la Caisse des Dépôts] sur les territoires", indiquant que, depuis 2015, de nouvelles antennes territoriales ont été créées "dans nos bassins de clientèle, comme à Nice à Chambéry", tout en maintenant les délégations dans les anciennes régions. En dehors des grandes villes et des agglomérations, la Caisse des Dépôts a signé 18 conventions avec des villes moyennes et continue d'échanger avec des associations de petites villes et de maires ruraux, qui rencontrent des difficultés "non seulement pour financer des projets, mais aussi sur leur définition et leur montage", a-t-il bien précisé.
Dans le prolongement de la COP21, il a assuré que la Caisse des Dépôts allait se "mobiliser" - notamment dans le cadre du forum Smart City organisé à Paris les 21 et 22 novembre prochains - "pour accompagner les collectivités locales […] en termes d'ingénierie technique et financière et mobiliser les sachant". "La Caisse des Dépôts des années quatre-vingt a fabriqué ce qu'est la ville d'aujourd'hui, en bien et en mal, avec une vision d'avenir à 30 ans. Notre responsabilité est de fabriquer la ville des années 2030". Il propose pour cela de promouvoir en France les "démonstrateurs de la ville intelligente de demain".

AEF

* Le président de la République avait annoncé que la Foncière solidaire serait capitalisée à hauteur de 750 millions d'euros, moitié par l'Etat, moitié par la Caisse des Dépôts. Comme elle aurait la capacité d'emprunter, elle pourrait mobiliser jusqu'à 2 milliards d'euros d'investissements, estime Thierry Repentin.

13.000 logements intermédiaires sont déjà "commandés ou signés"

Lors de son audition, le 26 octobre 2016, par la commission des affaires économiques du Sénat, Pierre-René Lemas, directeur général de la Caisse des Dépôts, a indiqué que 13.000 logements intermédiaires ont été "commandés ou signés" au 1er juin 2016. "Nous sommes donc un peu en avance" sur l'objectif de réaliser 35.000 logements intermédiaires à horizon 2019, se félicite-t-il.
Il a présenté, devant les sénateurs, le rôle de la SNI, filiale de la Caisse des Dépôts, en tant que "premier opérateur du logement d'urgence, d'insertion, d'accueil des demandeurs d'asile et des personnes défavorisées", statut qu'elle a acquis en devenant actionnaire majoritaire Adoma. "Nous allons investir trois milliards d'euros dans Adoma d'ici 2026 pour créer ou rénover 66.000 logements", a-t-il déclaré.

AEF