Elections locales - Fléchage des élus intercommunaux : il va falloir tirer vite
Le président de la République a déclaré, vendredi, devant les Etats généraux de la démocratie territoriale organisés par le Sénat : "Ma préférence va à un système de fléchage qui permettra de savoir au moment du vote quels seront les élus (municipaux) qui siégeront au conseil communautaire, sans avoir besoin d'un scrutin distinct de l'élection municipale" (voir notre article dans l'édition du 5 octobre).
Il donnait ainsi sa position par rapport à la loi de réforme des collectivités territoriales du 16 décembre 2010 qui a posé le principe du scrutin fléché sans en avoir défini les modalités. Ces précisions figuraient dans un projet de loi déposé au Sénat mais non examiné (le fameux "projet de loi 61"). Les nouvelles modalités d'élection devant être connues un an avant la tenue des élections municipales, soit en mars 2013, le projet de loi devrait donc être déposé très rapidement. Au risque du statu quo.
"Peut-on imaginer une seule seconde le maintien du statu quo ?"
Pour l'ADCF, il s'agit de la réforme "la plus urgente en terme de calendrier", a souligné son président, Daniel Delaveau, devant Marylise Lebranchu, lors de la 23e Convention nationale de l'intercommunalité (voir notre article du 5 octobre). "Nos communautés gèrent désormais environ 35 milliards d'euros d'argent public, a-t-il poursuivi. Nos budgets reposent dans une très large part sur des impôts payés par les ménages." Autre urgence : "Nous allons continuer à renforcer les compétences de nos intercommunalités" et "la légitimité de nos communautés devra être incontestable pour ce faire". Donc "peut-on imaginer une seule seconde le maintien du statu quo ?", interroge Daniel Delaveau. Et de prédire : "Même si pour beaucoup d'entre nous ce n'est une étape, ne pas le faire serait encourir un risque de fracture démocratique."
"Le statu quo, s'il devait être reconduit en 2014, serait une mauvaise nouvelle", a reconnu la ministre en charge de la décentralisation, tout en rappelant que ces questions électorales étaient du ressort du ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, qui "a reçu une dizaine de SMS sur vos propositions depuis ce matin", a assuré Marylise Lebranchu. "Un petit texte devrait être déposé au Sénat", a-t-elle tout de même confié à l'assistance.
Un minimum
Pour une partie des élus intercommunaux, le fléchage sera bien insuffisant pour assurer une véritable reconnaissance démocratique. Pour Gérard Gouzes, président de la communauté d'agglomération Val de Garonne, il ne peut être que "provisoire". C'est "un minimum" pour Vincent Feltesse, président de la communauté d'agglomération de Bordeaux, favorable au suffrage universel direct des élus communautaires. Très virulent, Franck Martin, président de la communauté d'agglomération Seine-Eure, considère le fléchage comme "une farce". Il milite quant à lui pour l'élection du président au suffrage universel direct et dans le cadre d'"une élection distincte". "Il faut une tête de liste qui incarne un programme sanctionné par un vote", explique-t-il.
Même Alain Rousset, président de l'ARF, est persuadé que "un jour viendra où une partie de l'intercommunalité sera élu au suffrage universel direct" car "quand on tire l'impôt, on peut difficilement le faire au second degré".
Une collectivité de plus ? Pourquoi pas...
Ce n'est pas l'avis de tous. Rendant compte à Biarritz des retours de questionnaires remplis par les maires dans le cadre des Etats généraux du Sénat, Didier Guillaume, vice-président du Sénat, a fait part de "leur opposition, pour une large majorité, à l'élection des délégués communautaires au suffrage universel, pensant que ce serait la mort à terme des communes".
Etienne Butzbach, président de la communauté d'agglomération Belfortaine, a été très applaudi quand il a émis la réserve suivante : "S'il y a suffrage universel direct, c'est une collectivité territoriale de plus !" Un avertissement qui ne pose visiblement pas problème à la ministre de la Décentralisation. "Je ne suis pas effrayée du passage d'un établissement public de coopération intercommunale à une collectivité territoriale", a-t-elle répondu, avant d'ajouter : "Et j'entends la peur de perdre la commune." Et de conclure : "A nous de trouver une solution."
Avant d'en arriver là, une série de questions reste à trancher pour la formule "minimum" du fléchage. Daniel Delaveau les a listées : "Voulons-nous un vrai fléchage sur les listes municipales ou nous en tenir à l'ordre de classement comme dans le modèle PLM ?" "Quels seuil démographique sera retenu pour instituer le scrutin de liste des communes ?"