Financement des associations : "Il y a urgence à agir", alerte le Cese
"Il faut imaginer un monde sans associations pour comprendre combien leur apport à l’économie, à la société et à la démocratie est considérable." Dans l’avis qu’il vient d’adopter, le Conseil économique, social et environnemental appelle à donner au monde associatif les garanties d’un financement pérenne, en passant prioritairement par la subvention.
"La baisse des subventions, l’accentuation des logiques de marché et de commande publique, auxquelles s’est ajoutée l’inflation, mettent en péril la pérennité des associations." Le 29 mai 2024, lors de l’adoption d’un avis sur le financement des associations, le Conseil économique, social et environnemental (Cese) a lancé "un appel à une vigilance renforcée de toutes et de tous sur ces enjeux de pérennité du monde associatif".
Sur la base d’une consultation à laquelle ont répondu 6.500 associations, d’une "journée délibérative" et d’auditions, le Cese observe "un recul général des capacités d’action" des associations et "une perte de sens qui met en péril l’équilibre fragile de l’engagement bénévole et salarié dont les associations dépendent". L’assemblée représentative de la société civile organisée, qui comporte un groupe des associations (14 représentants dont sept désignés par le Mouvement associatif), l’affirme : il ne s’agit pas là d’un "sujet corporatiste" mais bien d’une question "déterminante dans notre capacité à œuvrer collectivement pour faire société".
"Entre 2005 et 2020, la part des subventions a baissé de 41% dans le budget des associations au profit de logiques marchandes", indique le Cese. "La baisse des subventions et la hausse des commandes publiques et des appels à projet poussent les associations vers une 'gestionnarisation' qui dénature leur action", estime le Conseil. Ce dernier ajoute que la forte inflation de 2022 et 2023 a "précipité" des associations telles que les Restos du cœur et les centres sociaux "dans de grandes difficultés" (voir notre article).
"Les dépenses des collectivités territoriales destinées au monde associatif sont relativement stables depuis 2012 (11 à 12 % du PIB)", est-il indiqué dans l’avis. Mais cette stabilité cache des évolutions contrastées : baisse de la part du financement des associations par les communes (de 15% à 1999 à 11% en 2017), stabilité de la part régions (4 à 5%) et hausse de la part départements en lien avec les compétences sociales (de 9% à 12% entre 1999 et 2020).
Subvention : donner une base législative à la définition inscrite dans la circulaire Valls de 2015
Le Cese formule 20 préconisations, appelant en particulier à "augmenter les subventions de l’État et des collectivités territoriales destinées aux associations" en fixant à 2,5% la part du budget de l’État consacrée aux associations et en instaurant une loi de programmation pluriannuelle. La définition de la subvention comme "mode de financement principal des associations" doit pouvoir disposer d’une base législative, dans le prolongement de la circulaire Valls de 2015 (voir notre article), plaide le Cese. Cette définition doit prévoir "la possibilité de financer un projet à 100% de son coût économique", selon le Cese qui demande également de "sécuriser la notion de pluriannualité des subventions en contraignant le respect des engagements lors de conventions pluriannuelles".
L’enjeu se situant en partie à l’échelle européenne, le Cese recommande aux collectivités de se fonder sur le "principe de subsidiarité rappelé à l’article 106 du TFUE [traité sur le fonctionnement de l'UE] et [sur] la notion d’activités purement locales" pour "ne pas appliquer les régimes relatifs aux aides d’État dans leurs financements aux activités associatives entrant dans le champ de l’intérêt général et de la non-lucrativité".
Autre préconisation : la création d’un "fonds national de mobilisation pour la vie associative cogéré par des représentants des collectivités territoriales, de l’État et du monde associatif". Les associations témoignant par ailleurs d’une "diminution drastique" des emplois aidés depuis 2016, le Cese demande le déploiement de nouveaux "emplois aidés d’utilité sociale et citoyenne". L’assemblée appelle enfin à "rétablir la confiance" entre pouvoirs publics et associations, en "[abrogeant] le contrat d’engagement républicain" (entré en vigueur début 2022, voir notre article) et en relançant à la place la charte d’engagements réciproques entre État, collectivités et associations (voir notre article de 2017).