Fin des réseaux 2G et 3G : la CSNP alerte sur une transition mal anticipée
À l'approche de l'arrêt progressif des réseaux mobiles 2G et 3G en France, la Commission supérieure du numérique et des postes (CSNP) dresse un constat sévère : défaut de pilotage, communication insuffisante, risques pour les services essentiels, surcoûts pour les collectivités… L'institution appelle l'État et les opérateurs à prendre leurs responsabilités à travers treize recommandations concrètes.

© Aurélie Roudaut
Alors que la 2G d'Orange doit s'éteindre d'ici fin 2025, suivie par celles de Bouygues et SFR en 2026, puis de l'ensemble des réseaux 3G entre 2028 et 2029, la Commission supérieure du numérique et des postes (CSNP) juge dans un avis publié le 10 avril 2025 que les conséquences de cette bascule technologique sont largement sous-estimées. "À moins d'un an de la fermeture du réseau 2G, certains usagers ne sont pas encore informés", s’inquiètent ses membres. La commission déplore un manque de coordination entre les opérateurs, les services de l'État et les acteurs concernés, et recommande de lancer une concertation publique ainsi que la publication de lignes directrices opposables aux opérateurs.
Des services essentiels menacés
Les réseaux 2G et 3G restent au cœur de nombreux usages professionnels et d'équipements critiques : téléassistance, systèmes d'alarme, ascenseurs, infrastructures d'eau, ou encore terminaux de paiement. Fin 2024, 2,8 millions de terminaux 2G et 4,6 millions de terminaux 3G sont encore en service dans les entreprises. Or, une part importante des cartes SIM utilisées ne sont pas françaises, ce qui complique leur repérage.
La CSNP appelle à organiser des tests grandeur nature avant toute fermeture nationale afin de garantir la continuité des services. Elle insiste aussi sur le rôle de l'État et de l'Arcep, estimant que, comme au Royaume-Uni, des obligations plus fermes devraient être imposées aux opérateurs.
Des coûts pour les collectivités
La fin de ces technologies implique des coûts importants pour adapter les équipements : jusqu'à plusieurs centaines de millions d'euros rien que pour les réseaux d'eau et d'assainissement. Le remplacement d'un dispositif dans un ascenseur pourrait atteindre 5.000 euros selon les professionnels du secteur. La CSNP recommande donc la mise en place de prêts à taux zéro et des abonnements à tarifs modérés, notamment pour les acteurs publics.
Les collectivités sont également concernées via la fiscalité locale : la suppression progressive des antennes 2G/3G pourrait entraîner une baisse de l'Ifer mobile, au moins temporairement (voir notre article du 16 mars 2023). L'État est invité à mesurer précisément cet impact, aujourd'hui mal connu.
Un enjeu d'inclusion numérique et de sobriété écologique
La commission s'inquiète aussi pour les populations âgées et isolées, souvent équipées de téléphones basiques uniquement compatibles 2G ou 3G. Elle demande que des programmes d'aide à l’équipement et un accompagnement ciblé soient mis en place. Les opérateurs sont par ailleurs incités à éviter les offres commerciales abusives et à cesser la vente de terminaux incompatibles.
Enfin, la CSNP met en garde contre une obsolescence des équipements, génératrice de déchets électroniques. Elle plaide pour des programmes de collecte et de recyclage, et pour des mises à jour logicielles lorsque c'est techniquement possible. Si les réseaux 2G/3G représentent encore 21 à 33% de la consommation électrique mobile, leur extinction doit s'accompagner de solutions écoresponsables, estime la Commission.
"Il est essentiel de rester vigilants face aux impacts de cette transition", conclut la CSNP, qui voit dans cette expérience un test grandeur nature de la capacité des pouvoirs publics à gérer le passage vers de nouvelles générations technologiques. Et une leçon à retenir pour la future disparition de la 4G, dès la prochaine décennie.