"Filet de sécurité" 2022 : 400 millions d'euros pour moins de 3.000 collectivités ou groupements

2.937 entités publiques locales - dont deux tiers de communes - ont perçu, pour l'exercice 2022, une aide de l'Etat, afin de faire face à l'inflation et au dégel du point d'indice de la fonction publique. C'est ce qu'indique un bilan, que Bercy a communiqué au rapporteur général du Budget à l'Assemblée nationale. L'Etat débourse au total 404 millions d'euros pour ce dispositif.

2.937 structures publiques locales ont bénéficié pour l'exercice 2022 du "filet de sécurité" contre les effets de l'inflation et de la hausse des rémunérations dans la fonction publique, ce qui représente une dépense totale de 404 millions d'euros pour l'Etat.

Dans le détail, plus de 84% de la somme (341 millions d'euros) ont bénéficié aux 2.007 communes éligibles. Les 16% restants ont été affectés à 105 groupements de communes à fiscalité propre (35 millions d'euros) et 825 syndicats (27 millions d'euros). C'est ce qu'indique Jean-René Cazeneuve, rapporteur général du Budget à l'Assemblée nationale, dans le rapport d'information sur l'application des mesures fiscales, que la commission des finances a examiné le 20 septembre.

Les trois quarts des communes bénéficiaires ont moins de 3.500 habitants, mais les montants qui leur sont alloués dépassent à peine 11% des crédits engagés en faveur du dispositif. Les grandes gagnantes se situent dans la strate des communes dont la population est comprise entre 10.000 et 50.000 habitants. Au nombre de 255, elles se partagent 177 millions d'euros (soit près de 44% des crédits).

2.500 communes rendent à l'Etat tout ou partie des acomptes

Les bénéficiaires "ont été affectées dans des ampleurs variables par l’inflation", précise le rapporteur général du Budget. La capacité d'autofinancement moyenne - différence entre les recettes et les dépenses de la section de fonctionnement - des communes de moins de 500 habitants accuse le plus rude coup, avec un recul de 64% en 2022. Plus la taille des collectivités croît, plus les résultats sont en amélioration - ainsi, les 7 villes de plus de 100.000 habitants éligibles au filet de sécurité voient leur capacité d'autofinancement baisser de 28% en 2022.

A l'entrée en vigueur du dispositif, les élus locaux étaient plutôt pessimistes sur les "perspectives" financières de leurs collectivités, a souligné Jean-René Cazeneuve, lors de la présentation du rapport devant ses collègues. Ils ont été assez nombreux à solliciter le versement d'un acompte à l'automne 2022. Au total, 4.167 entités locales en ont obtenu un, ces avances représentant au total 105 millions d'euros. Mais les comptes de gestion établis au printemps 2023 ont dressé un bilan moins noir que ce que les élus locaux redoutaient. L'Etat doit reprendre à 3.418 structures - dont 2.525 communes - un montant de 69 millions d'euros.

Le législateur avait conditionné l’éligibilité au filet de protection notamment au constat d’une baisse de l’épargne brute de la commune ou de l’intercommunalité de plus de 25% en 2022. Un seuil qui a permis d'éviter l'écueil du saupoudrage, estime Jean-René Cazeneuve. Pour qui, par ailleurs, l'enveloppe budgétée (430 millions d'euros) était pertinente. Ce sont, en effet, 404 millions d'euros que l'Etat dépensera finalement au titre du filet pour 2022.

Aider les collectivités "les plus vulnérables"

Ce bilan du député Renaissance diffère sensiblement de l'avis que le Comité des finances locales (CFL) avait rendu, en octobre 2022, sur les modalités techniques de mise en œuvre du filet de protection. Jugeant celles-ci trop restrictives et compliquées, les élus locaux avaient montré leur déception (voir notre article du 6 octobre 2022).

Mais, s'ils devaient à l'avenir être en quête de solutions pour les collectivités en difficulté, les parlementaires auraient intérêt à s'inspirer finalement de ce dispositif, estime en substance le rapporteur général du Budget. Il recommande l'élaboration de mécanismes de soutien "ciblés sur les collectivités qui en ont le plus besoin, en définissant des critères précis et adaptés".

Jean-René Cazeneuve critique, en revanche, l'allocation de 120 millions d'euros de crédits de l'Etat pour compenser en 2022 la revalorisation de 4% du revenu de solidarité active (RSA), alors que la dépense correspondante des départements "a baissé en 2022", pour la deuxième année consécutive. Avec cette mesure de la loi de finances rectificative pour 2022 publiée en août 2022, et votée contre l'avis du gouvernement, "on a apporté une compensation à la ville de Paris et au département des Hauts-de-Seine, qui ont pourtant des épargnes brutes assez importantes", a déploré le député du Gers.

Des recettes boostées par l'inflation

"Le soutien financier de l'Etat doit être ciblé pour prendre en compte l'effet positif de l'inflation sur les recettes des collectivités", écrit-il par ailleurs. En 2022, les collectivités locales ont perçu 70 milliards d'euros de recettes dont l'évolution est liée à celle de l'inflation – ce montant ne comprenant pas les 40 milliards d'euros de TVA dont la progression est renforcée par la hausse des prix. La plus grande part est constituée par les impôts locaux calculés en fonction des valeurs locatives, notamment les taxes foncières. Alignée sur l'indice des prix à la consommation harmonisé de l'année n-1, la revalorisation de ces impôts a atteint 3,4% en 2022 et 7,1% en 2023.

Pour 2024, elle devrait encore être significative, puisque le gouvernement n'envisagerait pas de revenir sur ces règles de revalorisation. Selon nos informations, le ministre délégué chargé des Comptes publics, Thomas Cazenave l'a indiqué, ce 19 septembre, aux parlementaires qu'il recevait à l'occasion des Dialogues de Bercy.