Energie - Feu vert de Delphine Batho à la géothermie... et nouveau revers pour les gaz de schiste
La ministre de l'Ecologie et de l'Energie, Delphine Batho, a signé le 10 juin 2013, quatre arrêtés parus au Journal officiel du 23 juin accordant de nouveaux permis exclusifs de recherches de géothermie haute température tous situés dans le Bas-Rhin. Il s'agit des permis dits de "Illkirch-Erstein", de "Strasbourg", de "Durningen" et "Soufflenheim". Cette série d'autorisations vient s'ajouter à deux permis de prospection déjà accordés en février en Auvergne et dans les Pyrénées. Le principe de la géothermie à haute température consiste à prélever à grande profondeur des eaux naturellement chaudes (plus de 150°) soit directement dans une nappe, soit au travers de réseaux de failles où elles circulent, sans créer de nouvelles fractures. Les eaux prélevées peuvent être utilisées soit pour la production d'électricité dans des centrales géothermiques, soit pour la production d'électricité et de chaleur en cogénération, soit uniquement pour l'alimentation en chaleur. Le gouvernement souhaite développer cette source d'énergie renouvelable peu émettrice de gaz à effet de serre. "La France possède un potentiel géothermique non négligeable et l'Alsace dispose des réserves les plus intéressantes puisque des températures très élevées s'y rencontrent à des profondeurs plus faibles qu'ailleurs (170°C à 3.000 mètres)", justifie le ministère dans un communiqué. "Si la production électrique d'origine géothermique reste encore faible, puisqu'elle représentait 0,1% de la production d'électricité d'origine renouvelable en France en 2008, le nombre croissant de demandes de permis de recherche démontre la relance de cette filière énergétique en France", ajoute-t-il. Quatorze autres demandes sont actuellement en cours d'instruction, indique encore le ministère.
Gaz de schiste : le nouveau non de la ministre
Par ailleurs, Delphine Batho a réitéré ce 25 juin son opposition aux permis d'exploration de gaz de schiste en confirmant le rejet d'une demande qui avait été faite par la société Hexagon Gaz pour une zone à cheval entre la Corrèze, la Dordogne et le Lot. L'instruction de cette demande de permis dit "de Brive" déposée en 2010 "arrive à terme", a indiqué la ministre, pour qui "la position du gouvernement est claire : c'est le refus de la fracturation hydraulique et l'application de la loi" (1).
"Aucune demande de permis en cours d'instruction ne se présente ouvertement comme une demande pour le gaz de schiste ayant recours à la fracturation hydraulique, c'est l'instruction administrative qui permet de diagnostiquer la réalité des objectifs poursuivis", a expliqué Delphine Batho. Dans la demande du "permis de Brive", "les couches géologiques visées ne peuvent pas correspondre à du gaz de houille, tel que la demande le prétend", a précisé la ministre, en soulignant la similarité avec les rejets des permis dits "de Cahors" et "de Beaumont-de-Lomagne". "De plus, l'opérateur Hexagon Gaz est une société basée à Singapour qui manque de références", a conclu Delphine Batho.
Dans un communiqué commun, les élus EELV Noël Mamère (député), José Bové (député européen) et Marie Bové (conseillère régionale) ont salué "une victoire pour ce territoire" dont "élus, associations et individus se sont mobilisés". La société Hexagon Gaz "n'a pas donné les garanties de sérieux, annonçant chercher du gaz au-delà des couches de charbon, dans les schistes", estiment les trois élus. "Nous sommes très contents, a déclaré à l'AFP Marie Bové. La ministre a entendu les cris d'alerte et les lobbies n'ont pas eu les pleins pouvoirs pour contourner la loi (de juillet 2011) comme ils le souhaitaient."
Au-delà de l'interdiction de la fracture hydraulique, les écologistes réclament "l'interdiction de toute exploitation d'hydrocarbure de roche-mère" et disent rester mobilisés pour la réforme du Code minier préparée par Delphine Batho, et qui selon eux "doit aller dans ce sens". "Les gaz de schiste comme les gaz de houille ne sont pas les énergies d'avenir, elles sont celles du passé [...]. Il est l'heure de leur tourner le dos, résolument, et de s'investir dans la transition énergétique et les énergies renouvelables", affirment les élus.
Anne Lenormand avec AFP
(1) Votée par le précédent gouvernement, la loi de juillet 2011 interdit, en raison de ses impacts environnementaux, la technique de la fracturation hydraulique, seule manière opérationnelle à ce jour d'explorer et d'exploiter les gaz de schiste.