Face aux conséquences de la crise, 19 départements veulent relancer l'expérimentation du revenu de base
Les 19 présidents de conseils départementaux à majorité socialiste ont publié une tribune insistant sur le fait que la mise en oeuvre d'un revenu de base constituerait "une solution pour amortir le choc social qui risque de faire basculer nombre de nos concitoyens dans la précarité". La proposition de loi d'expérimentation est au point mort et le revenu universel d'activité (RUA) semble lui aussi à l'arrêt... et plus vraiment en phase avec la situation actuelle.
Alors que les interrogations montent sur le volet social de l'après-crise sanitaire, 19 départements à majorité socialiste (*) ont publié une tribune, dans le Journal du Dimanche du 12 avril, pour appeler à une relance de l'expérimentation du revenu de base. Lancé à l'initiative du département de la Gironde, le projet avait débouché sur une proposition de loi d'expérimentation, rejetée en première lecture à l'Assemblée nationale il y a plus d'un an (voir notre article ci-dessous du 7 février 2019).
Empêcher de basculer dans la précarité
Les 19 présidents de conseils départementaux signataires expliquent qu'"aujourd'hui, alors que la crise sanitaire du Covid-19 évolue chaque jour un peu plus en une crise économique mondiale, poussant nos systèmes de solidarité dans leurs retranchements, le revenu de base apparaît dans toute l'Europe, en Espagne, en Allemagne ou au Royaume-Uni, comme une solution pour amortir le choc social qui risque de faire basculer nombre de nos concitoyens dans la précarité. Le débat émerge aussi aux États-Unis et au Canada". Ils souhaitent donc "pouvoir mettre en œuvre un revenu de base sans contrepartie, mais avec un accompagnement renforcé, automatique pour résoudre le problème du non-recours aux droits, ouvert dès 18 ans pour lutter contre la précarité des plus jeunes, dégressif en fonction des revenus d'activité et d'un montant égal au seuil de pauvreté".
Le signataires reconnaissent que certaines de ces mesures ont été prises pour la durée du confinement (reconduction automatique des droits et suspension des sanctions), mais souhaitent que le gouvernement aille plus loin. Pour les départements signataires, "cette démarche pourrait être portée également au sein de l'Union européenne, échelle particulièrement adaptée pour apporter une réponse globale". En attendant, "nos départements sont prêts à expérimenter cette solution et à en évaluer les bénéfices escomptés pour les personnes qu'ils accompagnent". À noter : si la proposition de loi d'expérimentation a été rejetée par l'Assemblée nationale, une proposition de loi similaire a été déposée au Sénat, au lendemain de ce rejet, par Roland Courteau, sénateur (PS) de l'Aude (voir notre article ci-dessous du 19 avril 2019). À ce jour, elle se trouve toujours en attente de désignation d'un rapporteur.
Quel avenir pour le RUA?
Le rejet de la proposition de loi d'expérimentation par les députés de la majorité, le 31 janvier 2019, s'était fondé avant tout sur la perspective de création du revenu universel d'activité (RUA), qui privilégie plutôt une logique de fusion et d'harmonisation de prestations existantes. Lancé par Emmanuel Macron le 13 septembre 2018 (voir notre article ci-dessous du même jour), le RUA peine toutefois à émerger, butant à la fois sur des difficultés de périmètre (comme le montrent les oppositions sur l'intégration des APL et le renoncement à intégrer l'AAH) et sur la contradiction entre la recherche d'un plus grand accès aux droits et l'annonce d'une réforme à coût constant.
L'annonce du dispositif finalement retenu devait intervenir cet été, mais cette date n'a plus de sens aujourd'hui et le dossier semble aujourd'hui à l'arrêt, même si le jury citoyen a finalement rendu son avis, sur lequel Localtis reviendra très prochainement. Mais surtout le RUA, qui tient davantage de la simplification administrative que d'une nouvelle prestation sociale, est-il toujours en phase avec les orientations nouvelles d'après crise évoquées par le chef de l'État dans son intervention du 13 avril ? Dans la négative, le revenu de base – ou un autre substitut – pourrait bien revenir sur le devant de la scène.
(*) Alpes-de-Haute-Provence, Ardèche, Ariège, Aude, Dordogne, Finistère, Gard, Haute-Garonne, Gers, Gironde, Hérault, Ille-et-Vilaine, Landes, Loire-Atlantique, Lot, Lot-et-Garonne, Meurthe-et-Moselle, Nièvre et Seine-Saint-Denis.