À Bourges, le vélo n'a plus d'âge ! (18)

Le fanion violet « j'peux pas j'ai twinner » avec le logo du centre communal d’action sociale (CCAS) et au recto un numéro de téléphone à contacter, commence à être bien repéré dans les rues de Bourges, et notamment le long des circuits vélo ou autour du lac. Y compris par les touristes, intrigués autant qu'attirés par ce vélo à deux places côte à côte, chevauché par des cyclistes plutôt âgés. 

« Cette activité permet aux seniors d'accéder à une forme de liberté, de travailler leur autonomie, et leurs capacités cognitives, de retrouver des mouvements articulaires doux », observe la responsable du service animation senior du CCAS, Céline Villain. 

Les personnes sont assises, avec selle non pivotante pour faciliter l'installation des moins mobiles. Le système de pédalier est adapté en fonction des forces de chacun (pédalier libre, ou lié au conducteur). Des accoudoirs sécurisent l'assise et les trois roues rendent l'engin parfaitement stable. Seul le guidon du conducteur fait bouger la roue avant directionnelle. 

Vent dans les cheveux

Le CCAS avait acheté trois Twinner avant le Covid, dans l'idée d'inscrire également les activités du CCAS dans la philosophie de l'agenda 21 déployé par la ville. C'est Allan Mas, nouvel animateur sportif depuis 2022, qui les a sortis du garage. « Nous avons commencé par proposer des sorties aux personnes âgées de deux résidences autonomies de la ville. Allan s'y rend chaque semaine, donc il connaît bien les résidents », raconte Céline Villain. Car il a fallu dépasser certaines appréhensions. Mais la proposition a très vite séduit. « C'est une activité qui permet de s'adapter aux capacités et envies de chacun. Pour les plus autonomes, je peux ajouter des parcours. La balade se complète parfois de jeux avec des plans pour se repérer, ce sont eux qui m'orientent, et se guident dans l'espace », explique l'animateur. 

Certains n'avaient jamais fait de vélo et ont découvert à plus de 70 ans cette liberté. « Je commence par un parcours sur un parking, et si la personne se sent à l'aise, on continue. C'est surprenant ce que cela déclenche, de confiance en soi », relève Allan. D'autres goûtent à un plaisir qu'ils imaginaient enfoui dans leurs souvenirs. Comme cette dame qui sourit à cette « sensation retrouvée du vent dans les cheveux ». Les personnes âgées peuvent à nouveau participer à des activités (circuits patrimoine à vélo) qui ne leur étaient plus accessibles, le vélo remplaçant finalement les jambes...

Une activité en plein essor

L'engouement est tel que les trois vélos ne suffisent pas à répondre à la demande. « On essaye de faire tourner les réservations pour que tout le monde puisse faire une sortie », glisse Allan. Certaines sorties sont collectives, Allan fait des allers-retours pour aller chercher les résidents en Twinner, les déposer au lac où ils passent un moment, avant un nouveau ballet d'aller-retour en pédalant pour revenir à la résidence.

Progressivement, l'activité a été ouverte à tous les plus de 60 ans résidant à Bourges. Elle figure d'ailleurs dans le programme d'animations semestriel, à la page des activités sportives. Une fois par mois, sur un créneau de deux heures, les personnes âgées peuvent venir faire quelques tours sur différents parcours, sur des créneaux de trente à quarante-cinq minutes. « Des personnes nous interpellaient souvent pour savoir si ces vélos pouvaient être loués, de là est venu l'idée d'ouvrir l'activité à un public plus large », explique Allan. La ville a l'avantage d'avoir une longue piste cyclable, la rocade verte, qui fait le tour de la ville, via un lac… C'est aussi comme cela que le CCAS a pu « embaucher » des usagers seniors qui y ont pris plaisir et donnent aujourd'hui un coup de main en tant que conducteurs bénévoles de Twinner. 

Le service est également utilisé par l'équipe spécialisée Alzheimer du CCAS, pour les usagers avec des débuts de troubles cognitifs. « Le but est de maintenir l'autonomie de la personne via une activité physique et de pouvoir aussi, parfois, faire des activités de détente en couple », précise la responsable du service Animation du CCAS. 

Le Twinner s'est développé en même temps que le service animation du CCAS, en plein essor depuis deux ans et demi. « On a aussi essayé de proposer que des petits enfants puissent aussi faire une sortie à vélo avec leur grand-parent. Mais cela n'a pas pris. Peut-être que les gens étaient freinés par le fait de laisser une caution. C'était au tout début de l'activité, on retentera sans doute », reprend la responsable, attachée à creuser la piste pour faire vivre autrement les liens familiaux. 

Le développement actuellement se trouve limité par les capacités humaines que le CCAS peut mobiliser (l'animateur et les bénévoles), ainsi que financières et techniques. La maintenance est « faite maison », comme toute la communication autour de cette activité ou l'habillage du vélo (avec l'ajout de rétro). « Or certaines pièces ne sont disponibles que chez le fabricant, dans le Nord de la France, ce qui prend toujours du temps et revient cher », note la responsable. 

Cela n'empêche pas le CCAS de chercher à développer l'activité via le prêt de Twinner à d'autres structures, comme des maisons de retraite ou des établissements accueillant des personnes en situation de handicap (via une convention de partenariat), avec mise à disposition gratuite, à charge pour la structure de prévoir une assurance.