Évaluation environnementale des projets : vers un basculement dans le "cas par cas" de plusieurs catégories notamment pour l'élevage
Un projet de décret envisage de modifier les seuils de certaines rubriques des catégories de projets soumis à évaluation environnementale, notamment en matière d’élevage intensif, pour répondre au besoin de simplification des exploitants. Un allégement des normes environnementales loin de faire l’unanimité au vu des dizaines de contributions défavorables versées dès l’ouverture de la consultation publique.
A travers un projet de décret portant diverses dispositions relatives à l’évaluation environnementale des projets, soumis à consultation publique jusqu’au 17 mars prochain, certaines rubriques soumises à étude d’impact systématique pourraient relever d’un examen "au cas par cas". Pour rappel, les catégories de projets visés à l’article R.122-2 du code de l’environnement peuvent relever, en fonction de seuils et de critères, d’une évaluation environnementale après un examen au cas par cas. Sont entre autres ici concernées par le projet de texte les installations destinées à l’élevage intensif de volailles ou de porcs. La question des seuils d’évaluation environnementale est en effet un des sujets soulevés dans le cadre de la crise qui secoue le monde agricole.
Rehaussement des seuils pour l’élevage intensif
Le texte a pour objectif de soumettre à évaluation environnementale systématique les seuls projets relevant de l’annexe 1 de la directive 2011/92/UE. Concrètement, il fait passer les seuils de l’évaluation environnementale systématique de 40.000 à 85.000 emplacements pour les élevages intensifs de volaille ; de 2.000 à 3.000 emplacements pour les porcs de production ; de 750 à 900 emplacements pour les truies. Et ce en cohérence avec les seuils de l’annexe I de la directive 2011/92/UE.
"Les autres projets, c’est-à-dire les projets d’élevage intensifs de volailles, de porcs et de truies en dessous de ces seuils, ainsi que les élevages de bovins les plus importants (de plus de 800 veaux ou bovins à l’engraissement ou de plus de 400 vaches laitières) seront désormais soumis à un examen au cas par cas", détaille la notice de consultation. Les installations destinées à l’élevage intensif de volailles ou de porcs - faisant l’objet d’une autorisation environnementale au titre de l'article L.181-1 du code de l’environnement - étaient jusqu’à présent toutes soumises à évaluation environnementale systématique - au titre du (a) de la rubrique 1 relative aux installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE). "Cela permettait d’avoir des seuils identiques pour l’autorisation environnementale - seuils qui découlaient de la transposition de la directive 2010/75/UE relative aux émissions industrielles (IED) et qui étaient repris à l’identique dans la nomenclature des ICPE depuis 2013 - et pour l’évaluation environnementale", explique le ministère de la Transition écologique. Une simplification des normes environnementales qui fait débat…Mis en consultation le 22 février, le projet de décret a déjà fait l’objet de plus de 160 contributions donnant lieu à un tir croisé de critiques arguant d’une régression manifeste face aux enjeux de la transition écologique tandis que d’aucuns y voient au contraire un allégement nécessaire de la réglementation.
Mise en oeuvre de la "clause filet" pour les équipements sportifs et culturels
Une autre modification introduite par le texte concerne les essais d’injection et de soutirage de CO2 en formation géologique lors de la phase de recherche (au titre du (d) de la rubrique 1), qui relèveront également de la procédure de "cas par cas". Idem pour les opérations d'aménagements fonciers agricoles et forestiers (mentionnées au 1° de l'article L.121-1 du code rural et de la pêche maritime), y compris leurs travaux connexes (au titre de la rubrique 45). Elles étaient jusqu’ici soumises à évaluation environnementale systématique dans la nomenclature de l’article R.122-2 suite à la transposition de la rubrique "1.a) Projets de remembrement rural de l’annexe II de la directive 2011/92/UE".
Il est par ailleurs à noter que "suite à la mise en œuvre de la 'clause filet' par le décret n°2022-422 du 25 mars 2022", souligne le ministère, le projet de décret réintroduit à la rubrique 44 relative aux équipements sportifs, culturels ou de loisirs et aménagements associés un seuil de 1.000 personnes. Cette clause de rattrapage permet de soumettre à évaluation environnementale des projets qui, bien que situés en-deçà des seuils de la nomenclature annexée à l’article R.122-2, seraient susceptibles d’avoir des incidences notables sur l’environnement ou la santé humaine. Son introduction par le décret du 25 mars 2022 tirait d’ailleurs les conséquences de la décision du Conseil d’Etat n°425424 du 15 avril 2021 (voir notre article du 16 avril 2021).
Enfin, la rubrique (n°27) concernant les forages en profondeur fait quant à elle l’objet d’une simple correction d’une erreur matérielle.