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Finances publiques - Emprunts toxiques : feu vert du Sénat au projet de loi éliminant les risques financiers pour l'Etat

Haut lieu de la défense des collectivités territoriales, le Sénat a donné le 13 mai son accord au projet de loi permettant de sécuriser juridiquement une bonne partie des emprunts toxiques souscrits par les acteurs publics.

138 sénateurs (notamment socialistes et écologistes) ont voté pour le projet de loi, tandis que 48 (en particulier le groupe communiste et la plupart des centristes) ont voté contre. Une grande partie de l'UMP et le RDSE se sont abstenus.
Le projet de loi répond aux mêmes objectifs qu'un dispositif de la loi de finances pour 2014 censuré fin décembre 2013 par le Conseil constitutionnel. Le gouvernement dit avoir tiré les enseignements de la décision des Sages. Ainsi, le nouveau texte est "très largement ciblé" sur les contrats de Dexia et de la Société de financement local (Sfil), "ceux-là mêmes qui font peser un risque sur nos finances publiques", a indiqué Christian Eckert, ministre en charge du budget. Le Conseil d'Etat "a validé la constitutionnalité" du nouveau dispositif, a-t-il souligné. En décembre, le Conseil constitutionnel avait estimé que le champ couvert par les dispositions imaginées par le gouvernement, était trop vaste.
Le vote du projet de loi suivi du feu vert du Conseil constitutionnel réduirait considérablement les possibilités de victoire en justice des collectivités ayant choisi la voie du contentieux face à Dexia ou à la Sfil. Mais les collectivités pourront continuer à faire valoir l'argument du défaut de conseil, a précisé le ministre. Ce projet de loi "ne désarme pas les collectivités", a-t-il conclu. Peu avant, il avait affirmé qu'il ne procède pas à "l'amnistie des banques". "Il ne tend qu'à protéger l'Etat, et donc les contribuables", a-t-il ajouté.

Protéger l'Etat d'un risque financier de 17 milliards d'euros

En effet, plus de 1.100 contrats détenus par Dexia auprès des collectivités publiques, représentant un encours de 7,4 milliards d'euros, se trouvent en situation d'insécurité juridique au vu de certaines décisions déjà rendues par la justice. Celles-ci ont pour effet la substitution du taux d'intérêt légal, quasi nul, au taux d'intérêt prévu, pour toute la durée du contrat et de manière rétroactive. Or, suite au plan de sauvetage de Dexia, le portefeuille de prêts structurés de cette banque est aujourd'hui détenu par l'Etat. Si rien n'est fait, le coût pour les finances publiques pourrait atteindre 17 milliards d'euros.
Le fonds de soutien aux collectivités, de 100 millions d'euros par an pendant 15 ans "est la meilleure arme dont vont disposer les collectivités", a déclaré Christian Eckert. Créé par la loi de finances pour 2014 et rendu opérationnel par un décret paru le 2 mai dernier (notre article du 5 mai 2014), le fonds accordera ses premières aides d'ici à la fin de l'année. Les banques participent à 61% – 50 % par le biais de la taxe systémique et 11% à travers des contributions volontaires de la Sfil et de Dexia – au financement de ce fonds, l'Etat étant appelé à financer le reste.
Les sénateurs ont introduit un nouvel article imposant au gouvernement de remettre au Parlement, dans un délai de huit mois suivant la promulgation de la loi, un rapport "sur la réforme du taux effectif global". Ce rapport proposera "des évolutions permettant de garantir l'information et la protection des emprunteurs professionnels ou personnes morales, en examinant notamment la possibilité d'obliger les prêteurs à indiquer le taux effectif global maximal que l'emprunteur pourrait être amené à payer".
L'Assemblée nationale doit à présent examiner le projet de loi. Une seule lecture dans chaque chambre est prévue, le gouvernement ayant déclaré la procédure accélérée.