Economie circulaire et gestion des déchets : la fondation Concorde conseille un lifting

La fondation Concorde vient de publier un rapport portant un regard critique sur la gestion des déchets, notamment sur leur collecte et sur la fiscalité qui leur est propre. Ce document formule des propositions d'évolutions législatives, invite à libérer l’innovation et à considérer les déchets comme une ressource dédiée à un véritable usage.

Intitulé "Faire enfin des déchets une ressource", le dernier rapport de la fondation Concorde propose des mesures pour "mettre la France sur le chemin d’une modernisation de la gestion de ses déchets et de l’économie circulaire". Tourné vers les entreprises mais aussi le développement des territoires, ce think tank part du constat que la loi de transition énergétique a fait avancer l'enjeu et la volonté d’utiliser le déchet comme une ressource, mais qu'elle aurait besoin "d’être éclaircie et précisée, sans nouveau dispositif légal lourd, et ce pour développer l’écosystème de la valorisation des déchets qui fait encore défaut à la France".

Collecte complexe

Cette fondation pilotée par un ancien élu local, l'économiste Michel Rousseau, qui fut à deux reprises maire de communes rurales dans l'Eure-et-Loir, pointe pour commencer très frontalement deux défauts : "On ne connaît pas le coût réel de notre système de traitement des déchets, faute de comptabilité idoine (…) Et depuis vingt ans, on a fait porter la responsabilité de la qualité du tri sur l’usager. Une logique dont on perçoit à présent les limites, avec un tri qui reste très peu performant et mal réalisé par les particuliers". La critique s'élargit à la grande complexité des règles de tri, aux limites de l'apport volontaire en milieu urbain dense, ainsi qu'au compostage, qui reste "en pratique assez délicat".  Sans oublier les problèmes que posent la collecte des biodéchets dans ces mêmes zones - "si bien que des villes en pointe sur le recyclage ne s’y sont pas encore attelées, tant les difficultés pratiques sont nombreuses".

Manque d'incitation

Du côté du cadre institutionnel, le tableau n'est guère plus reluisant avec, pour les ménages, un dispositif de tarification incitative liée à la quantité de déchets "qui reste embryonnaire" et, pour les collectivités et leurs prestataires, "des clauses de performance qui restent rares". Alors que la réduction des déchets à la source est l’approche privilégiée par les pouvoirs publics, "elle n’est pas soutenue par une fiscalité incitative adaptée". La taxe d’enlèvement des ordures ménagères (Teom) est en effet assise sur le foncier bâti, sans rapport avec la production de déchets : "Elle n’est pas incitative et de surcroît inéquitable, les petites surfaces comme les restaurants payant peu – ils acquittent une redevance spéciale – et les grandes maisons vides, beaucoup".

Prime à l’immobilisme

Sévère envers cette fiscalité des déchets qu'il juge "complexe, instable et déséquilibrée", ce rapport pointe en outre une lacune liée aux règles régissant les marchés publics. En imposant la mise en œuvre "de moyens plutôt que la fixation d’objectifs de performance", en rejetant "pour non-conformité au cahier des charges de la collectivité attributive" les innovations proposées par des prestataires, ces marchés multiplient les freins, selon ce rapport. Le think tank propose en ce sens d’inscrire dans la loi une obligation de résultat dans ces domaines de la collecte et du traitement, "ce qui conduirait à modifier les cahiers des charges et l’offre des opérateurs".

Pour une économie circulaire

Ecoconception, économie collaborative ou de fonctionnalité, priorité réellement donnée à la réparation, ce rapport défend la logique de l’économie circulaire. Mais pour donner un "avantage compétitif " aux produits issus de matières premières et secondaires, "il faut une volonté politique", plaide-t-il. Et inciter les collectivités locales, qui sont "au plus près des usagers", à repenser la traditionnelle répartition entre leurs compétences (collecte, organisation du traitement sur leur territoire) et celles des éco-organismes, financiers et/ou opérateurs de traitement.
Il invite également les pouvoirs publics à repenser les déchetteries - qui sont "des lieux de collecte et pas encore des recycleries abouties" - et la place que pourraient prendre les acteurs "plus petits, flexibles, implantés au cœur des territoires" et aptes à s’associer aux grands groupes. Il propose aussi d'augmenter les filières REP pour couvrir plus de catégories de produits, de clarifier le rôle de la valorisation énergétique. Et, pour finir, de lever l'interdiction de fongibilité entre déchets industriels et ménagers, en vue d'améliorer leur valorisation grâce à des filières mixtes aujourd'hui interdites, mais dont le potentiel pourrait être intéressant à explorer.