Environnement - Economie circulaire : des élus prêts à prendre le tournant
Vous êtes élu ou acheteur public et le concept d'économie circulaire ne vous parle pas du tout ? "Il y a pourtant des réalisations concrètes couvrant ses sept piliers. Des départements, des communautés de communes, des régions s'offrent en terrains d'expérimentation. Mais il n'y a pas de modèle prémâché de stratégie pour sa mise en œuvre, c'est aux territoires de se l'approprier et de la construire. Dans le guide publié début décembre avec l'Association des régions de France (voir notre article publié le 2 décembre), nous suggérons des pistes et points d'entrée", a motivé Jacques Deschamps, directeur de l'action régionale à l'Ademe, lors d'un séminaire sur le sujet qui a fait salle comble le 22 janvier au ministère de l'Économie. L'importance des formations et le rôle des acheteurs publics ont été pointés. En face, les entreprises semblent s'être emparées de l'enjeu. "Tout en économisant les ressources, il y a donc avec elles des gains financiers à réaliser. Parmi les entreprises répondant à des marchés publics, on voit des moins-disants utilisant prioritairement des matériaux recyclés. Ce sont là des opportunités à saisir", observe Corinne Rufet, vice-présidente du conseil régional d'Ile-de-France. Pour soutenir les projets d'entreprises allant dans ce sens, il faut aussi des financements. La région Nord-Pas-de-Calais vient en ce sens d'opter pour une mobilisation de l'épargne populaire : un livret permettant d'accorder des prêts à une tarification avantageuse aux entreprises porteuses de projets dans ces domaines vient d'y être lancé par le Crédit coopératif.
Le Grand Paris décrète des Etats généraux
En février vont débuter pour six mois les Etats généraux de l'économie circulaire du Grand Paris. "Nous venons de réunir les collectivités mobilisées, dont la région Ile-de-France, les ONG et associations aussi l'ont été et nous poursuivons avec les conseils de quartier. Pour que les habitants appréhendent mieux l'économie circulaire, il faut qu'ils aient un accès direct à l'un de ses volets, déclinaisons ou réseaux, par exemple très concrètement aux ressourceries et recycleries. Dans leur cas, le but est d'en développer pour atteindre la trentaine en Ile-de-France", expose Antoinette Guhl, adjointe à la maire de Paris en charge de l'économie circulaire. Dans le cadre de ces Etats généraux, une dizaine de thèmes seront mis en avant : gestion des déchets de chantier - le plan régional ou Predec est attendu pour juin prochain - réduction des volumes ménagers par une meilleure gestion des biodéchets ("une aberration qu'à notre époque ils soient encore incinérés"), récupération d'énergie, gaspillage alimentaire, zones propices à plus d'écologie industrielle, etc.
Une initiative remarquée ?
Anticipant le renforcement de la réglementation, 85 restaurateurs parisiens testent depuis sept mois une filière créée pour l'occasion de valorisation de leurs déchets fermentescibles. Au lieu des 200 tonnes espérées, le triple a été collecté ! "C'est exemplaire sauf qu'après, ces biodéchets prennent la direction de l'Essonne. A Etampes, un méthaniseur en tire de l'électricité, de la chaleur et un digestat utilisé en épandage par des agriculteurs proches de l'usine. Ils ne sont donc pas traités à proximité. Il faut poser la question de l'acceptabilité de ce type de projet en zone très dense", regrette Corinne Rufet. "Il y a un problème d'axe central, de réflexion : il ne faut pas que l'économie circulaire devienne à son tour une para-économie spécialisée, comme le fut l'économie sociale et solidaire (ESS) à ses débuts", conclut Michel-François Delannoy, conseiller régional du Nord-Pas-de-Calais.